C'est très simple, j'ai vu exactement ce à quoi je m'attendais. Ni plus, ni moins. Soit un morceau de pelloche bien nerveux qui claque comme une balle perdue au milieu d'une production contemporaine trop souvent timorée. Écartons d'emblée la pseudo polémique provoquée par une éternelle frange de la critique puritaine et conservatrice: non, il n'y a aucune idéologie nauséabonde dans Troupe d'Elite (sérieusement, comment un film aussi neutre peut-il être taxé de la sorte). Le film expose simplement des faits qui se veulent le plus réalistes possible : corruption des autorités, favelas asphyxiées par le trafic de stupéfiants et d'armes et un nombre incalculable de victimes collatérales.
On suit donc le groupe du SWAT do Brazil, seule unité incorruptible de la police mais qui ne se refuse cependant aucun excès de zèle pour nettoyer les ruelles coupe-gorge de la présence des trafiquants qui y prolifèrent. Parfait complément de la Cité de Dieu de Fernando Meirelles, le film de José Padhilla propose un point de vue différent puisqu'on suit cette fois cette réalité sordide à travers la lunette des fusils de la police. On suit notamment deux bleus dans leur découverte des ficelles du métier, deux idéalistes qui vont forcément déchanter devant les codes de conduite gravés dans la pierre depuis des lustres.
Tourné caméra à l'épaule (difficile de filmer autrement des décors à la topographie si atypique) et narré de manière déstructurée, Troupe d'Elite flirte allègrement avec le docu-fiction de part l'omniprésence de la voix off du personnage principal. Le processus peut lasser par moment mais permet aux spectateurs d'engranger un maximum d'informations en un minimum de temps. Vu la densité du récit, les 110 minutes du film passent à la vitesse de l'éclair et aucun bout de gras n'est à dénoter. Sur la forme, rien à dire. Sur le fond, on peut juste faire un parallèle entre les évènements du scénario et le nettoyage en cours des favelas en vue du double évènement auquel se prépare le pays, à savoir l'organisation de la Coupe du Monde 2014 et des JO 2016. Ça s'arrête là. Les membres du BOPE sont tout sauf des fascistes, juste des hommes soumis à une pression et à un stress invivables, en permanence sur le fil du rasoir et qui n'ont généralement pas plus d'une seconde pour choisir de tuer ou d'être tué.
La tonalité du film est sa principale qualité mais aussi son plus grand défaut. Même si l'écriture des personnages est brillante, difficile de s'identifier à eux ou d'éprouver une quelconque empathie. L'épilogue est à l'avenant de la partition brut de décoffrage livrée par l'ensemble de l'équipe du film et donnera du grain à moudre aux détracteurs de cette forme de cinéma-vérité. Pour le moment, pas de place pour l'espoir, juste de quoi stopper l'hémorragie actuelle et l’afflux de forces vives dans les artères de ces quartiers tristement cinématographiques.
8/10