Au service secret de sa majesté
de Peter Hunt (1969)
L'épisode de la rupture à bien des niveaux. Ce sixième opus voit pas mal de changements au programme, même si certains éléments sont bien sûr toujours de la partie (ça reste un Bond quand même).
Premier gros changement, c'est George Lazenby qui endosse le smoking de 007. Acteur qui n'a pas vraiment brillé ou fait carrière. Il n'est pas mal en Bond, mais pas aussi bon que Connery: un peu plus déménageur dans la carrure, moins classieux (et accsessoirement moins bon comédien).
Nouveau venu aussi à la réalisation (dans tous les sens, puisque c'est aussi son premier film), Peter Hunt, qui ne fera pas non plus grand chose de marquant par la suite. Sa mise en scène est par moments assez déroutante, avec quelques bagarres pas très bien montées, ou des effets de style étranges (le son en écho par exemple).
Comme bien souvent Bond se retrouve opposé au Spectre et à son ennemi Blofeld, mais cette fois les choses prennent une tournure étrange. Il retouve celui-ci en Suisse dans un repaire isolé en haute-montagne sur un glacier (Inception y faisait (in)directement référence), entouré d'un groupe de séduisantes jeunes filles, dans une fausse clinique. Comme il y a une vraie continuité chronologique entre les premiers films de la saga (malgré le changement d'acteur), il est étrange par exemple que Blofeld ne reconnaisse pas Bond (qui vient sous une fausse identité) alors qu'ils se sont croisés dans le film précédent. C'est uniquement une série d'erreurs que commettra Bond qui le trahira...
Au rayon des gros changements, un des plus importants bien sûr est que Bond tombe réellement amoureux (de la fille d'un chef mafieux Corse!) et l'épouse! Bon ça l'empêche pas de continuer à courir la demoiselle en allant de lit en lit à la clinique (on lui accordera que c'est avant son mariage qui se passe en fin de film). Changements encore avec une mission sans gadgets, un Bond par moments qui fait des erreurs, et même carrément une scène où il est poursuivi et semble réellement sur les nerfs et effrayé!
Et puis un final en totale rupture avec les films précédents, où il part à l'assaut du repaire de Blofeld sans l'aval du MI6 mais en mission personnelle avec l'aide de son beau-père mafieux! Sans oublier la fin tragique de l'épisode et la mort de sa toute nouvelle épouse... Ca fait beaucoup de changements en un seul film. Ca déroute ou ça plait, mais ça laisse à ce sixième film une place à part dans la saga.
Rayon action on a une poursuite à skis qui alterne le bon (sur les plans larges avec les doublures) et le moins bon sur les plans rapprochés où les trucages sont assez mauvais. Impressionnant quand même le passage où 007 se retrouve avec un seul ski. De même que la poursuite en bobsleigh à la fin assez réussie. On a même une scène de film catastrophe avec une avalanche.
Le film a un scénario assez dense et prend le temps (c'est le plus long jusqu'ici, avec 2h20 au compteur), et exploite des thèmes assez modernes pour l'époque, comme la guerre bactériologique avec la menace d'un virus. Et la manipulation des esprits par hypnose, très en vogue à cette période.
Dommage que cette menace ne soit pas plus pregnante, ça aurait donné plus de suspense et d'ampleur à la dernière partie du film.
On a aussi un peu d'humour, avec clins d'oeil aux films précédents (Bond qui fait ses cartons au bureau et ressort de vieux gadgets des tiroirs), ou auto-dérision lors de l'ouverture quand la fille se sauve et que Lazenby balance: "ça, ce n'est jamais arrivé à l'autre".
Une référence amusante (à postériori), le blason de la famille Bond: "Le monde ne suffit pas".
Un Bond étrange, un peu à part dans la saga, qui reste un opus assez séduisant malgré toutes ses imperfections.
7.5/10
007 n°1: James Bond contre Dr No (Terence Young) : 6/10
007 n°2: Bons baisers de Russie (Terence Young) : 7.5/10
007 n°3: Goldfinger (Guy Hamilton) : 8/10
007 n°4: Opération Tonnerre (Terence Young) : 6.5/10
007 n°5: On ne vit que deux fois (Lewis Gilbert) : 6.5/10