par Nighthaunter » Dim 30 Juin 2013, 14:54
Au passage, critique du Tome 1 :
C'est indéniable, Urban Comics (branche de Dargaud pour ceux qui n'aurait pas suivi) nous gâte. Non content d'éditer le Relaunch de DC avec The New 52, et de rééditer dans de magnifiques éditions des incontournables tels que Watchmen ou The Kingdom Come, la maison d'édition de DC et Vertigo en France nous gratifie d'une ressortie de la série déjà culte Scalped avec des couvertures exclusives. Regroupant les 5 premiers numéros de la saga vertigo façonnée par l'américain Jason Aaron (qui avait surtout officié chez Marvel sur Wolverine, les X-Men ou The Punisher) et mis en images par le serbe R.M. Guéra (peu connu jusqu'alors), Scalped transporte le lecteur au cœur du territoire indien pour un thriller hard-boiled ultra-efficace et intelligent.
Dans la réserve Sioux de Prairie Rose, Lincoln Red Crow est bien décidé à ouvrir coûte que coûte son luxueux casino financé par l'argent de ses divers trafics. Alors que les autochtones croulent sous l'alcoolisme et le chômage, la criminalité gagne du terrain malgré l'entêtement de Gina Bad Horse et de ses sympathisants. C'est seulement lorsqu'un enfant du pays perdu depuis bien longtemps retourne à Prairie Rose que la situation menace vraiment d'exploser. Reste à savoir ce que Dashiell Bad Horse va choisir de faire et le camp qu'il va rejoindre'
Le comic book démarre abruptement et nous plonge immédiatement dans l'intrigue qui reste, au début, assez confuse, alternant entre flash-backs divers et imbroglio de retrouvailles entre Dashiell et les habitants de la Réserve. D'emblée, on sent toute la noirceur et l'apprêté du récit encore renforcé par le trait dur et rugueux de Guéra. Si le premier chapitre s'achève sur un cliffhanger délicieux, le reste s'avère à l'avenant et petit à petit, Aaron révèle le passé à la fois des Bad Horse mais aussi de la réserve et de sa place vis-à-vis des fédéraux. Composant un tableau vitriolique de ce qu'il reste de la société indienne aux Etats-Unis, Aaron mène tambour battant le lecteur au plus profond des blessures de Dashiell. Personnage délicieux et torturé, il fait vite montre d'un charisme et d'une profondeur comme seules les œuvres estampillées Vertigo savent en fabriquer.
Mais Aaron ne néglige pas ses personnages secondaires, de l'impitoyable et ambiguë Red Crow à son autodestructrice de fille en passant par la relation complexe entretenue entre Gina et Dashiell (relation particulièrement réussie et poignante), tout concorde pour enrichir l'univers et pour ferrer le lecteur.
Aaron nous parle d'ailleurs bien plus que d'une intrigue policière. Il en profite pour dresser une image moderne des Sioux, peu reluisante du fait de leur sort dans la nation américaine, mais aussi et surtout pour décortiquer le poids de la culpabilité à l'échelle de l'homme (Gina, Red Crow et Dashiell en sont tous pétris) ainsi qu'à celle d'un peuple. Malin et roublard, Aaron se garde pourtant bien des cartouches en réserve pour fusiller le lecteur dans une éblouissante conclusion qui nous laisse avide de la suite d'ores et déjà disponible chez Urban Comics.
Avec Scalped, le thriller noir fait son retour sur le devant de la scène du comics. Affûté et intelligent, sombre et palpitant, ce premier tome permet à Aaron et Guéra de jouer dans la cour des grands.