L'armée des ombres de Jean Pierre Melville de 1969
Les activités et la vie extrêmement difficiles d'un réseau de résistants sous l'occupation allemande. Jean Pierre Melville, durant la seconde guerre, rejoint la France libre à Londres en 1942, c'est à ce moment qu'il prend le pseudonyme de « Melville » en hommage à l'auteur de Moby Dick. C'est en livrant assaut lors de la bataille du mont Cassin qu'il se serait promis de monter ses propres studios s'il en réchappait...
L'un des meilleurs réalisateur Français s'attaque à la résistance, film cher à son coeur afin de rendre hommage à ces hommes de l'ombre délivrant une bataille féroce contre l'occupant. L'histoire est tirée du roman du même nom, de Joseph Kessel. Melville fait appel à une brochette d'acteurs, tous aussi bon les uns que les autres: Lino Ventura, Simone Signoret, Paul Meurisse, Jean-Pierre Cassel..etc
Première scène: parfaite! Un défilé Nazis sur les champs, arrêt sur image: bienvenu chez Melville, voici l'armée des ombres. Melville hésitait à mettre cette scène à la fin de son film, je pense qu'au début c'est très bien car dès les premières secondes on comprend que l'ennemi est là et que nous sommes occupés...
Le film, commence avec le personnage principal: Philippe Gerbier, ingénieur distingué des Ponts et Chaussées soupçonné de « pensées gaullistes », est arrêté par la police de Vichy et placé dans un camp. Le film démarre directement avec ce fond de noirceur absolue, ou il fait gris, c'est boueux, tout les pensées ou courants politiques sont là , enfermés à ne savoir ce que l'avenir leur réserve...Gerbier, magnifiquement interprété par Ventura à une très grande force de caractère et reste toujours presque sans émotions, sans peurs, comme si il était déjà résigné et à bout de force. La scène ou la gestapo vient le chercher dans le camp le montre très bien...ses collègues prisonniers ont presque plus peur que lui...
Puis vient la scène ou il s'échappe: cette scène résume à elle seule, la résistance de l'époque: agir vite et ne pas rater la moindre occasion, pour échapper et faire mal à l'ennemi. La mise en scène de la poursuite est excellente: une longue course filmée de coté ou Ventura expliqua que Melville faisait exprès de rouler très vite pour le rendre à bout de souffle...La tension chez le barbier ou il vient de se réfugier montre très bien le doute et la peur qu'il pouvait subsister lorsqu'on rencontrait un inconnu: résistant ou collabo? Un portrait du maréchal accroché au mur, Gerbier hésite mais se laisse faire par ce commerçant qui finira par l'aider heureusement.
On découvre ensuite plus en détails l'organisation: gerbier et son bras droit s'occupe de la taupe qui l'a dénoncé: scène hallucinante et violente, l'exécution n'est pas faisable au pistolet...il faut l'étrangler...acte horrible à faire, Gerbier confie que c'est également la première fois pour lui...Melville joue parfaitement sur le passage émotion des personnages (rien que dans leurs regards) et à l'acte de violence...On ressent très bien le dégoût qu'il règne mais l'obligation de la faire. Il faut tuer pour survive et pas que l'occupant, les traîtres aussi, même si ce dernier et très jeune...
Passage également mythique: le trajet en sous marin, dans une obscurité stressante, puis la rencontre à Londres avec le général: on ressent énormément la fierté et la prestance du personnage incarnant cette résistance...
Simone Signoret est excellente en Mathilde reprenant le pouvoir en l'absence de Barbier. Le sacrifice de Jean-François, lorsqu'il se livre à la Gestapo, montre par une scène simple et oppressante la torture SS : Melville par un simple plan, (Cassel, seul, attaché à une chaise), arrive à faire monter le stress du spectateur car tout est suggérés. On ne voit rien mais on imagine les pires choses...
Autre scène extrêmement tendu, Gerbier prisonnier sur le point de se faire exécuter. La célèbre musique d 'Eric Demarsan, met clairement dans l'ambiance. Gerbier pense que c'est la fin et refuse de courir malgré les mitrailleuses pointées sur lui.
Enfin, la scène finale, l'exécution de Mathilde, qui est menacée par la Gestapo : Ces guerriers de l'ombres ne peuvent rien laisser traîner. Pour sauver les autres, on est obligé de sacrifier l'un des siens. Le visage de Signoret en dit long...
Chaque plans ou mise en scène créée une atmosphère lourde et dramatique. Les sons, par exemple d'une porte se fermant et s'ouvrant par le son d'un lourd verrou. Melville nous fait ressentir les peurs et les doutes des personnages, on est avec eux en permanence.
Après avoir raconter toutes ces histoires, Melville nous explique que tous sont morts avant la fin de la guerre. Ils se sont battus pour un idéal qu'ils croyaient justes sans pour autant savoir si dans quelques années, ce serait le bon camp. Ils se sacrifient pour défendre leurs libertés face à l'occupant, c'est l'histoire des résistants que Melville a su représenter de manière magistrale. Il arrive à montrer la fois le coté héroïque mais aussi les cotés « sales » mais obligatoires de ce combat.
L'armée des ombres, LE film de la résistance !
Note: 10/10