La poursuite impitoyable - Arthur Penn ( 1966 )
Et bien j'ai pris une jolie claque devant cette poursuite impitoyable, au titre un poil mensonger, puisque de chasse ( ou poursuite ) il n'en est pas vraiment question ici, le film s'attardant plutôt à dresser le portrait peu reluisant d'une petite ville sud américaine ( ou les dessous bien crasseux de l'"Américan way of life" ) en étalant son intrigue sur les 24 heures succédant à l'évasion d'un prisonnier, lequel sera donc recherché par plusieurs membres de la ville pour différentes raisons.
Vraiment à la lisière des deux périodes bien distinctes du cinoche ricain, le film a encore les pieds dans le classicisme du vieil hollywood ( réal carrée, avec un très beau scope à l'ancienne, excellente musique de John Barry au style très western à papa ) tout en annonçant, aussi bien sur le plan visuel que dans son discours, les excès de violence et la radicalité d'un
Bonnie and Clyde ( et donc la date du changement pour le genre ), sortie l'année précédente et toujours réalisé par Arthur Penn. L''impressionnante scène de lynchage du shérif par 3 hommes de la ville, se déroulant devant un publique passif, poussait déjà le bouchon très loin pour l'époque.
En terme de casting, le film est un sans faute. Marlon Brandon est imposant de charisme en shérif. Celui-ci représente intégrité, lucidité, et la dernière notion de justice dans une ville rongée jusqu'à l'os par sa petite bourgeoisie corrompue, aux valeurs conservatrices, avide d'argent et de pouvoir. Robert Redford, finalement assez peu présent à l'écran, joue donc l'évadé qui n'est pas un mauvais gars dans le fond, juste un mec tombé au mauvais endroit au mauvais moment. Jane Fonda, qui joue la femme de ce dernier, irradie l'écran de sa beauté, sa relation incestueuse avec James Fox vient apporter encore un peu plus de tension à l'ensemble, celui-ci jouant un ami d'enfance du personnage de Robert Redford. Viennent s'ajouter à tout ce beau monde les prestations de Robert Duvall, pas le perso le plus pourri de la ville mais quelqu'un d'assez lâche, et donc influençable, qui se rangera du coté du plus grand nombre, et E. G. Marshall, riche propriétaire et imposante figure paternelle du personnage de James Fox.
Une chose m'a surpris dans le film c'est la façon dont sont parfois filmés les gens de la ville, la froideur qui se dégage des scènes collectives, les rendant presque déshumanisés à tel point que j'ai parfois eu l'impression de voir des Body Snatchers échappés d'une vieilles bandes de SF parano. C'est franchement surprenant.
Comme on pouvait s'en douter, le film ne se clos pas franchement sur du happy end. Son final, totalement fiévreux, impressionne par sa noirceur désespérée, la ville bouillonnante finissant naturellement par exploser lors d'un monstrueux climax à l'ambiance nocturne apocalyptique ( faisant basculer le film à la limite du fantastique ) dont aucun des personnages ne sortira indemne.
Une petite bombe, donc, et en ce qui me concerne la plus grande réussite de son réal.
9/10
Et merci à Oso pour les caps.