Django Unchained, Quentin Tarantino, 2012
Voilà un projet de Tarantino qui me faisait envie depuis son annonce, grand amateur de western que je suis, et en particulier du
Django de Corbucci. Je ne suis pas un fan absolu de l’ami Quentin (seuls
Reservoir Dogs et
Pulp Fiction sont des chefs d’œuvres à mes yeux) mais j’aime bien l’ensemble de sa filmo, avec quelques réserves pour certains films (
Deathproof en particulier). Bref, voir Tarantino s’attaquer à un de mes genres fétiches avait de quoi susciter une grande attente de ma part, et heureusement le résultat est très enthousiasmant, à défaut d’être totalement convaincant.
Tarantino oblige, on n’est évidemment pas face à un western conventionnel, et comme à chaque fois que le réalisateur s’attaque à un genre codifié, il s’amuse à l’adapter à sa sauce en y imposant ses ingrédients habituels (dialogues savoureux, violence outrancière, playlist perso, personnages décalés), de sorte qu’un tel film ne s’évalue évidemment pas selon les critères traditionnels du western. Et de fait, puisque si la première partie fait encore illusion, en faisant la part belle aux décors sauvages et aux éléments classiques du genre, la seconde consiste en un huis-clos prétexte à de jubilatoires joutes verbales dont Tarantino a le secret.
Et personnellement, je l’ai trouvé plus à l’aise dans cette partie à Candyland, on sent que Tarantino est davantage dans son élément que lorsqu’il filme les pérégrinations de nos deux protagonistes, et s’il n’y avait l’excellent Christoph Waltz (qui livre une fois de plus, après
Inglourious Basterds, une prestation jubilatoire), pas sûre que cette première partie aurait tenu debout, tant l’acteur allemand porte alors le film sur ses épaules (Jamie Foxx est assez fade, chose qui ne s’améliorera hélas pas beaucoup à mesure que le film avance). Il y a bien le passage à la plantation avec Don Johnson, et la scène avec le KKK qui s’ensuit, pour venir dynamiter un peu cette première partie, mais globalement j’ai vraiment eu l’impression que le film ne commençait vraiment qu’avec l’apparition de DiCaprio, et tout le plan de sauvetage qui s’ensuit.
Dès lors, j’ai retrouvé le Tarantino que j’aime, le formidable dialoguiste capable de nous scotcher à une discussion fondamentalement banale, mais transcendée par le côté décalé et la performance des acteurs. Le fait que le film devienne alors plus cloisonné, presque théâtral, n’est dès lors pas du tout un défaut puisque ces scènes, toute statiques qu’elles sont, se révèlent nettement plus intenses et passionnantes que tout ce qui a précédé. Il faut dire aussi que, si dans la première moitié Waltz était un peu seul, il est ici assisté de deux acteurs d’exception, à savoir Leonardo DiCaprio et Samuel Lee Jackson. Le premier livre une composition de crapule vraiment époustouflante, prouvant par là-même qu’il est capable d’incarner des personnages détestables. Le second est carrément hilarant dans ce rôle de vieux serviteur Noir au look d’Uncle Ben, mais qui se révèle limite pire que son maître. Ces trois acteurs sont nettement au-dessus du reste du casting, à tel point que lorsqu’ils disparaissent du film, celui-ci perds d’un coup tout son intérêt.
En effet, la dernière partie (après la fusillade) est à mon sens complètement ratée. Primo, en termes de rythme, elle fait retomber lourdement le soufflé après un climax d’une intensité peu commune, ce qui est pour moi un défaut de construction menifeste. Ce n’est pas la première fois que je constate des problèmes de rythme dans le cinéma de Tarantino, à mon avis tous ses films à partir de
Jackie Brown en souffrent, à des degrés divers. Ici, c’est d’autant plus flagrant du fait de la longueur du film, j’ai vraiment subi cette dernière partie, me demandant quand ça allait se terminer. Surtout qu’à part le caméo de Tarantino et sa fin explosive, il n’y a pas grand-chose à retenir de cette dernière partie, si ce n’est de mettre en avant le manque de charisme de Jamie Foxx dans ce rôle (je n’ai rien contre l’acteur, je le trouve très bon dans d’autres films, mais ici je le trouve à côté de la plaque).
Au final, j’ai aimé ce
Django Unchained, mais sans pour autant adorer complètement, du fait de gros problèmes de rythme (surtout sur la fin) et d’une qualité d’écriture bien plus faible que dans les meilleurs films du réalisateur (quand on compare à
Pulp Fiction ou
Jackie Brown, il n’y a pas photo je pense). Ce qui fait que pour le moment, je le classerais comme l’un des films les plus faibles de Tarantino, loin devant
Deathproof tout de même, mais moins bien qu’IB (qui, en dépit de quelques faiblesses, était bien fendard tout de même, et plus solide en terme de dialogues).
7/10