INCASSABLE-------------------------------------------
M. Night Shyamalan (2000) |
9/10 Ma 1ère vision datait de la sortie ciné et j'étais resté sur une relative déception : le rythme lent et le scénario anti-spectaculaire m'avaient plutôt ennuyé et je n'avais été particulièrement séduit par la réalisation. 12 ans ont passé avec une déferlante de films de super-héros très inégaux et les qualités d'Incassable s'imposent désormais tout naturellement, car ce qui constituait pour moi les limites d'un film un peu chiant apparaît finalement comme les atouts majeurs d'un film intense.
Car Shyamalan, en adoptant ce ton très posé et en refusant de répondre aux sirènes du tape-à-l’œil et de la surenchère fantastique, signe ici ce qui constitue à ce jour le meilleur film de super héros sérieux et réaliste. Son scénario, profond, mêle brillamment l'aspect intimiste et émouvant d'un trio familial en crise à l'histoire tout aussi touchante de la genèse d'un héros fantastique (avec tout un aspect culturel et mythologique autour des comics extrêmement riche et intéressant). Et surtout ce qui semble intéresser le réalisateur ici, ce sont les implications psychologiques, philosophiques, sociétales d'une telle naissance, d'un tel mythe, et son impact sur un homme simple, triste, un monsieur tout le monde, mais finalement hors du commun.
Shyamalan va dans le fond des choses avec un script introspectif extrêmement solide et sa réalisation épouse son sujet avec brio : les plans séquences et les travellings très fluides se combinent à des dialogues intenses, portés par une interprétation au top (un quatuor d'acteurs exceptionnel, Bruce Willis et Samuel L. Jackson en tête dans des rôles extrêmement difficiles, épaulés du jeune Spencer Treat Clark et de la toujours magnifique Robin Wright Penn). Ainsi aux extrémités du métrage, les scènes les plus spectaculaires répondent à un développement profond et mature, sublimés par un score génial et ces scènes finissent de transcender le sujet avec une élégance formelle magistrale (plans, costumes, symbolique, intensité des situations). Et d'apporter alors le souffle libérateur et super-héroïque qu'on attendait (la scène de la maison avec la piscine et du lendemain avec le petit déj entre le père et son fils).
A noter aussi un épilogue fascinant, réalisé avec maestria, qui fait partie de ces twists qui se savoure finalement encore plus quand on le connaît d'avance et qui dénote complètement dans un registre de gravité totalement inédit. Bref pour moi une totale redécouverte de ce film donc, en tous points brillant et pourtant malheureusement incompris.