Inception |
Réalisé par Christopher Nolan Date de sortie 21 juillet 2010 (2h28min) Avec Leonardo DiCaprio, Marion Cotillard, Ellen Page,... . |
10/10 |
Synopsis:
Dom Cobb est un voleur expérimenté – le meilleur qui soit dans l’art périlleux de l’extraction : sa spécialité consiste à s’approprier les secrets les plus précieux d’un individu, enfouis au plus profond de son subconscient, pendant qu’il rêve et que son esprit est particulièrement vulnérable. Très recherché pour ses talents dans l’univers trouble de l’espionnage industriel, Cobb est aussi devenu un fugitif traqué dans le monde entier qui a perdu tout ce qui lui est cher. Mais une ultime mission pourrait lui permettre de retrouver sa vie d’avant – à condition qu’il puisse accomplir l’impossible : l’inception. Au lieu de subtiliser un rêve, Cobb et son équipe doivent faire l’inverse : implanter une idée dans l’esprit d’un individu. S’ils y parviennent, il pourrait s’agir du crime parfait. Et pourtant, aussi méthodiques et doués soient-ils, rien n’aurait pu préparer Cobb et ses partenaires à un ennemi redoutable qui semble avoir systématiquement un coup d’avance sur eux. Un ennemi dont seul Cobb aurait pu soupçonner l’existence.
Mon avis et mon analyse :
Après nous avoir livré la plus fabuleuse adaptation de Batman qui soit, avec son fantastique Dark Knight, Christopher Nolan s'accorde donc une petite pause dans sa saga batman pour nous livrer une oeuvre originale. Le film n'est ni une suite, ni une adaptation, ni un remake, et tout ceci mérite d'être souligné, tellement ce genre de film apporte un vent de fraicheur dans la grosse machine hollywoodienne qui malheureusement peine à se renouveler depuis près de 15 ans, du moins dans la catégorie des blockbusters.
Et autant dire que le résultat est à la hauteur des attentes.
Scénario malin, qui permets des fulgurances visuelles jamais vues auparavant, Inception est sans doute l'une des œuvres majeures de l'année 2010, et sans aucun doute le meilleur film de son auteur. Servi par un casting 4 étoiles, Nolan se paie en outre le luxe d'améliorer sa mise en scène là où notamment ses précédents opus (enfin là je parle des deux batman) pêchaient par manque de lisibilité. Il faut dire que le sujet permet un peu à Nolan de se lâcher et de nous offrir un spectacle à même de décoller la rétine. Evidemment, tout n'est toujours pas parfait, mais il y a déjà un net progrès. Après certains rechignerons sur certains effets qui sont maintenant la marque de fabrique de Nolan (ou la nouvelle marque de fabrique du compositeur, Hans Zimmer), mais qu'importe, le plaisir est immédiat... et encore décuplé quand on se lance dans une nouvelle vision du film:
Des théories fumeuses à mon interprétation de l'inception
Bon, passons maintenant aux choses sérieuses !
A l'époque, beaucoup ont été d'avis que l'inception se faisait sur le personnage de Cobb, interprété par Di Caprio, avis que je ne partage pas du tout. Tout d'abord, il est intéressant de voir que le film est sorti à un moment propice, notamment dans la foulée de l'excellentissime Shutter Island, toujours avec Leonardo Di Caprio, et qui permettra au film de Nolan de toucher son public, enfin c'est mon avis, d'une façon inespérée par rapport à ce que je vais me permettre de développer à présent. Ainsi, pour en revenir à l'inception, à mon sens, la personne sur laquelle est effectuée l'inception est, selon moi, le spectateur.
Je vois deux niveaux de lecture dans ce film qui n'ont pas d'existences alternatives mais cumulatives.
De prime abord, comme dans n'importe quel film, il s'agit de nous raconter une histoire, bien évidemment et jusque là on est d'accord il n'y a rien de particulier à signaler.
Concernant l'histoire stricto sensu donc, celle-ci peut paraître alambiquée de prime abord, mais finalement, après plusieurs visions (en fait deux suffisent largement), on se rend rapidement compte qu'elle l'est infiniment moins compliquée que celle d'un Shutter Island (pour citer cet exemple récent et "connu" de films à tiroirs que j'ai évoqué précédemment). La complexité de l'histoire dans Inception est cependant et définitivement un faux débat. En réalité, objectivement, tout est parfaitement clair au niveau de l'intrigue: on nous donne dès le départ toutes les informations nécessaires à la compréhension de l'histoire (le but recherché par les protagonistes, la technique et la stratégie utilisée par ces derniers, etc...) tout en se limitant strictement à l'essentiel. A ce stade, il n'y a pas d'interprétation particulière à rechercher, et il suffit de se contenter de ce qu'on voit à l'écran. Et c'est à partir de là que Nolan, à l'instar de ce que nous a déjà offert Le Prestige, opère un véritable tour de force pour se jouer du spectateur.
A mon humble avis, toutes les théories exposées par ci par là s'effondrent rapidement dès lors que l'on se rend compte qu'aucun élément dans le film ne permet de les confirmer (l'inception doit se faire sur Cobb, ok mais à l'initiative de qui ? les autres personnages ont-ils eu à un seul moment un comportement suspect vis-à-vis de Cobb ? Non. Etc...). Aucun élément ne permet de prouver la réalité de ces théories qui ne restent qu'à l'état de pure théorie. Ici, on n'est pas dans lost, entendons nous bien. Il n'y a pas d'indices parsemés le long du métrage, même si les plus paranos en verront certainement... Pour moi, il n'y a aucune curiosité dans le film qui justifierait de se lancer dans la moindre théorie fumeuse.
j'interprète alors le film comme suit (j'insiste sur le fait qu'il ne s'agit pas d'une théorie, mais d'une interprétation, nuance). Je disais donc en introduction, que pour moi, l'inception se faisait sur le spectateur. Je vais énumérer les éléments à l'appui de mon interprétation, ce sera plus simple et plus clair:
1. L'industrie du cinéma, et a fortiori des grandes machines hollywoodiennes, se définit comme une usine à rêve.
2. Dans un rêve, on se retrouve souvent avec des personnages qu'on ne connaît pas. C'est le cas ici, on sait rien de personne, mis à part du personnage de Cobb. Alors oui dans un rêve il y a aussi des personnages familiers. Pour le coup...ce sera donc Cobb.
3. Dans un rêve, et comme c'est expliqué dans le film, on se retrouve bien souvent plongé au milieu de l'action, généralement sans savoir comment on est arrivé là. C'est le cas pour le spectateur, qui se retrouve plongé au milieu de "l'action" dès les premières minutes du film. Il n'y a pas d'introduction, même pas de générique, si ma mémoire est bonne, et on est plongé directement dans le film sans trop comprendre comment on en est arrivé là. Par un montage particulièrement malin, mais que l'on ne peut plus qualifier aujourd'hui d' "original" puisqu'il s'agit d'une des marques de fabrique de Nolan depuis ses débuts (au grand dam de ses détracteurs), on saute d'une scène à l'autre, sans jamais trop savoir pourquoi ni comment.
4. Par ce procédé narratif pseudo "complexe", du moins pour le spectateur lambda, le réalisateur oblige ce dernier à s'investir dans l'histoire et l'oblige notamment à maintenir son attention du début à la fin, pour ne pas perdre le fil...d'Ariane (le nom du personnage d'Ellen Page justement, que je remercie au passage car beyond two souls qui m'a donné envie de me retaper Inception). La pseudo complexité du film amène donc le spectateur à réfléchir et à se poser des questions, parfois inutilement (preuve en est les débats qui s'en sont suivis sur la toile). On peut y faire un parallèle avec l'implication de plus en plus croissante du personnage de Cillian Murphy dans le cadre des opérations menées par la bande à Cobb. Il se croit utile, alors que finalement il ne l'est pas pour ce qu'il fait mais parce-qu'il est le pion essentiel de l'histoire et est manipulé du début à la fin. Comme le spectateur. Sans spectateur, pas de film, sans le personnage de Cillian Murphy, plus d'enjeux.
5. Une fois s'être assuré de l'implication du spectateur, Nolan va alors glisser un tout petit élément qui va tout faire basculer, et finalement il va faire germer une idée dans la tête du spectateur. Avec ce plan final de la toupie, le spectateur qui s'est impliqué jusque là va avoir cette idée en tête: "les apparences sont trompeuses et l'histoire du film n'est pas ce qu'elle parait être..." il y a une explication à trouver. Le spectateur se dit donc que ça va pas être comme dans Shutter Island, et on va pas la lui faire à l'envers. Raté, puisque cette idée va amener le spectateur à explorer inutilement tout à un tas de piste alors qu'il n'y a pas de théorie à trouver.
6. L'inception sur le spectateur est donc réussie, on lui a mis une idée en tête.
7. Ne manque plus que le compte à rebours pour sortir le spectateur du rêve, compte à rebours qui se matérialise par la chanson d'Edith Piaf à la fin du générique de fin...
Et lorsque l'on constate sur les photos de tournage que Nolan est le portrait craché du personnage de Leonardo Di Caprio, je me dis qu'effectivement, c'est bien lui l'auteur de l'inception sur le spectateur !
En tout cas, voilà, c'est comme ça que je vois les choses et pour ma part, de loin le plus grand film de Nolan (avec Le Prestige) maîtrisé d'une main de maître, et moi je suis totalement conquis !
(PS: je me doute qu'on me dira que je vais chercher un peu loin, mais peu importe, ça m'a vraiment éclaté de coucher cet avis par écrit).