[Mark Chopper] Mes critiques en 2014

[Val]

Je le note dans un coin, ça m'a l'air pas mal du tout vu ce que tu en dis.

[Dunandan]

The Raid 2, de Gareth Evans (2014)

L'histoire : Rama doit infiltrer le syndicat du crime de Jakarta. Il prend donc l'identité d'un prisonnier et se lie d'amitié, derrière les barreaux, avec le fils du parrain local...

Survendu comme "le plus grand film d'action de tous les temps", The Raid ne dépassait jamais son statut de petit film de tape décérébré un brin répétitif, tout juste bon à livrer quelques scènes à voir (ou revoir) de manière isolée sur YouTube. Pour cette suite, Gareth Evans a vu grand : scènes d'action plus ambitieuses, histoire de flic infiltré, drame œdipien au sein d'un syndicat du crime indonésien et guerre des gangs contre des yakuzas... Problème : on s'ennuie ferme pendant 1h20. L'histoire, inintéressante avec ses longueurs et ses personnages clichés, se résume à des acteurs qui blablatent autour d'une table et les rares scènes d'action se révèlent courtes et mal torchées. Quelle mouche a piqué le réalisateur pour le pousser à livrer un film de 2h30 alors qu'il n'a aucun talent d'écriture ? Il existe un juste milieu entre l'absence d'histoire (et de montée en puissance) du premier opus et grande fresque... Difficile de ne pas bâiller quand un seul personnage existe (le fils du parrain local) et de ne pas soupirer quand l'acteur principal est à ce point transparent. Ce constat est d'autant plus regrettable que certaines séquences, par la suite, laissent bouche bée, comme celle où une femme armée de marteaux massacre une dizaine de gardes du corps dans une rame de métro ou celle de la poursuite en voitures, tout simplement démentielle. Voire jamais vu. Si Gareth Evans n'avait pas eu les yeux plus gros que le ventre, il aurait pu livrer une référence monstrueuse. Le cinéma d'action rend souvent indulgent : s'il livre la marchandise, on lui pardonne bien des soucis d'écriture. Mais pour ma part, je juge un film comme un tout, je ne peux écarter tant de scènes de ma mémoire sous prétexte que d'autres me conviennent. Une histoire ennuyante, des scènes d'action répétitives (en dehors des deux citées plus haut), abrutissantes (à l'image du final du premier opus) et tirées vers le bas par des plans gores inutiles (à tel point qu'on regarde le tout avec un certain sadisme au début, puis comme sous anesthésie vers la fin). L'ambition et les intentions ne font pas tout : un ratage assez frustrant car il suffisait de tailler dans le gras pour accoucher d'un miracle.

Note : 5/10

[zack_]

Mark tatane le film! Curieux de voir ça même si je sens que je vais être autant refroidi vu que je pense pareil que toi pour le 1.

[Dunandan]

Bonne critique en tous cas. Déjà que le premier opus je lui mettais un 6.5 forcé, alors 2h30 d'écriture foireuse du même tonneau, c'est chaud ^^.

[Mark Chopper]

C'est con parce qu'ils avaient tout pour faire un chef-d'oeuvre.

[Alegas]

Le Dernier des six, de Georges Lacombe (1941)

L'histoire : Six amis décident de se séparer pour faire fortune et promettent de se retrouver cinq ans plus tard pour partager l'argent de manière équitable. Alors que le jour du partage se rapproche, ils meurent l'un après l'autre...

Adaptation d'un roman de Stanislas-André Steeman produite par un certain Joseph Goebbels (oui, oui...) via sa société Continental-Films. L'idée de ce dernier était de proposer aux français des films "légers, vides et, si possible, stupides", mais l'homme qu'il avait nommé à la tête de cette société, Alfred Greven, prenait bien des libertés avec son cahier des charges. D'où un paradoxe : certains longs-métrages nés au sein de cette compagnie, pointés du doigt après la guerre, se révèlent plus libres que d'autres soumis à la censure de Vichy. L'exemple le plus frappant reste Le Corbeau de Henri-Georges Clouzot, par ailleurs auteur de l'adaptation qui nous intéresse ici et qui annonce son premier long-métrage : L'Assassin habite au 21. On y retrouve, déjà, Pierre Fresnay et Suzy Delair dans les rôles d'un commissaire flegmatique adepte du bon mot et de sa maîtresse à grande gueule. L'histoire mêle suspens et comédie, avec cette intrigue qui rappelle Dix petits nègres d'Agatha Christie et ces dialogues qui font mouche. Niveau suspens, toutefois, le niveau est léger, la faute à un nombre limité de suspects. Mais l'humour rattrape le tout... A la mise en scène, Georges Lacombe fait du boulot un peu trop pépère et doit composer avec les exigences d'un studio qui lui impose des scènes de music-hall parfois longuettes qui cassent le rythme de l'ensemble. Au final : une séance un peu datée, mais rendue agréable par la qualité de l'interprétation.

Note : 6,5/10

[Val]

Je dois avouer que je n'en connaissais même pas l'existence avant d'en entendre parler dans les bonus de L'Assassin... mais que vu la qualité de ce dernier, ça me donne envie d'y jeter un oeil (bien qu'il soit unanimement admis qu'il est largement moins bon).

[Mark Chopper]

Je vais mater quelques Clouzot dans l'année. Je n'ai vu que Le Salaire de la peur.

[Alegas]

L'Assassin habite au 21, de Henri-Georges Clouzot (1942)

L'histoire : Un mystérieux assassin terrorise Paris en commettant des crimes en série. Il signe ses forfaits d’une carte de visite au nom de « Monsieur Durand ». Le commissaire Wens est chargé de l’enquête...

Premier long-métrage de Henri-Georges Clouzot, qui retrouve les deux personnages principaux d'un film qu'il avait écrit l'année précédente, Le Dernier des six. Ce qui marque, ici, c'est la modernité de l'ensemble, loin du côté plan-plan de la réalisation de Georges Lacombe. En effet, le film de Clouzot trahit rarement son âge : une introduction qui préfigure le giallo (meurtre à l'arme blanche en caméra subjective), un soin apporté à la forme (la gestion du cadre, le travail sur les ombres : l'influence de l'expressionnisme allemand crève les yeux) et un talent inouï pour l'écriture de dialogues qui claquent (les répliques fusent, l'humour est souvent présent). Le tout au service d'un whodunit animé par des suspects quelque peu caricaturaux et, surtout, par les personnages joués par Pierre Fresnay, génial en commissaire flegmatique adepte du bon mot et du déguisement, et Suzy Delair, sa compagne que l'on trouvera attachante ou irritante (sa voix éclate les tympans...). Malgré l'humour apporté par le personnage du Commissaire Wens au cours d'une enquête hélas pas toujours passionnante, la noirceur de l'univers de Clouzot répond déjà présent dès son coup d'essai et ce dernier évoque, à travers le microcosme d'une pension de famille, une société peu reluisante, en proie au soupçon généralisé et à la désunion. Si Le Dernier des six ne dépassait jamais son statut de film policier divertissant, L'Assassin habite au 21 révèle, derrière son apparence parfois légère, un fond inquiétant qui annonce l'œuvre suivante de son auteur : Le Corbeau. En résumé : malgré quelques défauts (personnages clichés et rythme en dents de scie), un film de commande plein de promesses.

Note : 7,5/10

[Val]

Content que tu l'ais apprécié.

[Dunandan]

Le Corbeau, de Henri-Georges Clouzot (1943)

L'histoire : Les notables d'une petite ville de province reçoivent des lettres anonymes signées ''Le corbeau'', dont le contenu se révèle calomnieux. Elles évoquent le plus souvent le docteur Rémi Germain, présenté comme un avorteur...

Un film couillu, maudit et salutaire. Il en fallait dans le pantalon pour tourner, dans la France occupée, un long-métrage sur le thème de la délation. Clouzot a touché un nerf, au point de se faire traîner dans la boue par tous les camps, sous le régime de Vichy et à la Libération. Le cinéaste, accusé d'avoir réalisé une œuvre qui donnait une mauvaise image de la France et de ses habitants, se retrouva interdit à vie de mise en scène. La peine fut finalement réduite à deux ans et Le Corbeau reconnu pour ce qu'il est : un film essentiel... Comme dans L'Assassin habite au 21, nous sommes en présence d'un whodunit, mais cette fois sans personnage caricatural, avec un nombre accru de suspects. Clouzot nous promène et affine son style : l'influence de l'expressionnisme allemand reste présente (les jeux d'ombre et de lumière) et les dialogues claquent toujours autant (surtout au cours des échanges entre Pierre Fresnay et Pierre Larquey). Le Corbeau étonne par sa modernité, tant sur la forme que sur le fond : on y parle de drogues, d'avortement et d'adultère sans aucun manichéisme. Aucun personnage ne peut servir de modèle : les habitants du village sont présentés comme bêtes et lâches, toujours prêts à accuser leur prochain. La noirceur entraperçue dans le premier film du cinéaste éclate cette fois au grand jour : tout le monde joue un rôle et, lorsque les masques tombent, la laideur de l'humanité apparaît. Un jeu de massacre qui déçoit seulement du fait de sa conclusion précipitée.

Note : 7,5/10

[osorojo]

Pour l'instant, on a sensiblement le même avis sur Henri-Georges Clouzot ^^

Tu me donnes envie de me replonger dans sa filmo !

[Dunandan]

Moi aussi ça fait longtemps que j'ai envie de plonger dedans (vu que 2-3 films pour l'instant), mais j'ai d'autres priorités pour l'instant, et ça risque d'attendre jusqu'à l'an prochain vu la hauteur de ma pile .

[Mark Chopper]

Je suis bien parti pour voir l'intégrale, à part ses deux documentaires qui m'attirent peu.

[maltese]

Oh, je te trouve un peu radin sur le coup; la conclusion précipitée m'a décontenancé également, mais elle ne contredit pas la force du film. Et au vu de ta critique, on pourrait penser que tu irais plus haut qu'un 7,5/10. Un très grand film