Bug de William Friedkin
(2006)
Une bonne surprise de la part de ce Friedkin dont je n'attendais pas grand chose. Alors certes, c'est le genre de film qui cède beaucoup à la facilité dans son évolution et je doute qu'il passe aussi bien lors d'une seconde vision, une fois l'effet de surprise passé, mais en l'état ça reste une œuvre louable dans sa volonté de proposer un cinéma différent. Avec
Bug, William Friedkin renouvelle totalement sa façon de penser et de faire du cinéma. En adaptant une pièce théâtrale à l'écran, il s'impose un huit-clos poisseux qui s'intègre finalement très bien dans sa filmographie, retrouvant dans la folie furieuse de son récit la vision de l'être humain que l'on pouvait déjà trouver dans un film comme
Sorcerer.
Bug pourra en surprendre plus d'un dans sa construction scénaristique, car ce n'est seulement qu'après plus d'une demi-heure d'exposition (le temps de poser les personnages pour mieux les transformer par la suite) que l'intrigue décolle vraiment, et même après ce temps d'adaptation,
Bug pourra encore rebuter dans son extrémisme qui fait toutefois son charme. En soi, le scénario de
Bug n'est pas dénué de tout défauts. On pourra notamment reprocher le personnage de Jerry qui ne possède aucune finalité ou encore le dernier plan grandiloquent, mais force est de constater que Bug brille néanmoins dans sa thématique principale, celle de montrer l'évolution grandissante de la folie au sein d'un couple autodestructeur.
La mise en scène de Friedkin ne cherche jamais à aller dans le tape à l’œil malgré un script qui s'y prêtait plutôt bien. Le cinéaste préfère développer ses thématiques dans une étonnante variété de placements de caméra, et donc de points de vue. Et que dire de cette ambiance visuelle à tomber, car si la capacité du film à déranger le spectateur vient aussi des acteurs, elle découle surtout de la réalisation de Friedkin, que ce soit par certains choix sur le hors-champ (le microscope), la mise en place de l'ambiance (fabuleux premier plan) ou encore le symbolisme de certains objets qui donne, dès le début du métrage, toutes les clés au spectateur pour comprendre ce qui se trame réellement. Mais
Bug, c'est avant tout un film qui repose entièrement sur son duo d'acteur phénoménal. Et si Michael Shannon vole la presque totalité des séquences où il apparaît, il serait dommage d'oublier Ashley Judd qui arrive toujours à faire croire à l'évolution de son personnage. Œuvre pour le moins angoissante sur la psyché humaine dans ce qu'elle a de plus dangereux, Bug est un film qui mérite assurément le coup d’œil, ne serait-ce que pour voir comment un réalisateur comme Friedkin peut se renouveler totalement sur la forme en l'espace d'un seul long-métrage.
NOTE : 7/10