Magnum force n'est peut-être pas aussi bon que
Dirty Harry, mais justement l'intelligence de cette suite est de faire évoluer le personnage tout en étant respectueuse de son esprit. Cette fois-ci, on essaie d'humaniser un peu Harry, car ce n'est pas lui qui fait le ménage dans les rues (sauf à 2-3 occasions mémorables où il bute par exemple un mec à travers la cloison d'un avion, histoire de rappeler qu'il n'est pas devenu une fiotte), mais des flics renégats à moto dont on ignore l'identité, dotés d'une mise en scène qui en impose durant des exécutions sèches et sans concession. D'ailleurs on la grille assez rapidement cette identité, mais l'intérêt réside ailleurs. En premier lieu à travers une intrigue plus riche qu'en apparence, qui relance avec intérêt la relation entre les principes de l'inspecteur inflexible, son respect de la loi, et la violence qu'il emploie pour arrêter les criminels, avec le pistolet comme fil directeur au sens propre et figuré (ça prend tout son sens lorsqu'on est défini par son magnum 357). Puis en livrant un portrait au vitriol de la mauvaise société qu'on accueille forcément avec un petit sourire en coin tant ça va dans les excès, rendant ainsi les mises à mort très ambigües dans leur finalité.
Dommage que les
punchlines soient moins nombreuses et pêchues, mais une sort vraiment du lot et revient comme un
gimmick, adoptant différentes tonalités au fur et à mesure que le film avance. D'autres petits traits de légèreté sont à signaler, rendant ainsi l'inspecteur sinon vulnérable, du moins attachant, et donc moins froid que dans le précédent opus, par exemple en mettant en avant de façon assez comique son succès sexuel avec les femmes alors qu'il n'avait rien demandé (ce qui lui offre au passage une vie sociale alors qu'il était avant seul contre tous). Même si ses méthodes détonnent toujours, il est ainsi plus intégré au système (d'ailleurs son collègue est black et sa copine est asiatique, donc son racisme s'est aussi volatisé). Ce qui me gêne un peu, c'est qu'on a perdu ce côté
je suis influencé par mon environnement mais en même temps je le combats de l'intérieur, mais on ne peut reprocher au film de ne pas faire la même chose, et d'explorer d'autres zones de la personnalité de Harry sans trahir ce qu'il est réellement, à savoir un inspecteur pugnace et expéditif qu'il fera ce qu'il à faire pour stopper les criminels.
La structure narrative du film est carrée et efficace, simple à suivre, se découpant en trois parties, avec les flics assoiffés de justice, l'enquête policière, et puis le règlement de comptes final. Même s'il manque peut-être un fil directeur plus solide, Ted Post rend une bonne copie en variant les plaisirs, en livrant des personnages bien couillus et ambigus, et en insufflant une atmosphère urbaine tendue dans le sillage du précédent opus, sans oublier quelques intermèdes légers loin d'être inutiles (comme le concours de tir, qui offre un affrontement avant l'heure entre les deux meilleurs tireurs du commissariat), y compris durant les exécutions (bonus
boobs). Enfin le climax final est assez long et flirte avec le western (avec quelques bons coups de putes qui font plaisir), pour terminer sur une note beaucoup moins sombre mais tout aussi ironique que dans le premier film. A défaut d'être un indispensable du genre (je n'aurais pas craché contre quelques
punchlines de plus bien senties),
Magnum force offre à coup sûr une séance sympathique, mélange réussi du polar urbain dans toute sa rugosité et
Vigilante-movie sortant légèrement des rails.
L'homme sage est celui qui connaît ses limites.