Le Monde fantastique d'Oz |
Réalisé par Sam Raimi Avec James Franco, Mila kunis, Rachel Weisz, Michelle Willaims, Zack Braff, Joey King
Fantastique, USA, 2h07- 2013 |
8,5/10 |
Résumé : Lorsque Oscar Diggs, un petit magicien de cirque sans envergure à la moralité douteuse, est emporté à bord de sa montgolfière depuis le Kansas poussiéreux jusqu’à l’extravagant Pays d’Oz, il y voit la chance de sa vie. Tout semble tellement possible dans cet endroit stupéfiant composé de paysages luxuriants, de peuples étonnants et de créatures singulières, même la fortune et la gloire. Celles-ci semblent d’autant plus simples à acquérir qu’il peut facilement se faire passer pour le grand magicien dont tout le monde espère la venue.
Le Monde fantastique d’Oz est un bien bel hommage au film de Victor Fleming et au cinéma, art de l'illusion par excellence. Cette ode au cinéma d’antan commence avec un sublime générique qui nous présente l’évolution de l’art de l’animation et les artisans du film (qui ne sont pas relégués au générique de fin). Dans la première partie du film, Sam Raimi multiplie les clins d’œil au début du cinématographe, utilisant notamment des astuces empruntées à Georges Méliès pour insérer des objets et créer la profondeur de champs. Dans ce « grand magicien d’Oz », maître de l’illusion, il y a un peu de Méliès, lui qui fut d’abord illusionniste.
Raimi parsème également son film de références à l’œuvre de Fleming. La plus flagrante est bien évidemment ce passage du noir & blanc à la couleur, accentué par le changement de format (du 4/3 au cinémascope), dans un effet très Cinémagique qui interpelle tout habitué des Walt Disney Studio. Chaque acteur assume comme dans le film de 1939, un double rôle. Certains effets cartons-pâtes et limite kitsch rappellent les décors et le technicolor époustouflant du film de 1939. D’autres références sont plus subtiles, ainsi les larmes qui creusent des sillons sur les joues de Théodora rappellent que l’eau lui sera fatale.
Par ailleurs, le film parvient à retranscrire fidèlement le côté merveilleux, la richesse et la diversité des différents peuples du monde d’Oz créé par Baum au fil de ses quatorze romans. Sam Raimi a parfaitement su capturer l’atmosphère des romans, aussi bien dans le chatoiement des couleurs ou les paysages improbables que dans la description des peuples et des créatures fabuleuses. Le monde de Baum invite chaque lecteur à une promenade onirique, un voyage merveilleux et fantastique empreint de candeur et de simplicité. Un dépaysement total. Le film de Sam Raimi s’inscrit dans la lignée des œuvres originales et nous propose un univers visuel fascinant et spectaculaire, véritable régal pour les sens.
Ce film empreint de morale et de candeur s’adresse aux jeunes spectateurs ainsi qu’aux adultes qui ont su garder une âme d’enfant et s’inscrit donc dans la continuité des romans et du film de 1939. Pour autant, Sam Raimi a su apporter sa touche personnelle. Il alterne avec bonheur, tendresse, humour et atmosphères étranges (des yeux dans l’obscurité, la naissance de la Sorcière de l’Ouest et sa première apparition parmi les Munchkins, la désolation d’une ville de porcelaine en ruine…). Il invente de toute pièce le personnage de China Girl qui symbolise l’enfance dans toute sa fragilité, sa détermination, sa délicatesse ou son impatience. Cette adorable et touchante poupée de porcelaine devient l’âme et le cœur du film. Il revisite avec ironie le grand classique de la pomme empoisonnée du conte de fées.
Le magicien de Baum était un personnage particulièrement rusé, celui de Fleming était un imposteur très bon enfant, celui de Sam Raimi est un charlatan égoïste, manipulateur, charmeur et coureur de jupons. Par certains aspects Oscar Diggs (génialement interprété par James Franco) est un miroir des aspirations et des frustrations de Sam Raimi : artiste de l’illusion, magicien de l’écran, maître des machineries et des supercheries qui aspire à la grandeur, à un destin hors du commun, à la reconnaissance et à l’autonomie artistique. Sa créativité se heurte bien trop souvent à son goût à la puissance des producteurs. L’art cinématographique est par excellence celui de la magie des images.
Sam Raimi propose donc un film enthousiasmant qui balaye mes quelques réserves vis-à-vis de l’interprétation (Mila Kunis et Rachel Weisz peu inspirées) et du manque de surprise du scénario. Car il est vrai que l’histoire est conventionnelle : le héros ou plutôt l’anti-héros arrive dans un monde qu’il est le seul à pouvoir sauver. Le scénario reprend le thème du parcours initiatique du film de 1939, remplaçant Dorothy par Oscar Diggs, le lion peureux et l’homme de fer blanc par un singe volant majordome et une fragile poupée de porcelaine, les chansons en moins. Autre réserve, le maquillage de Mila Kunis n’est pas très heureux, Margaret Hamilton était finalement beaucoup plus impressionnante dans le même rôle. Quelques réserves qui ne gâchent en rien mon plaisir à voir et revoir ce merveilleux film.
Walt Disney avait toujours voulu proposer sa version du Magicien d’Oz, en digne successeur du département animation, John Lasseter lui offre un bel hommage posthume. Au-delà de l’arc-en-ciel, il y a encore une multitude de belles histoires à conter et je suis totalement partante pour une nouvelle aventure féérique au pays d’Oz.