Réalisation :
Joel et Ethan Coen
Photographie :
Bruno Delbonnel
Acteurs principaux :
Oscar Isaac
Carey Mulligan
Justin Timberlake
John Goodman
Garrett Hedlund
Joel et Ethan Coen
Photographie :
Bruno Delbonnel
Acteurs principaux :
Oscar Isaac
Carey Mulligan
Justin Timberlake
John Goodman
Garrett Hedlund
Hommage touchant à la musique folk que ce nouveau film des frères Coen. Musique folk donc, mais pas seulement. Le film choisit de se focaliser sur Llewyn, jeune chanteur-guitariste bohème à la Bob Dylan dans les années 60 à New York. Mais il nous fait rencontrer toute sorte de personnages illustrant ce quartier mythique de NY. Greenwich Village, berceau de la Beat Generation, de la scène hippie, de la folk et de tous ces artistes cherchant à échapper au conformisme de leur époque.
Les Coen nous livrent une illustration parfaite de ce quartier, de ses mentalités et des futurs grandes stars qui l'habitent et cohabitent ensemble dans un magnifique manège artistique.
Esthétiquement recherché, le travail de Bruno Delbonnel nous plonge dans un monde grisâtre et enfumé ou les faibles projecteurs des bars peuvent vous éblouir ou vous magnifier. Un gros travail de contre-jour, de surexposition marque admirablement cette sorte de limite entre la scène et l'extérieur et surtout entre le monde de Llewyn et les autres. Je pense notamment à cette aire d'autoroute illuminée de toute part. La colorimétrie rappelle aussi les premières photos couleurs avec des teintes parfois étranges, des bleus verdâtre etc. Proche de la photographie d'Aviator (qui s'inspirait du bichrome des années 20) mais pas aussi extrême.
Le casting est très réussi. Isaac est parfait et possède une superbe voix en plus de ça, les reprise sont très bonnes. Carey Mulligan est plutôt correcte et Garrett Hedlund très sympa dans cet espèce de James Dean mystérieux.
Le film est donc un hommage à Greenwich Village et toute la génération d'artistes qui le peuple. Mais un hommage étrange puisqu'il ne traite pas de la réussite de son personnage. En effet Llewyn est ce qu'on peut appeler un véritable looser. L’exemple même du type qui fait tout à l'envers. Son personnage est inspiré du très talentueux Dave Van Ronk (la pochette de son vinyle qu'il présente est d'ailleurs une copie d'un de ses albums "Inside Dave Van Ronk"). Un grand ami de Bob Dylan qui n'aura jamais eu la même notoriété que lui. Je ne pense pas que le film cherche à dire "voilà pourquoi Dave n'a pas été aussi connu", ce n'est à mon sens qu'une inspiration et un hommage à ce grand chanteur folk très peu connu en dehors des USA et des amateurs de folk.
Llewyn est donc présenté comme un personnage prenant toujours les mauvaises décisions. Chacune d'entre elles apportant quelque chose de mauvais. Quelques exemples:
Il préfère passer outre les droits d'auteur sur la chanson qu'il enregistre alors qu'elle va au final rapporter beaucoup d'argent.
Lors de son audition il choisit de jouer une chanson à caractère religieux/historique, le directeur de la salle lui dit qu'il ne touchera personne avec ça. Pourtant il chante chaque soir des morceaux qui touchent les gens car ils parlent d'une vie qu'ils connaissent. Il s'en rendra d'ailleurs compte lorsqu'il chantera à son père (ancien marin) ce magnifique morceau sur la mer et ceux qui y voyagent.
Il se bourre la gueule et insulte une chanteuse pour se faire tabasser le lendemain par son mari et passer à côté du futur génie Bob Dylan.
Il choisit de rentrer chez lui alors qu'il passe à côté du village de son ex copine qui a eu un enfant de lui. Etc etc...
Bref, des choix souvent mauvais certes, mais qui construisent un homme et son histoire. N'est ce pas là l'hommage véritable ? L'histoire de ces hommes talentueux qui auront, ou pas, réussi à devenir ce qu'ils souhaitaient en restant eux-mêmes dans leurs bons et leurs mauvais côtés.
Le film se permet également une petite critique envers cette musique répétitive et purement commerciale qui ne cherche pas à toucher les gens et qui utilise leur foi pour toucher leur portefeuille. D'ailleurs lors de son audition, Llewyn ne choisit-il pas intentionnellement le morceau sur la reine Jeanne ? Car au fond de lui il ne veut pas jouer dans ces grandes salles ? Il ne veut pas faire partie de ce business ?
Le chat est également intéressant. Pour moi il fait référence à un célèbre morceau de folk "The Cat Came Back". Il raconte l'histoire d'un chat jaune-roux (tiens tiens ) arrivant chez quelqu'un qui n'en veut pas et qui cherche sans cesse à s'en débarrasser. Mais le chat revient toujours. Métaphore du personnage de Llewyn, ce squatteur de canapés, qui ne sait jamais ou aller car personne n'en veut vraiment. Pourtant, il revient toujours.
Égoïste, comme un chat, Llewyn finira donc assis par terre dans la rue à dire au revoir à un inconnu qui vient de le tabasser. En arrière-plan Dylan chante Farewell. Cette chanson sur un amour impossible, qu'on laisse derrière soi.
7.5/10