Du Plomb dans la Tête - Walter Hill - 2013
Assurément un film qui divisera les générations de spectateurs. Walter Hill emmerde les modes et tendances du cinéma d'action contemporain et s'entête à réaliser un film gaulé à l'ancienne, qui a les deux pieds dans les 80's. Troussé comme un actioner de l'époque et pratiquement dépourvu de tout effet de style tape à l'oeil, Du Plomb dans la Tête ravira les vieux briscards bercés par les exploits des anciennes gloires du genre dont Sly fut un des tauliers. Dès l'introduction, qui voit ce dernier et son co-équipier tueur à gages investir une chambre d'hôtel pour effectuer un contrat, on sait qu'on va voyager 25 ans en arrière. Pas sexy pour un sou, cette scène expéditive et son anti-héros badass posent les balises des 90 minutes à venir. Le générique confirme la donne avec ses gros riffs de guitare d'un autre temps et ses touches d'harmonica. Les bleus-bites élevés aux ersatz façon MTV sont priés de laisser les bonhommes de 30/40ans s'injecter leur dose de plaisir coupable en paix.
Tu vois, ça c'est le sécateur avec lequel on a coupé les couilles de mon pote Bruce Willis avant qu'il accepte de jouer dans l'immonde Die Hard 5 qui renie tout ce qu'on a entrepris de construire dans les années 80
L'histoire est purement fonctionnelle (mais vraiment). Sly fait équipe avec un jeune flic d'origine coréenne de Washington pour remonter un réseau de pourritures (avocats, flics et autres para-militaires bodybuildés) qui ont buté feu son partenaire. On craint un instant que l'aspect buddy movie un peu con ne prenne le dessus sur le ton de cette entame réjouissante, il n'en est rien. Les deux associés de fortune aux méthodes diamétralement opposées se tirent la bourre en permanence. Le sidekick de service incarné par Sung Kang n'est pas là pour lancer de la vanne débile mais juste pour permettre au film d'avoir une petite connotation contemporaine (on l'a vu dans la franchise Fast & Furious). Il n'y aura pas d'autre concession.
Hill nous fait plaisir et balance régulièrement des scènes d'action aussi sèches qu'expéditives. Au combat, et afin de ne pas trop trahir la différence d'âge entre papy Stallone et ses opposants, il y va d'un montage un peu cut, qui ne vire toutefois jamais dans l'excès au point de devenir illisible. Ça tabasse violemment, ça se headshote entre amis sans oublier quelques auto-citations (l'aspect nocturne et buddy movie de 48 heures, le hammam rappellant Double Détente, que des trucs qui parleront aux trentenaires et plus quoi...). Sly n'oublie pas de balancer de la bonne punchline tel le métronome du verbe qu'il est . Et à 66 piges, il pète le feu, c'est indéniable.
Shotgun check! Un plan façon "spéciale Stallone" check! Axe to axe check! Merci Walter!
Dans les seconds rôles, on retrouve des têtes connues comme le has been ultime Christian Slater. Le rôle est un peu nase mais les évènements autour du personnage et notamment la scène d'interrogatoire font partie des meilleures scènes du film. On retoruve également Adewale "Adebisi" Akinnuoye-Agbaje (la série Oz) dans un rôle un peu ingrat et pas très bien écrit. Mais l'autre atout du film côté casting, c'est le colosse Jason Momoa (Game of Thrones). On peut penser que son personnage est simpliste mais finalement, en creusant un peu, celui-ci en dit long sur les intentions de Hill et sur son point de vue de la production ciné actuelle. En gros, ce bourrin (le vrai bad guy du film) se fout complètement des motivations pécuniaires des deux gus cités plus haut. Lui, il est là pour la castagne et pour faire respecter la parole des autres. En gros, faites pas chier avec vos histoires à dormir debout! On est là pour se mettre sur la gueule! Putain de philosophie!
Il y a bien une légère baisse de régime à mi-parcours (la scène Eyes Wide Shut style qui traîne un peu en longueur), des évènements prévisibles (avec la fifille de Stallone) et une fin un peu convenue (ça, c'est le côté happy end du buddy movie) mais rien qui n'empêche aux amateurs qui ont grandi avec ce genre de film de bouder leur plaisir. On est pas en train de parler d'un film qui va concourir pour les Oscars 2014 mais juste d'un gros défouloir qui tâche (ça saigne généreusement), réalisé de façon old school (on la sort souvent cette expression mais c'est encore plus le cas ici) et dont le seul baromètre qualitatif est le sourire qui s'affiche sur le visage de ses spectateurs avertis (une poignée d'irréductibles). Le premier qui nous sort que Die Hard 5 est mieux, on lui pète les guibolles, on lui arrache les roustons et on le jette aux cochons!
7.5/10