Moonrise Kingdom de Wes Anderson
(2012)
Forcément un peu déçu vu tout l'engouement autour du film depuis sa projection à Cannes, ne connaissant que de très loin la filmographie pré-
Fantastic Mr Fox, je m'attendais au moins à quelque chose d'approchant en terme de qualité. Alors oui, sur la forme Wes Anderson reste fidèle à lui-même, mais elle gagnait bien plus à être utilisée dans un film d'animation car elle servait à la caractérisation d'un univers très second degré alors qu'ici on est en face d'une œuvre qui se retrouve un peu trop le cul entre deux chaises, voulant à la fois séduire le public par un décalage de ton omniprésent tout en allant plus loin par un script mélancolique qui a beaucoup de choses à dire mais qui, hélas, passe un peu trop à côté de l'essentiel. Ainsi,
Moonrise Kingdom joue énormément sur la confrontation entre deux mondes, celui des enfants, volontairement matures et étant en quête perpétuelle du bonheur, et celui des adultes, d'une tristesse infinie où l'on se résout finalement à la finalité de son existence. L'idée n'est pas mauvaise en soi, mais le premier univers est tellement idéalisée qu'il finit finalement par agacer plus qu'autre chose, la meilleure partie du métrage étant véritablement l'entre-deux se concentrant sur les personnages de Bruce Willis et de Frances McDormand. Il est donc dommage de constater que le film loupe finalement le coche là où il aurait pu se révéler vraiment intéressant.
Néanmoins, la partie enfance a le mérite d'apporter un regard original sur ce qu'elle traite, avec une naissance de violence soudaine vraiment surprenante (un chien qui meurt par une flèche, un gamin blessé par balle) ou encore un éveil de la sexualité pour le moins troublant. Le couple au centre du film a donc un réel mérite d'exister puisqu'il apporte une certaine émotion au récit (même si, là encore, le film aurait pu aller plus loin), mais force est de constater qu'il n'en est pas de même pour le reste des scouts qui sont quasiment inutiles. C'est d'ailleurs là le problème majeur du métrage, à sa voir sa capacité à s'encombrer de personnages et péripéties inutiles, que ce soit les frères de Suzie, le narrateur visible, le sauvetage du chef scout, la séquence de la foudre ou bien le rebondissement final sur l'église,
Moonrise Kingdom multiplie les séquences qui n'apportent rien de concret à un récit qui aurait certainement méritée une approche plus réfléchie dans sa seconde partie plutôt que cet apport que l'on croirait totalement impulsif. De plus la mise en scène d'Anderson mériterait de se renouveler quelque peu, car si le cadrage lisse et impeccable s'accordait plutôt bien à l'humour burlesque de
Fantastic Mr Fox, il donne ici un résultat beaucoup trop artificiel et ce, malgré l'effet carte postale 60's qui est appréciable car apportant un véritable cachet au film.
La bande-son est plutôt sympathique sur le choix des chansons pré-existantes, en revanche, en ce qui concerne la composition originale d'Alexandre Desplat, je continue à penser que c'est un compositeur souvent surestimé avec un travail qui ne se démarque jamais réellement. Enfin, le casting sauve vraiment les meubles, car même si certains acteurs sont clairement sous-utilisés (Bill Murray et Tilda Swinton entre autres) voire carrément inutiles (Harvey Keitel), d'autres tirent habilement leur épingle du jeu, Bruce Willis en tête puisque possédant le personnage le plus attachant du métrage. Même les enfants sont plutôt bons, mention spéciale à la jeune fille du couple vedette. Loin de la réussite d'un
Fantastic Mr Fox,
Moonrise Kingdom s'embourbe via un scénario qui préfère le charme immédiat à un propos solide. En espérant que Wes Anderson retourne vite au cinéma d'animation, c'est véritablement là où son style atypique arrivera réellement à offrir quelque chose de concret à ses histoires.
NOTE : 5/10