DU PLOMB DANS LA TÊTE - Walter Hill (2013)
Dix longues années après son dernier film sorti en salles, le sympathique mais mineur Undisputed, Walter Hill fait son come back sur grand écran avec un projet attendu au tournant pour plusieurs raisons.
A l'origine, Du Plomb dans la tête est une bande dessinée franco-néozélandaise créée en 2004 par Alexis Nolent et Colin Wilson. Après l'avoir adoré, Stallone achète les droits et veut incarner le rôle principal à l'écran, celui d'un tueur à gages aussi cool que sans pitié nommé Jimmy Bobo. Tout d'abord confié à Wayne Kramer qui quittera le projet après des divergences artistiques avec Sly, ce dernier propose alors le script à Walter Hill, qui lui semble être le bon choix pour donner la tonalité à la fois décomplexée et hard boiled qu'il recherche. De plus, Thomas Jane, initialement prévu pour jouer le flic qui va se retrouver à faire équipe avec Stallone, est renvoyé du tournage par Joel Silver, qui préfère choisir un acteur asiatique (le sympathique Sung Kang) pour élargir l'audience du film.
Tous ces éléments n'auguraient pas forcément du meilleur, et pourtant le résultat dépasse de loin toutes mes attentes, m'attendant à voir une série b fun mais certainement trop calibrée pour capter un public de masse. Et dés les premières minutes du film, toutes mes craintes se sont envolées, pour laisser place à une heure trente de bonheur à l'état brut. Car bien loin du film hommage ultra référentiel à la Expendables 2 ou de la parodie d'action type The Last Stand, Du Plomb dans la tête est un vrai polar hard boiled à l'ancienne, qui transpire les années 80 par tous les pores, une époque où on pouvait bouffer de la série b efficace, violente, mais qui savait aussi manier l'humour sans tomber dans l’excès.
Avec cette histoire de tueur à gages qui se retrouve impliqué dans une sombre affaire de corruption, Walter Hill livre une péloche burnée comme on en voit quasiment plus, un concentré d'action et de violence qui se moque des standards actuels et qui s'adresse avant tout aux amoureux des shoots de testostérone sur pellicule.
Car oui, à 71 balais, papy Hill emballe des scènes d'actions musclés, shootés à l'ancienne, des gunfights qui tachent, et des mano à mano brutaux, et même quelques paires de boobs, le tout avec un certain punch et sans abuser d'effets de montage (bien que certains passages soient un peu trop cuts).
Un film très généreux, aussi bien dans l'action qui va à cent à l'heure, dans la violence sans concession, mais aussi dans les dialogues, qui paraitront poussifs pour certains, mais qui participent parfaitement au ton à la fois bon enfant et pourtant remplie de moments de tension qui finissent souvent dans un bain de sang. Hill réussit également à bien exploiter les décors de la Louisiane, aidé par une belle photo et un format 1.85 qui colle bien avec le coté rugueux du film. La B.O est également très réussie, à la fois rock & blues.
Devant la caméra, notre anti héros à la fois cool et badass, incarné par un Stallone en forme olympique, va se retrouver confronter à toute une bande de tueurs et à des politicards corrompus. Mais surtout, il va devoir faire face à sa Nemesis, un mercenaire colossal incarné par Jason Momoa, qui ne cesse de m'étonner et de gagner en charisme après le remake de Conan et son rôle dans Game of Thrones.
C'est bien simple, il livre une performance totalement jouissive en tueur sans pitié envers ses ennemis mais dont le code d'honneur n'est pas sans rappeler la philosophie du réalisateur lui même, bien moins intéressé par l'argent que par le coté authentique de son travail. Et je ne vous parle même pas de son axe to axe contre Stallone, qui rappelle le duel entre John Matrix et Bennett dans Commando, mais en carrément plus musclé et sérieux malgré la pluie de punchlines sentencieuses.
Dans le role du buddy cop, Sung Kang s'en sort relativement bien, et même si le coté comique qu'il apporte dans son duo avec Stallone n'est pas le gros point fort du film, ça ne plombe pas du tout l'ensemble et rappelle d'autres films de Hill, 48 Heures et Double Détente. D'ailleurs, on y retrouvait déjà les vannes sur les différences de cultures et même une scène de hammam, ici transcendée par une violence frontale qui fait plaisir.
On retrouve également Christian Slater, désormais abonné aux dtv, dans un rôle d'avocat véreux (et accessoirement organisateur de soirée "Eyes Wide Shut") qui a droit à une séquence mémorable, Adewale Akinnuoye-Agbaje (merci le copier coller) venu prendre son cachet dans le rôle du commanditaire, et la mimi Sarah Shahi dans le rôle de la fille de Stallone.D'ailleurs, leur relation est plutôt bien traitée, loin du cliché du bon papa qui protège sa fille.
Au final, Du Plomb dans la Tête s'avère très surprenant par sa capacité à rester fidèle à une certaine idée de la série b d'action pour adultes, aujourd'hui en perdition ou tournée en dérision, qui sait rester authentique et sincère dans une industrie qui traite dorénavant le genre avec cynisme et condescendance.
Et pour ça, je dis merci Walter !
8/10