L'engrenage fatal |
Réalisé par Anthony Mann
Avec John Ireland, Sheila Ryan, Jane Randolph
Policier, USA, 1h14 - 1947 |
6/10 |
Résumé : Une esthéticienne sexy doublée d'un bookmaker, Clara Calhoun, et son petit ami mafioso, Duke Martin, s'associent pour commettre le casse parfait. Mais l'affaire tourne mal.
Railroaded est un film noir inspiré d'un violent fait divers dont l'histoire été adaptée par un autre film la même année,
Call Northside 777 (de Henry Hathaway), mais ils sont très différents puisqu'ils ne s'occupent pas des mêmes faits. Sur le postulat du faux-coupable très cher à Hitchcock, ce qui intéresse A. Mann c'est moins l'enquête (d'ailleurs on connaît déjà le coupable d'entrée de jeu) et le principe de la justice rendue (un flic tué au cours du hold-up), que le personnage du bad-guy, interprété par John Ireland, qui joue très bien son rôle de psychopathe.
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Le script est assez simple mais solide, et on n'a pas trop le temps de s'ennuyer. A. Mann sait comment débuter ses films en nous lançant directement dans le hold-up, qui se termine, comme dans beaucoup de films du genre, dans une belle pétarade. Ensuite se déroule le plan B consistant à désigner un faux coupable. Deux camps, deux mesures : ceux qui croient durs comme fer qu'il est innocent, et les autres, qu'il est coupable. C'est un peu trop binaire à mon goût mais ça fonctionne assez bien au début avec la confrontation détective/innocent, et j'ai bien aimé cette philosophie des faits chez le détective qui l'empêche d'être bloqué dans ses accusations.
Le bad-guy est épaulé par une femme fatale, aussi froide que lui au début, mais prise de remords un peu trop rapide (et bien maso pour le coup de rester avec lui), et aussi par un boss qui donne l'aperçu d'une organisation plus vaste. Ce dernier point n'est pas trop développé, et on se concentre davantage sur l'enquête d'un côté, et de l'autre, plus intéressant, sur la détermination du bad-guy à se débarrasser des obstacles humains sans une once de pitié (en hors champ). Il a une présence inquiétante, parfois filmé en contre-champ ou au coin d'un endroit sombre, et tout est fait pour insister sur sa perversité (son gimmick de parfumer ses balles - qui lui coûtera très cher en passant -, ton de voix, voyeurisme au moment où sa copine et la soeur de l'accusé se mettent sur la gueule ...).
Pour les bémols, je pense surtout à l'interprétation monolithique de certains personnages (le détective en tête), la petite romance qui ne sert à rien, et une enquête qui avance parfois trop facilement (d'ailleurs elle n'a plus rien à voir avec le fait divers). Ainsi, le fait d'avoir tourné la même année qu'un réalisateur connu a permis à A. Mann de changer son script et de commencer à apporter ses idées, avec d'une part cette violence sèche et graphique qui anime les deux échanges de coup de feu (début et fin), et l'empoignade entre les deux jeunes femmes, et d'autre part cette impression de danger permanent en soulignant la présence malsaine du badguy. Peut-être pas un grand film (dans le genre du casse raté,
Armored Car Robbery sera un peu plus réussi), mais assez bien rythmé, assez carré et efficace pour le genre, et surtout servi par un bon méchant.
Un Mann mineur, basé sur une histoire classique de casse raté et de faux coupable, et animé par la détermination symétriquement opposée d'un flic et d'un tueur. Le seul véritable intérêt vient de ce dernier, bien bad-ass dans son genre.