The mist, Frank Darabont (2008)
Frank Darabont, le mec qui a montré en trois films comment adapter un roman de Stephen King (en fait quatre si on compte son court-métrage), en se focalisant sur la psychologie et le comportement des personnages, contribuant à les rendre réels, incarnés. Bon ce n'est pas mon préféré du lot pour des raisons de dosage que j'expliquerai plus loin, mais j'ai encore pris mon pied pour l'expérience qu'il propose, en se focalisant d'abord sur l'humain avant d'envoyer la sauce dans ce qui est selon moi l'un des meilleurs films de monstres. Le script est efficace, divisé en deux parties. La première est certainement la meilleure, car elle instaure l'ambiance (un bon brouillard épais), pose un cadre (intimiste avec caméra à l'épaule), et nous introduit les personnages dans ce qui est avant tout un thriller psychologique, où ce qui importe est moins la menace extérieure que les diverses réactions humaines possibles face à l'inconnu. C'est un classique, plusieurs l'ont fait avant, et ici ça fonctionne bien (car on a passé un peu de temps avec eux, avec des dialogues de tous les jours très réalistes) tant qu'on accepte des réactions un peu excessives dans le genre, comme les délires religieux, le pragmatisme, le déni, le fatalisme, ou l'empathie. Tout se mélange pour reconstituer en miniature la société humaine dans ses contradictions et sa dureté face à ses peurs, recomposée à travers différents clans où les anciens rôles ne sont plus, remplacés par la force de conviction, malléable comme un rien. Un jeu humain très dangereux qui gangrène ce huis-clos de l'intérieur avant même que les créatures ne pénètrent leur espace vital.
Cependant, même si l'intention de confronter ces humains est très bonne, voire la meilleure idée du film (une référence évidente à The Thing), et que la tension à l'intérieur du supermarché est palpable et haletante, justement cela justifie des actions parfois vraiment très bêtes et absurdes (pourtant on a bien vu qu'il y a du danger potentiel, pourquoi il y a toujours un con qui veut sortir), et des personnages taillés à la serpe (la psychotique religieuse est un exemple fort de ce genre). Heureusement que le casting est vraiment très bon, ce qui permet d'accepter dans une certaine mesure les différents rapprochements/symboliques entre brouillard, peurs irrationnelles, instinct de survie, et Apocalypse. Autre problème, le temps passe à vive allure et ainsi, malgré qu'on ne lâche jamais les personnages, l'évolution soudaine de certains d'entre-eux (ceux qui se rallient à la cause divine de cette sorcière) est inexplicable ou peu crédible. Dernier petit défaut, les effets spéciaux ne sont pas toujours très bien incrustés (surtout au début, lorsque la créature géante baigne dans la lumière), mais dans l'ensemble ils sont quand même de haute tenue, surtout lorsqu'ils sont entourés de brouillard et qu'on ne voit que des parties, car on a toujours peur de ce qu'on ne voit pas (mais c'est aussi flippant de les voir utiliser des capacités hybrides et donc inattendues).
Au final, malgré ces nombreux défauts (psychologie et symboliques peu raffinées, évolution des personnages mal gérée, situations absurdes, effets parfois loupés), au niveau de l'immersion sensorielle cette bobine fait très mal, avec une première partie qui met bien en exergue l'humain face à ses peurs primaires, une seconde qui envoie du lourd au niveau du bestiaire et des séquences qui tachent, et une fin nihiliste peut-être un peu trop appuyée mais qui est finalement dans le ton apocalyptique de l'ensemble où la racine du mal, le véritable monstre, réside d'abord en l'homme.
Note : 8/10