⌲ GRAVITYde Alfonso Cuarón avec Sandra Bullock, George Clooney et l'espace (or is it ?)
Histoire: Pour sa première expédition à bord d'une navette spatiale, le docteur Ryan Stone, brillante experte en ingénierie médicale, accompagne l'astronaute chevronné Matt Kowalsky. Mais alors qu'il s'agit apparemment d'une banale sortie dans l'espace, une catastrophe se produit. Lorsque la navette est pulvérisée, Stone et Kowalsky se retrouvent totalement seuls, livrés à eux-mêmes dans l'univers. Le silence assourdissant autour d'eux leur indique qu'ils ont perdu tout contact avec la Terre - et la moindre chance d'être sauvés. Peu à peu, ils cèdent à la panique, d'autant plus qu'à chaque respiration, ils consomment un peu plus les quelques réserves d'oxygène qu'il leur reste.
Mais c'est peut-être en s'enfonçant plus loin encore dans l'immensité terrifiante de l'espace qu'ils trouveront le moyen de rentrer sur Terre...
Gravity... ou plutôt: Attraction.
Attraction car le film commence sans introduction, soit on est attiré et on l'attrape, soit on reste sur le côté, soit on observe avec un certain relativisme. Mon regard s'est très vite porté selon cette dernière position, et jamais je n'ai été "pris" par le film comme il aurait voulu surement que je sois.
Attraction ensuite car Gravity est plus qu'un film. C'est un film qui crée (ou fait renaître) un genre : le film attraction. Je m'explique, en enfourchant nos lunettes 3D à deux euros, c'est comme si on mettait un casque sur la tête et que le monde tel qu'on le connait n'existait plus autour de nous. Niveau imprégnation du contexte, il n'y a pas mieux. On attache ensuite notre ceinture et on entre dans la capsule. Et là on est enfin prêts à vivre une expérience unique. Oui, unique car une fois sortis de la salle, une fois le casque enlevé, la ceinture détachée, une fois revenus sur Terre, Gravity perd en oxygène, en tension, retombe comme un soufflet. Alors on a un peu la tête lourde, comme sortis de Space Moutain parce qu'à la fois c'est impressionnant et ça fait mal à la tête, et puis l'adrénaline retombe et on fait quoi ? On passe à une autre attraction ? Ah non, c'est tout, c'était ça ? Ah c'était un film ? Hmm. Autant dire tout de suite qu'hormi les riches et les fous, personne se paiera un écran télé 3D géant pour revoir Gravity dans son canap'.
"What's the point ?" Dirons certains. "Et alors ?" Dirons d'autres. Et bien si on considère qu'un film ne vit pas qu'entre quatre murs d'une salle obscure mais ne fait qu'y naître, pour ensuite grandir dans la tête de chacun, et s'apprécier au fil du temps, des dégustations, comme un bon vin, alors Gravity est un mauvais film. Mais ce n'est pas non plus le cas, parce qu'on ne peut pas occulter l'expérience. Difficile équilibre à trouver entre les réactions dithyrambiques à chaud et le scepticisme à froid.
Replaçons nous alors dans notre siège et analysons-le, ce Gravity. Parce que même étant plus une attraction jeux-vidéoesque que long métrage filmé, dans l'écran il y a des acteurs qui campent des rôles et une histoire qui se déroule. Et là aussi le bas blesse puisque d'acteurs il y a bien mais de personnages il n'y a que trop peu. Comment fait-on pour voir autre chose que Sandra Bullock et George Clooney dans l'espace quand la mécanique du récit ne laisse pas le temps pour la moindre empathie. Le film marche par séquences saccadées, prenantes ou non, mais qui coupent à chaque fois la possibilité d'installer un quelconque personnage. "Et alors ?" Répéterons les mêmes ? Oui mais non quand au tiers du film tu veux que le spectateur s'accroche au destin de cette Ryan Stone. Tu peux pas imposer une mécanique en sacrifiant ta volonté de faire des persos puis penser qu'on va s'y accrocher quand même. Je dis pas que c'est impossible mais c'est maladroit et un peu nous prendre pour des jambons. Parce que ce Dr Stone, son histoire est au mieux légère, au pire bidon. C'est à mon sens le gros point noir du film, plus que son côté éphémère, presque effervescent, qui d'un certain point de vue peut être perçu comme totalement contemporain.
Reste un point fort, le réalisateur, quand même. Qui parvient avec toute son équipe à construire un objet totalement cohérent, crédible. Et il reste derrière la caméra, malgré les fonds verts et la 3D, preuve en est ce dernier plan dantesque (qui conclue l'idée que le personnage se détache complètement de sa vie antérieure et renaît entièrement en lâchant prise, et donc ré-apprends à vivre, survivre puis à se lever, marcher tel l'être nouveau qui ouvre les yeux au monde) en contre plongée et où Sandra Bullock prend tout l'espace, parait gigantesque. Un plan marquant, lourd de sens et qui conclue son sujet en beauté.
La musique de Steven Price accompagne parfaitement l'action, découpe très bien les séquences et participe au sentiment d'immersion (si immersion il y a).
En bref un bon film, cohérent et puissant, mais trop léger sur bien des points pour crier au chef d'oeuvre.
7/10