Star Wars : Return Of The Jedi (Star Wars : Le Retour du Jedi) de RIchard Marquand
(1983)
Troisième épisode estampillé Star Wars et dernier film de la trilogie originale ainsi que dernier opus dans l'ordre narratif de la saga de George Lucas, Return Of The Jedi fait directement suite aux événements de The Empire Strikes Back et se veut l'apothéose cinématographique d'un space-opera qui aura changé le Septième Art à jamais. Pourtant, et encore aujourd'hui, il est étonnant de constater à quel point ce troisième film dévoilait déjà les prémices d'un producteur qui devenait bien plus un vendeur qu'un véritable conteur. Car Lucas, ayant rêvé tout sa vie d'un contrôle absolu de son art au point de planifier des revenus gargantuesques via les nombreux produits dérivés, commence dès les années 80 à imaginer un changement d'orientation pour sa saga spatiale et de créer un divertissement visible par tous. L'objectif est donc de viser un nouveau public, à savoir les enfants qui, de toute évidence, n'étaient pas concernés par la vision pessimiste de The Empire Strikes Back, et donc qui n'allaient pas être visés par les produits dérivés qui, finalement, deviennent la principale source financière de Lucasfilm.
En pleine pré-production, le scénario et le titre sont alors modifiés (le film devait s’appeler à l'origine Revenge Of The Jedi), notamment à cause du fait que le film soit produit de façon moins indépendante que les deux opus précédents, ce qui amènera le producteur Gary Kurtz, grand ami et fidèle conseiller de Lucas, à quitter l'entreprise, voyant que le marchandising prenait le pas sur la volonté de raconter une véritable suite. Alors que le script original, dont on sait finalement peu de choses, devait être du même acabit que The Empire Strikes Back (le personnage de Lando Calrissian devait mourir sur Tatooine, Han Solo se sacrifiait pour le reste du groupe à la fin du film, Leïa devenait reine et Luke finissait en exil sur Tatooine de la même façon que l'avait fait Obi-Wan par le passé), Lucas décide d'en faire un divertissement familial pur où aucun protagoniste ne trouve la mort et où l'originalité des situations n'est plus une priorité (on ressuscite notamment la fameuse Étoile Noire et ce troisième opus est certainement celui où l'humour est le plus présent). Et si ce changement brusque de tonalité a tendance à baisser la qualité générale du film, force est de constater que Return Of The Jedi, en tant que suite pure et simple, se tient plutôt bien et se regarde sans ennui. Des qualités qui peuvent paraître évidentes, mais que l'on ne retrouvera pas forcément dans la prélogie.
On est donc encore ici devant un divertissement efficace, misant à la fois sur l'attachement à l'univers et aux personnages, tout en continuant de perpétuer quelques excellentes idées des films précédents. Ainsi, Dark Vador est humanisé comme jamais dans cet épisode où le personnage de l'Empereur est fortement plus présent. La relation maître/serviteur est gérée de façon intelligente, à tel point qu'elle permet au climax final de posséder une très grande puissance émotionnelle. Pour le reste, on regrettera que les protagonistes n'évoluent pas forcément. Certes, Luke Skywalker devient un homme mature, capable de gérer ses émotions, de comprendre le bien de chaque situation, certes les nouveaux enjeux de sa relation avec Leïa sont des excellents ajouts, mais ce n'est finalement pas plus exploité que ça. Là où The Empire Strikes Back nous présentait des personnages qui arrivaient à douter d'eux même, on est ici devant une galerie de personnages beaucoup trop confiants, à l'exception d'une séquence intimiste magnifique entre Luke et Leïa qui débouchera sur un tournant décisif du duel final.
Cet épisode est aussi celui qui lancera définitivement la mode du montage alterné dans les grandes batailles de la saga, un montage dont on pouvait déjà voir les prémices dans l'opus précédent avec les groupe séparé en deux. Ici donc, lors du climax final, on suit à la fois les forces terrestres, spatiales et le duel opposant Luke au côté obscur de la Force, et même si l'on peut constater que certaines parties marchent moins bien que d'autres (la bataille sur Endor a tendance à être assez redondante) le tout fonctionne vraiment bien. Pourtant, Return Of The Jedi souffre clairement d'un manque de séquences aussi marquantes que dans les précédents, George Lucas a imposé beaucoup plus sa patte de producteur/scénariste et cela se voit fortement. Outre la rupture de ton telle que le film est bien moins mature que le premier film qui ne l'était pourtant pas forcément, des ajouts tels que les Ewoks (à l'origine l'action devait se dérouler sur Kashyyyk, planète natale des Wookies) ou la cour de Jabba empêchent véritablement le film de posséder une identité aussi forte que les épisodes précédents.
Heureusement, le film se tient plutôt bien en terme de mise en scène. Certes, le départ de Irvin Kershner se fait ressentir, mais Richard Marquant arrive à distiller quelques très bonnes séquences (la découverte du visage de Vador, la crémation de son corps sur Endor), mention spéciale à la dernière partie du duel entre Vador et Luke, sublimé par un travelling latéral d'apparence toute simple mais qui, à mes yeux, est l'un des plus beaux qu'il m'ait été donné de voir dans un film. Enfin, John Williams signe encore une fois une brillante composition. Là encore, la reprise des thèmes connues de la saga prime sur le reste, mais on a le droit à deux superbes thèmes, celui illustrant la flotte rebelle et le thème lugubre de l'Empereur qui monte en apothéose lors du travelling cité ci-dessus. Un film inégal donc, qui annonçait déjà un George Lucas changeant qui allait bouleverser son univers ainsi que toute sa politique artistique. Un très bon divertissement à l'arrivée, mais qui, déjà, créait des regrets éternels vis à vis des très nombreux fans qui attendaient une évolution logique de la saga.
NOTE : 8/10