THE SUNCHASER-------------------------------------------
Michael Cimino (1996) |
8/10 Un appel à la tolérance qui sonne comme une ode à la vie dans sa forme la plus pure. Avec The sunchaser, Cimino donne un gros coup dans une fourmilière où bonheur est bien trop souvent associé au côté matériel de notre société. La réussite sociale y est davantage recherchée, peu aspirent simplement à vivre en harmonie avec leur environnement naturel. A travers les traits de Brandon Monroe, jeune criminel de 16 ans malmené dans son enfance par un environnement hostile et un père énervé, dont la vie est menacée par un cancer agressif, le réalisateur tente de porter un regard acerbe sur une société qui semble lui échapper. Pour bien marteler son propos, il lui oppose en effet le symbole même de l'american way of life, un cancérologue en pleine réussite et non dénué d'ambition, pour qui les soucis du quotidien semble se limiter à savoir s'il va mettre plus ou moins de 2 millions d'euros dans sa prochaine habitation.
Cimino n'aura de cesse de faire résonner ce propos tout au long de son film, lors d'une épopée formatrice où les plus convaincus par leur mode de vie se rendront compte de l'essentiel et du côté peut être un peu superficiel de la possession à tout prix. A coup de séquences énervées, dans lesquelles ce symbole d'une amérique en pleine réussite se fait chambouler dans son quotidien car confronté à ce qu'il ne veut pas voir, l'envers du décors, celui de la misère et de la débrouille, The Sunchaser dénonce avec virulence les inégalités sociales qui creusent ce gouffre existant entre monde aisé et classes défavorisées.
Si le film peut parfois sembler un peu exagéré à ce propos, limite idéaliste, ce portrait d'un criminel malgré lui, poète et tolérant semble en effet peu probable, on se laisse toutefois happer par cette symphonie humaniste que signe Cimino. Ses deux acteurs sont dirigés d'une main de maître, Seda saît tour à tour montrer les crocs ou se faire plus touchant, Harrelson est au poil dans son rôle de toubib gâté par la vie mais meurtri en même temps par un événement lié à son enfance. Le road movie thérapeutique qu'il va vivre touche en plein coeur car on est finalement tous concerné par ce genre de problématique. Cette société régulée par l'argent et donc la réussite sociale, c'est aussi la notre, et forcément on se prend vite d'affection pour ces quelques réquisitoires pour une vie simple, où en tout cas un rappel aux fondamentaux, à cette beauté naturelle qui fait de notre monde ce qu'il est.
Devant cette oeuvre entière, on se laisse porter ou non par les flots vers des contrées où la nature resplendit, où une certaine forme de poésie semble prendre le pas sur le réalisme d'une vie régulée par les unités monétaires. Même si le film m'a semblé par moment un peu trop utopique, je dois avouer m'être laissé emporter, le temps d'une séance, dans ce voyage spirituel en terres Navajo, bercé avec douceur par la beauté des images, la virulence du message, le côté eighties présent à la fois dans la photographie et la bande son, ainsi que par la fougue des deux protagonistes qui font de The sunchaser une oeuvre qui ne laisse pas indifférent.