Lincoln de Steven Spielberg (2012)
Abraham Lincoln fait partie des grandes figures politiques les plus mises en scène au cinéma.
Steven Spielberg souhaitait que son Abraham Lincoln soit uniquement joué par l’acteur Daniel Day-Lewis ( qui avait peut de "ne pas être à la hauteur") déjà deux fois oscarisé pour ses rôles dans « My left Foot » (1989) et "There Will Be Blood" (2007) dont la ressemblance avec l’ancien président des Etats-Unis n’a pas échappé aux spectateurs.
Contrairement à Steven Spielberg d’autres réalisateurs comme D. W. Griffith avec son Abraham Lincoln (1930) ont décidé de retracer entièrement la vie d’Abraham Lincoln.
Ce biopic se concentre sur les débats parlementaires concernant la mise en place du treizième amendement mettant ainsi fin à des siècles d’esclavage en 1865. Un épisode de la vie du président qui nous rappelle des évènements plus récents rappelant le combat de Barack Obama pour l’assurance maladie. L’actuel président des Etats-Unis éprouve beaucoup d’admiration pour Abraham Lincoln et n’hésite pas en de nombreuses occasions à lui rendre hommage.
Le cinéaste décide de centrer son film autour de l’un des combats politiques les plus importants de l’histoire des Etats-Unis. Les rouages de la constitution américaine nous sont montrés de manière formidable à travers de nombreux débats et discussions constituant le noyau de ce long-métrage. Le choix de Spielberg est d'autant plus surprenant car les épisodes généralement les plus adaptés de la vie du célèbre président sont ceux concernant sa vie en tant qu’avocat, la guerre de sécession ou l’attentat dont il a été victime.
L’utilisation de photos d’archives au tout début du film présente la dimension biographique et fidèle que le réalisateur souhaite donner à son film. Le film débute par le chaos de la Guerre de Sécession. Le personnage principal n’apparait que plus tard, de dos et courbé. Spielberg insiste sur l’humanité de Lincoln qui est aussi un homme, un mari et un père.
Malgré le fait que le film débute en extérieur la grande majorité des actions se déroule en intérieur là où les discussions ont lieu et où les décisions les plus importantes doivent être prises. Les combats les plus importants ici ne sont pas ceux des soldats mais des décisionnaires.
La personnalité de Lincoln est mise en avant. Il est un homme érudit, un bon orateur et un conteur ayant beaucoup d’humour.
Physiquement, on ne reconnait pas immédiatement le célèbre personnage avec son chapeau haut de forme. Lincoln dont on sait qu’il était très grand de taille avec un noble port de tête est montré comme un homme amaigri, souvent entouré d’un châle, courbé par le poids des années, ainsi que par ses deux mandats, devant aussi faire face à des moments difficiles liés à sa vie de famille.
Sa vie intime nous est présentée de manière presque voyeuriste. Dans une Maison Blanche peu éclairée, l’on voit un homme aimant sa femme, cette dernière n’étant plus que l’ombre d’elle-même depuis la perte de l’un de leur fils.
Par ailleurs, cette dualité entre le Lincoln président et l’homme soucieux du bien-être de sa famille affirme la volonté de la part du cinéaste de montrer qu’un symbole peut comporter des fissures.
Le discours est mis en avant. La façon dont le président arrive à convaincre les foules, à rallier ses opposants à ses idées correspond à ce que l’on sait des témoignages datant de cette époque.
Les scènes dans la chambre des représentants sont celles où le personnage principal y est absent. Malgré cette absence, Lincoln ne cesse d’être présent grâce aux hommes qui le soutiennent ou le contredisent, personnages de poids dans le scénario de Tony Kushner.
Le chapitre de l’assassinat d’Abraham Lincoln n’est pas visible (ce qui est très bien). On apprend sa mort lors de la scène finale d’un opéra. Le spectateur découvre ensuite le seizième président des Etats-Unis étendu sur son lit de manière christique, les bras en croix, homme habillé d’une simple robe de chambre. Cette dimension déifiée que l’on retrouve aussi dans le film de Griffith est présente via divers événement dans le film notamment lorsque Lincoln décide de gracier, d’accorder son pardon à un jeune soldat.
Steven Spielberg qui avait le projet de faire son propre biopic sur Abraham Lincoln depuis plusieurs années avait entamé énormément de recherches sur cette période. La vérité historique prédomine sur la fiction même si des scènes peuvent paraitre invraisemblable comme lorsque l’on voit le président plaisanter alors qu’il attend d’avoir des nouvelles concernant une bataille sanglante. Même si le spectateur peut être dérouté par la vision de ce Lincoln, le cinéaste tient à ce que l’on sache que le moindre petit détail scénaristique provient de la réalité.
Le réalisateur se détache des codes du cinéma hollywoodien en proposant une vision intimiste de ce grand homme, sans excès reflétant le choix simpliste du titre utilisant uniquement son nom de famille: Lincoln.
Un excellent biopic porté par un duo remarquable: le réalisateur et l'acteur principal.
Note: 10/10