⌲ WORLD WAR Zde Marc Forster avec Brad Pitt, Mireille Enos, Elyes Gabel.
Adapté d'un livre de Max Brooks (fils de Mel), World War Z est d'abord un projet de longue date. Au départ fixé sur une adaptation en jeu vidéo, le scénario se tourne très vite du côté du cinéma mais passe de main en main, si bien que les noms annoncés des scénaristes sur le film se succèdent, de Matthew Michael Carnahan à Drew Goddard en passant par Damon Lindelof, bref il crée un sacré bordel avant d'être porté par le réalisateur Marc Forster (Neverland, Harold Crick, Quantum of Solace) et le producteur/acteur Brad Pitt. Finalement toute cette clique s'unit pour compresser un livre de 428 pages en un long métrage de moins de deux heures. Vu la densité du projet et son ambition, cette idée tient d'abord du miracle, et les scénaristes vont en jouer, user de cette faiblesse pour -pensaient-ils- accentuer sa force.
Le film débute par des images d'archives, des micro interventions qui anticipent un événement dramatique à venir, comme pour nous titiller, nous dire "tenez, regardez, demain vous aussi, vous pouvez voir ça à la télé" car l'un des messages du film est que cela peut arriver à tout le monde, et surtout que l'homme ne doit pas penser que rien ne peux lui arriver. Etre prêt à tout, et anticiper, agir dès aujourd'hui. Mais ce message, de nature très écologique (et un peu bêta), n'est pas affiché frontalement, mais par petites touches, jusqu'à la toute fin, mais ça on en reparlera. L'histoire elle, commence tout de suite. Aucun préambule, très peu de présentation sur cette famille qui est au centre du récit mais que l'on ne connait que très peu, en fin de compte. L'action commence instantanément, comme pour imager ce virus qui se propage par la morsure et qui prend effet au bout d'une dizaine de secondes. Forster montre ses faiblesses d'entrée, c'est à dire son inefficacité à filmer l'action de près, sur le terrain (que l'on avait déjà pu apprécier dans sa version catastrophique de James Bond) avec la caméra à l'épaule, près des corps. La bouillie visuelle dure environ un quart d'heure et le film mute, abandonne ce qui est l'essence même du film catastrophe (la famille unie) et du film de zombies (le groupe) pour garder uniquement un personnage, celui de Gerry, joué par Brad "Chanel n°5" Pitt.
C'est une des idées fortes de World War Z, de transformer un film de zombies lambda en un périple de son héros, avec le sauveur de l'humanité érigé en agent secret voyageant autour du monde, comme pour rendre la défense de la cause humanitaire cool et dangereuse. Pas étonnant que le film soit à la base une idée de jeu vidéo et qu'une future adaptation soit toujours dans les tuyaux tellement le héros zone de pays en pays en confrontant des tâches de plus en plus ardues, dans des contextes de plus en plus difficiles. On passe de la rue à un appartement, puis les alentours d'un avion en pleine nuit pour enchaîner dans un autre avion au sein des passagers pour finir dans un hôpital où il ne faut pas faire un bruit. Des missions remplies haut la main par Brad Pitt qui tient le film sur ses épaules, toujours aussi charismatique. Toute l'empathie liée au sort du monde repose sur lui et cela tient 1h50, sans problèmes. Une autre bonne idée est de mettre justement l'enjeu du suspense sur le silence, sur le fait que les zombies sont attirés par le bruit, ce qui donne lieu à des scènes de cinéma assez dingues, sans parler des effets spéciaux magiques, notamment durant la scène de l'avion qu'il faut aller voir au cinéma -sinon t'as gâché ton blé.
Après, le défaut du réalisateur reste là sans se prononcer, tout le long, car tout cela reste posé, classique, loin d'être innovant. Forster ne propose pas grand chose d'autre que les codes du film de zombies, dans le sens où il ne sort pas de l'ordinaire et sa vision reste assez classique. Les enjeux sont moindres et la qualité du film qui est de reposer sur un seul personnage est aussi et surtout un défaut car c'est fin, et loin d'être approfondi. On reste alors sur une fin ouverte et démagogique qui ruine un petit peu tous nos efforts d'empathie et de compassion envers ce monde qui en fait, ne fait que se regarder le nombril et devrait passer plus de temps à essayer de se soigner. Merci pour ça, Angelina, Brad l'a bien fait passer en voix off et pose bien sur la photo de famille pour comprendre que l'union fait la force et que l’individualisme c'est mal. C'était pas obligé, en fait, puisque tout le film ne cesse de répéter implicitement le même message.
World War Z n'en reste pas moins un outil divertissant, très bien foutu et assez impressionnant par moment, à aller voir en salles et pas tout seul dans le noir. Même pas peur des zombies, dirons les spécialistes du genre, et trop beau gosse ce Brad, dirons les ménagères de moins de 50 ans. Classique mais efficace, donc.
6.5/10