Un bon petit film que voilà, ce n'est pas dénué de défauts, bien au contraire, mais ce
Dillinger a quand même le mérite de proposer un point de vue intéressant sur son sujet même si, forcément, la comparaison avec le
Public Enemies de Michael Mann est inévitable. Il est d'ailleurs intéressant de noter que les deux métrages ont le point commun d'avoir un titre qui aurait été mieux porté par l'autre. Ainsi, le film de John Milius évoque Dillinger d'un point de vue global en traitant chacun des membres de son gang comme un égal, pendant que le film de Mann les relègue au second plan pour traiter davantage le personnage de Dillinger et sa romance. Le gros point fort du film de Milius, à mi-chemin entre film de commande (pour surfer sur le succès de Bonnie & Clyde) et œuvre personnelle, c'est évidemment son refus total de rendre ses personnages charismatiques ou attachants. Bien sur, on trouvera certaines actes de Dillinger ou Purvis culottés, mais ils restent des hommes détestables à leur manière, Dillinger traitant sa fiancée comme une moins que rien pendant que l'agent du FBI est prêt à n'importe quoi pour la capture du gangster, quitte à mettre en péril des innocents. Là où le film possède des défauts, c'est dans sa narration et son sens du rythme. Car oui,
Dillinger est un film très froid, presque documentaire dans sa façon de raconter les événements, et forcément l'attention du spectateur en pâtit puisqu'il ne peut même pas s'attacher aux personnages. On suit donc les dates importantes du gang avec comme seule idée de durée la date inscrite avant chaque scène (ou une voix-off tout ce qu'il y a de plus monocorde), et autant cela fonctionne dans la dernière moitié (tout ce qui se déroule après l'évasion de Dillinger est captivant), autant la première en devient vraiment pénible à suivre, étant constitué de beaucoup moins de morceaux de bravoure.
Niveau mise en scène, c'est vraiment très correct pour un premier film, avec notamment des partis-pris assez audacieux comme la fusillade hors-champ avec Purvis ou le premier plan du métrage qui instaure un point de vue inédit : le braquage en vue subjective via le guichet (excellente réplique de Dillinger à chacun de ces passages), et on a même quelques séquences bien marquantes comme la fuite du gang et notamment du personnage de Harry Dean Stanton. Pour le reste, on notera quand même la forte présence du style Coppola (inspiration ou aide sur le tournage, qu'importe), que ce soit dans les plans larges sur les prairies américaines ou encore ce lent dézoom sur la femme qui trahira Dillinger, et qui révèle peu à peu Purvis comme interlocuteur, un passage qui rappelle forcément le premier plan de
The Godfather, sorti un an plus tôt. Pour le reste, le casting est très sympa, Warren Oates fait un bon Dillinger dans la vision de Milius du personnage, mais force est de constater que Ben Johnson ou Harry Dean Stanton s'en sortent beaucoup mieux en s'appropriant les meilleures scènes du film. Clairement pas un film indispensable donc, mais une jolie curiosité très intéressante quand elle est mise en parallèle avec le film de Mann (que je préfère).