Raging Bull de Martin Scorsese
(1980)
Seconde vision et c'est toujours aussi bien, je revois même le film quelque peu à la hausse tant j'ai l'impression de redécouvrir l'intention du métrage. Après l'échec financier de New York New York, Scorsese se tourne vers un projet qui n'opte pas pour la prise de risque, à savoir un biopic de Jake LaMotta. Pourtant, le cinéaste ne cède pas à la facilité et là où beaucoup auraient fait un simple film sur la boxe, Scorsese se met en tête de dessiner le portrait d'un homme antipathique, voire carrément détestable, sur un schéma de rise and fall qui deviendra une signature du réalisateur. Du coup, on se retrouve face à un film purement scorsesien, que ce soit visuellement ou dans l'esprit, une œuvre sacrément radicale dans son traitement puisqu'elle ne propose que la vision décadente d'un homme auquel on ne peut pas s'attacher, un protagoniste auquel Scorsese ne donnera que rarement une once d'humanité. Un concept casse-gueule, mais qui fonctionne de façon assez surprenante, en grande partie grâce à Robert De Niro qui trouve ici ce qui reste très certainement sa plus grande prestation.
Pour autant, le film a tout de même ses défauts, notamment un récit à base de tranches de vie et d'ellipses qui ne fait pas spécialement du bien au rythme de l'ensemble, notamment sur la première heure du métrage. Heureusement, à partir du moment où le personnage de LaMotta devient champion, on aborde réellement la partie la plus intéressante du film, et on a donc une pure descente aux enfers habilement gérée et parsemée de sacrés moments d'acting, notamment les séquences entre Pesci et De Niro et surtout le plan-séquence en prison assez phénoménal. Niveau mise en scène, c'est plutôt sage sur les parties intimistes du récit qui n'exploitent pas très bien le choix du noir et blanc, mais dès que l'on aborde une séquence-clé, Scorsese se lâche totalement et livre des passages juste monstrueux, entre un générique au ralenti, un dernier face à face La Motta/Robinson bien violent, des compositions de plan à tomber et un plan final tellement génial qu'il sera repris par Paul Thomas Anderson pour son Boogie Nights (qui est, avec le recul, une sorte de remake de Raging Bull dans l'esprit). Bref, c'est du très bon film, peut-être pas le chef-d’œuvre souvent vendu par la critique mais c'était clairement le sommet de Scorsese à l'époque.
NOTE : 8,5/10