9.5/10
Mud de Jeff Nichols - 2012
"She is like a dream you don't want to wake up from"
Un idéal de cinéma, sorte de mélange entre un
Monde Parfait,
L'autre Rive et Tom Sawyer ( bein oui quand même ), un film d'un classicisme revigorant, à l'heure où ça joue au petit malin, au cynique, à la suite du remake du prequel et où le post modernisme gangrène un cinéma en perdition, çà fait plaisir de voir ce genre de film qui raconte une histoire simple ( mais pas simpliste ) mettant en avant une belle galerie de personnages. Et Mud reste indubitablement un des meilleurs films des 10's, un des seuls classiques de cette décennie un peu pauvre.
L'histoire est donc simple : un fugitif, une ile et 2 gamins, on peut pas parler de script remplit de surprise, on peut deviner où ça va nous emmener mais c'est tellement bien raconté que c'est jamais un souci et puis le film est très riche thématiquement. Ca réussit à brasser pleins de trucs plutôt bien écris : l'initiation, la "découverte" d'une figure paternel, la découverte du première amour ( qui permet de mettre un sous texte à base de les femmes c'est quand même toutes des putes), le coté mystique de cette partie des States avec un Mud qui parait presque irréel, apparaissant et disparaissant à sa guise ( tous les symboles sont vraiment biens et puis ce putain de Mississippi, alors filmer ce fleuve c'est pas spécialement difficile tant il est cinématographique mais là Nichols le fait vraiment avec classe ).
Le fait que le point de vue du film soit entièrement celui du gamin fait qu'on évacue facilement le manichéisme de l'histoire ( très peu d'ambiguïté au final, on sait/devine rapidement qui est "gentil" ou méchant ) et qu'on est véritablement impliqué et ce sans que Nichols ait besoin d'avoir recours à des grosses ficelles ( narrative ou musical, et ça fait plaisir de voir que ça sort jamais les violons ), non on entre rapidement dans l'histoire et on va la vivre intensément avec ce gamin ( ça faisait longtemps que je m'étais senti aussi impliqué devant un film ), certains trouveront le rythme lent alors que non c'est tellement dense ( y a pas mal de petites storyline autre que Mud ) que la lenteur ne se ressent jamais.
La réal de Nichols est ici tout en sobriété, ça ne révolutionne rien mais c'est beau (du couché de soleil en veux tu en voila), c'est cadré divinement ( sans que ça se regarde filmer à la "tavumonplancommeydéchiresagrandmère" ) avec des mouvements d'une douceur appréciable qui prennent le rythme de ce fleuve où on a l'impression que rien ne vit ( c'est jamais contemplatif barbant, ça prend son temps c'est tout, on est pas chez Malick quoi ) et puis sorti de nul part, paf un gros gunfight qui défouraille avec du shotgun et Sam Shepard avec un snipe et là autant dire que c'est jubilatoire ( et sacrément bien shooté pour le coup avec un découpage au poil : lisibilité exemplaire et séquence dynamique alors que finalement très statique, et on appelle ça le talent ). Et pour ne rien gâcher on a une photo merveilleuse (cette lumière !!) ). Et c'est toujours utile de rappeler que le film a fait Cannes et qu'il est reparti bredouille alors qu'a coté de ça Dolan et Godard gagnent des prix ...
Matthew McConaughey dans les 10's il est à son prime et on a enfin pris la mesure de son talent, c'est pas une révélation ni une confirmation, non le gars il est bon depuis son premier film c'est juste qu'il a fait un choix de carrière un peu bizarre au vu de ses capacités et là tout comme dans Killer Joe, Emprise ou bien encore LoneStar bein il bouffe tout simplement l'écran (c'est pas Interstellar quoi), enfin c'est comme pour Affleck c'est devenu hype du jour au lendemain alors que les vrais savent depuis toujours, Nichols le compare à Paul Newman et y a un peu de ça, une présence à l'écran qui fait qu'on est obligé de s'attarder sur lui dès qu'il est dans le champs. Les 2 gamins sont hallucinants de justesse, bluffante leurs prestations, quel plaisir de revoir Joe Don Baker ( le tueur dans Charley Varrick ), du bon vieux redneck parfait pour ce genre de film. Grosse galerie de second rôle aussi avec Shannon ( trop peu présent ) et Sam Shepard ( putain de présence, on doit le voir 5 fois à tout péter mais on est pas près de l'oublier) et un gars de Boardwalk Empire. Et puis je suis content ce film m'aura permit de voir Reese Witherspoon bien jouer ( parfaite en biatch paumé ) et ça c'est vraiment rare (la guele de sa filmo quand même). Merde alors un film ricain sans black, gay ou transe, j'ai presque plus l'habitude.
La BO comme dans tout bon film sudiste qui se respecte et à base de bonnes vieilles guitares et c'est toujours un plaisir à entendre.
A l'époque de la sortie on parlait surtout de Winter's Bone et son Amérique white trash et de la découverte Jennifer Lawrence alors que c'était du film bien chiant et quelconque, bein ce Mud qui prend lui aussi donc cette middle classe ricaine est d'autrement mieux foutu. Un bien beau film qui laissait alors es espoirs quant à l'avenir du cinéma ricain (bien mal barré) et juste le digne héritier du chef d'oeuvre de Clint. Un putain de grand film.
Malhreuseusement, et ça fait chier de terminer sur une note négative mais Nichols n'a pas confirmé après son excellent début de carrière, ses 3 premiers films forment quand même un sacré truc et après entre Midnight Special vraiment tout pourri et un Loving super chiant il est un peu tombé dans l'oubli, j'espère que son Bikeriders relèvera le niveau (le trailer donne pas trop envie, y a un chouette casting mais ça a l'air très convenu).