Malveillance - Jaume Balaguero - 2011
La vague fantastique espagnole, elle ne me fait ni chaud ni froid. Même si ses films ne sont pas 100% ibériques, Guillermo Del Toro avait ouvert la brèche avec Cronos puis l’Échine du Diable avant de tuer le genre et d'assommer la concurrence avec son magnifique Labyrinthe de Pan. Dans son sillage, Jaume Balaguero a repris le flambeau avec plus ou moins de succès. Ses trois premiers films La secte sans nom, Darkness ou Fragile, à défaut d'être exceptionnels, auguraient pour lui d'un avenir prometteur. Las, l'hystérie collective autour de la saga Rec m'a laissé complètement de marbre, simple bouffonnerie, qui sonne comme la fin d'un cycle intéressant pour le cinéma de genre chez nos voisins.
Avec Malveillance, Balaguero met de côté son passé dans le fantastique pour signer un thriller psychologique/horrifique délicieusement malsain, d'une sobriété plus que bienvenue en comparaison du bruit et de la fureur qui règne dans Rec. On suit le quotidien de César, gardien d'immeuble en apparence sans histoires et serviable, mais qui passe ses nuits à s'introduire dans les appartements afin de s'immiscer dans la vie de leurs occupants. La pauvre Clara, une pimpante jeune femme et véritable objet de désir pour César, va en faire les frais...
Exit tous les artifices convenus du cinéma de genre, ici l'horreur sera cérébrale ou ne sera pas. C'est d'un oeil sournois que nous assistons au plan machiavélique de César à l'encontre de la jeune femme. Le film ne fait jamais dans la surenchère et prend tout son temps pour faire monter la tension et atteindre son point culminant dans les dernières minutes. On anticipe quelque peu cet épilogue mais le traitement d'une noirceur extrême dont il fait l'objet est suffisamment peu courant pour ravir les esprits malsains. La recette est donc parfaitement exécutée par Balaguero, alors que tant de films du genre s'essoufflent en cours de route.
Dans le rôle principal, Luis Tosar est impeccable. On ne sait presque rien de son passé ou de son trauma (en a t-il seulement un?) et c'est très bien comme ça. On voit simplement qu'il ne respire pas la joie de vivre, et que la seule solution qu'il a trouvé pour accéder au bonheur et de pourrir celui des autres. Une thérapie comme une autre qui prend la forme d'un jeu pervers mais jamais vulgaire, grâce à la grande sobriété des images de Balaguero. Sobriété qui ne veut pas dire non plus réalisation plan-plan, les incursions de Luis dans l'appartement de Maria réservent leur lot de plans flatteurs (on a vraiment l'impression d'être un sale petit rat caché lui aussi sous le lit). Seule les interactions avec les autres habitants de l'immeuble sont un peu plus conventionnelles. Au final, Malveillance est une belle réussite du genre, peut être le meilleur film de Balaguero, qu'on espère revoir dans ce registre moins frimeur et beaucoup plus stimulant que ses opus précédents.
7.5/10