par Scalp » Mer 28 Nov 2012, 15:37
8/10
Heaven's Gate de Michael Cimino - 1980
"It's not like the Indians you know, you can't kill them all"
Y a finalement peu de films plus important que celui là car être à l'origine de la fin du Nouvel Hollywood et couler un studio, c'est pas rien. Les bourses illimité pour toute la génération de réal des 70's furent coupés, Cimino explosa le budget ( et quand on voit la démesure des décors et le nombre de figuranst on se dit que l'argent a quand même été bien employé, même si il a bouffé de la pellicule comme personne ) et le film fut un bide monstrueux ( du genre à faire Jupiter Ascending pour un succès ).
Cimino nous montre une histoire qu'on avait encore jamais vu, rare sont les westerns mettant en scène ces immigrants slaves et russes, et l'échec du film vient ptet de là.
Dans cette représentation de l'Ouest réaliste on pense pas mal à Deadwood, si de part ces grandes étendues on peut penser au western classique de Ford et Mann ( même si Mann avait une approche plutôt crépusculaire du genre ), l'approche ici est au réalisme pur et dur, pas de glorification, pas d'ouest pittoresque, les Etats Unis se sont construit dans le sang et la poussière et Cimino ne glorifie rien ( l'histoire s'inspire de faits réels ) ici la loi c'est la loi du plus fort et du plus riche, le film se rapproche un peu du chef d'oeuvre de Leone.
Bon après l'approche reste quand même vachement manichéenne, c'est pas aussi complexe que j'ai lu à droite à gauche, en gros c'est la sempiternelle gros méchant propriétaire terrien contre le petit peuple, la nuance ici c'est le perso de Walken qui l'apporte, il est introduit comme un tueur sans pitié mais son personnage va se révéler plus complexe que ça, par contre le gros méchant lui est bien caricatural ( c'est pas gênant ) et le coté politique est quand même super basique ( mais ça aussi c'est pas gênant, enfin faut se taper 10 premières minutes assez relou à mon gout ). Après j'ai quand même bien aimé cette lutte des classes où on ne peut pas s'extirper de sa classe sociale ( parfaitement illustré par le personnage de Kristofferson "Do you know what I really dislike about you, Jim? You're a rich man with a good name. You only pretend to be poor."
Drôle de narration un peu intemporel, ainsi après une longue présentation ( toute la séquence de l'arrivée en ville de Kristofferson qui s'étale sur une bonne trentaine de minutes ) le film fait une grande pause narrative en s'attardant sur son histoire d'amour ( et son triangle amoureux, triangle amoureux indécis qui fonctionne bien car jamais lourd, y fonctionne plus avec des non dits qu'avec des dialogues lourdingues ) mais c'est jamais chiant, bon y a bien quelques séquences qui tirent un peu longueur mais c'est un choix de narration (et ça me passionne pas toujours comme la scène du bal, aussi belle visuellement soit elle, elle me saoule un peu), on ressent bien que Cimino a décidé de prendre son temps et donc il fait durer ses plans au maximum. Il y a aussi des drôles d'ellipses par moment ( genre Kristofferson qui débarque pour sauver Huppert du viol, ça arrive comme ça presque par magie, mais la magie est utilisé à un autre moment, lors de la scène de danse entre Kristofferson et Huppert dans la Heaven's Gate ainsi ils sont seul au monde sur la piste alors que la plan d'avant c'était noir de monde, bon la c'est clairement pour la beauté du plan et ça se comprend ). Le film malgré sa longue durée est presque hypnotisant alors que finalement y se passe pas grand chose.
D'ailleurs en fait Kristofferson est un drôle de shérif dans le film, il trimballe sa vieille carcasse, il est plutôt inactif pour le shérif local, à part son histoire d'amour et se bourrer la gueule il est pas vraiment réactif à tout ce qui se passe autour de lui, bon il est révolté mais il agit très peu et au final on ne sait rien de lui ( comment est il passé de Harvard à marshall, pourquoi déteste t'il sa classe sociale ? ça reste des questions sans réponse, d'ailleurs le perso de Walken reste assez mystérieux, on ne sait rien de son amour supposé pour l'écriture ).
L'enjeu principal du film qui est donc la bataille entre les immigrés et les mercenaires est traité en filigrane, c'est là sans être là comme pas mal de personnages du film dont on comprend finalement pas trop l'utilité, du genre John Hurt, il a un perso en or mais c'est pas exploité ( et du coup je trouve que l'intro est pas vraiment intéressante même si lors de son monologue il énonce des paroles significatives des évènements à venir, je trouve que ça s'insère mal dans le récit). En fait on sent que Cimino ça l'intéresse pas spécialement son histoire et ses persos ( y pleins de persos potentiellement intéressant qui ne sont pas exploités ), ce qu'il veut c'est faire le film le plus beau et le plus lyrique possible et là il y arrive avec brio livrant des scènes marquantes à jamais ( tin cette fin quoi, le suicide silencieux de la femme) et puis l'attaque finale je m'y attendais pas du tout ( elle fait le même effet que la mort de la femme à Rourke dans l'Année du Dragon ), je parle même pas de la fin sur la bateau où avec 3 fois rien Cimino arrive à nous faire ressentir une infini tristesse.
La réalisation de Cimino est virtuose, c'est blindé de plans tous plus beaux les uns que les autres ( les décors naturels du Wyoming sont magnifiés et on a souvent l'impression d'être devant de superbes tableaux ) et c'est vraiment une réalisation super ample à base de grand mouvement de caméra circulaire ( on a plusieurs fois l'impression que la caméra vole ) et la bataille est filmé de cette manière, c'est assez bluffant ( et la bataille finale fait échos à l'intro à Harvard autour de l'arbre ).
y a une mise à mort bien cool où on se croirait dans un Chang Cheh ( c'est d'ailleurs la seule scène du film avec le coté too much du spaghetti le reste du film c'est de la bataille rangé où ça canarde dans tout les sens sans aucun acte héroïque et où on ne s'attarde pas sur les morts ) et le coté graphique fait penser à du Peckinpah.
La photo du légendaire Vilmos Zsigmond est magnifique, ça chatouille la rétine à de nombreux moment ( quand Jeff Bridges aperçoit Kristofferson accoudé au bar seulement éclairé par les lueurs du soleil perçant à travers les fenêtres et celui nocturne de Ella et Averill au bords de la rivière avec les montagnes au loin ), ce génie de la photo livre peut être bien ici son meilleur travail à ce jour ( quand il utilise les lumières naturels c'est à tomber et puis l'utilisation de la fumée aussi c'est grandiose ).
Kris Kristofferson c'est la classe à l'état pur, sur chaque plan il respire la classe ( classe que lui envie d'ailleurs le perso de Walken au détour d'une scène très Melvillienne ), rarement vu un cowboy aussi classe sans que ça fasse too much et pis accessoirement c'est aussi un putain d'acteur, Isabelle Huppert n'a donc pas que des drames de merdes français à son actif, son jeu un peu approximatif colle bien avec son personnage de pute immigrée, par contre je suis pas vraiment convaincu de la transformation de son personnage en quasi warrior ( la scène où elle échappe au 50 winchester est surréaliste ), et puis on a Christopher Walken une fois de plus génial, la façon dont est introduit son personnage c'est une leçon de cinéma ( le plan à travers le drap j'en rêvais quand la séquence a commencé ) et on regrette même que son personnage n'est pas plus de temps de présence à l'écran tant il est génial.
C'est blindé de super acteur dans les seconds rôles ( qui malheureusement ne sont pas assez étoffés pour réellement exister à l'écran ) : John Hurt est excellent dans son rôle de premier de sa promo qui est devenu un alcoolique cynique qui ne croit plus en grand chose, Geoffrey Lewis en trappeur, Tom Noonan toujours aussi inquiétant, Mickey Rourke en pote de Walken, Brad Dourif du coté des gentils ce qui est assez rare pour être souligné, Jeff Bridges et Jeff Bridges c'est toujours cool.
La BO entre morceaux très doux et agréable et passages musique folklorique est vraiment une belle réussite ( j'adore le morceau qu'on entend quand on a l'ellipse de 20 ans avec le plan sur Kristofferson dans le train, dès ce plan j'ai su que j'allais adorer le film ), Mansfield le compositeur joue d'ailleurs un petit rôle dans le film ( le violoniste ).
Je suis pas spécialement un grand fan de Cimino, j'aime bien l'Année du Dragon ou le Canardeur mais pas de là à en faire des tonnes, ici aussi je peux pas dire que c'est un film que j'ai envie de revoir à l'infini mais c'est quand même une sacrée fresque. Et c'est tout simplement beau et pis putain ce plan final sur le regard de Kristofferson.
"It's getting dangerous to be poor in this country"
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