Pearl Harbor de Michael Bay
(2001)
Énième vision de ce film que j'ai toujours apprécié, et ce sans pour autant le considérer comme un grand film. Cette revision fait beaucoup de bien au film par ailleurs, Pearl Harbor étant de ce genre d'oeuvres qui souffrent véritablement d'une réputation à laquelle il sera difficile de s'en détacher. Et dans le cas présent, Pearl Harbor a clairement le syndrome de la presque totalité de la filmographie de Michael Bay, à savoir cette faculté du public à condamner ses entreprises pour la simple raison qu'il restera à jamais un simple faiseur. Pourtant, à y regarder de plus près et avec un certain recul, Pearl Harbor pourrait être l'exception des travaux cinématographiques de Bay, puisque l'on y retrouve tout ce qui caractérise plus ou moins son cinéma mais à un degré tellement faible que le film devient réellement un cas atypique de la filmographie du réalisateur. Sur la base d'un projet historique à forte puissance symbolique (le film sort 60 ans après l’événement conté, et le jour du Memorial Day qui plus est), Pearl Harbor était, dès le début, destiné à être de ce genre de films qui divisent de par ses intentions. Car oui, Pearl Harbor est un film sur une défaite, mais il est surtout un film sur l'entrée en guerre des États-Unis, difficile donc d'échapper à du symbolisme à outrance ainsi qu'à une vision souvent glorieuse de l'armée. Du coup, le choix de Michael Bay au poste de réalisateur est finalement assez compréhensible, même si le réalisateur n'avait jusque là jamais fait ses preuves dans un cinéma plus sérieux, et cela donne un résultat hybride qui pourra en offusquer plus d'un. Car Pearl Harbor, malgré ses apparences de remake du Tora ! Tora ! Tora ! de Richard Fleischer (dont il reprend plusieurs éléments scénaristiques, notamment le cuisinier qui devient soldat), n'épouse jamais la forme du pur film de guerre ultra-réaliste et préfère nettement emprunter la voie du divertissement.
Un choix étonnant donc, mais avec lequel Bay, consciemment ou pas, livre ici tout l'intérêt du métrage, celui d'être avant toute chose une grande épopée humaine, une histoire de passion guerrière et d'amour ainsi que l'histoire d'une nation. Il est donc étonnant de voir à quel point c'est précisément ce point précis qui fait souvent tiquer les détracteurs du film, mais là encore, le fait que Pearl Harbor soit un film de Michael Bay fait clairement ressortir au plus grand nombre les défauts du métrage au point de cacher à leurs yeux le fait que l'intention du métrage pourrait se trouver ailleurs. Car oui, même si le film de Bay possède énormément de défauts, entre son histoire d'amour beaucoup trop envahissante par moment (à mes yeux, le film aurait gagné à rester une histoire d'amitié entre les deux pilotes), son raid final occultant trop vite les conséquences de la défaite américaine dans le Pacifique ou encore ses têtes d'affiche clairement perfectibles, force est de constater qu'on a beaucoup trop tendance à oublier le reste. Car Pearl Harbor, c'est aussi ni plus ni moins que l'un des films de guerre contemporains les plus réussis de ce début de siècle. Alors certes, on est loin de l'excellence d'un Saving Private Ryan, mais là encore l'intention n'est pas du tout la même, Pearl Harbor cherchant avant tout à conter un drame à hauteur d'homme pour finalement embrasser l'histoire de Pearl Harbor dans ce qu'elle a de plus terrifiant. On arrive donc au point fort du métrage, à savoir ce climax de près d'une heure, une séquence tout simplement impressionnante dans sa capacité à mêler le spectaculaire et l'émotion. Certains crieront à la facilité devant l'apparente gratuité de la séquence, mais dans ce cas là, c'est tout un pan entier du cinéma américain qu'il faudrait juger, Pearl Harbor se contentant finalement de reprendre ces ingrédients qui font les grandes épopées historique au cinéma. Avec ce film, Michael Bay signe ce qui est très certainement son travail le plus remarquable en terme de mise en scène. Ses effets clinquants et gratuits propre à ses blockbusters sont ici utilisés avec soin et surtout placés pour toujours donner un nouveau point de vue sur une scène en particulier (le fameux plan-séquence de la chute de la bombe est l'exemple parfait).
Niveau bande-son, Hans Zimmer signait là une de ses plus belles compositions, le thème principal se mariant parfaitement avec la dimension humaine du récit. Quand au casting, s'il est évident que l'on pourra toujours reprocher le choix de Ben Affleck et de Josh Harnett pour les deux rôles principaux, les seconds rôles rattrapent aisément le reste avec en vrac Tom Sizemore, Michael Shannon, William Fichtner, Dan Aykroyd, Alec Baldwin ou encore un Jon Voight méconnaissable en Président Roosevelt. En l'état, je ne saurais dire si le fait d'avoir toujours apprécié le film pour ce qu'il est joue en la faveur de la revision, tout comme je ne saurais dire si la vision de la Director's Cut, plus violente et plus intense dans l'émotion, en fait de même. Néanmoins, il me paraît aujourd'hui évident que Pearl Harbor est un film qui ne mérite clairement pas sa réputation actuelle basée sur un certain nombres de préjugés et ce, malgré tout les défauts qu'on pourra lui trouver. Pas forcément un film à réhabiliter donc, mais force est de constater qu'on est très loin d'être devant une daube sans nom. Un film que je place aisément dans mon Top 3 Bay avec The Rock et Armageddon, et qui s'impose à mes yeux comme une épopée tragique et épique réussie sur de très nombreux points.
NOTE : 7,5/10