Un peu déçu étant donné que j'attendais ni plus ni moins que le meilleur film de guerre coréen jamais réalisé. Sept ans après la réussite
Taegukgi, Kang Je-kyu retourne derrière sa caméra avec, une nouvelle fois, le plus gros budget jamais rassemblé pour une production coréenne et offrir un spectacle digne de son précédent long-métrage. Et si
My Way n'est clairement pas un mauvais film, bien au contraire, il faut bien avouer qu'il souffre quelque peu de la comparaison avec son prédécesseur. Car d'une certaine façon,
My Way n'est ni plus ni moins qu'un
Taegukgi-bis, que ce soit sur le plan formel ou sur les intentions qui s'en dégage, et si la qualité est toujours au rendez-vous on était quand même en droit d'attendre une évolution visible. Ainsi, le film de Kang Je-kyu répète exactement les mêmes erreurs que son aîné, notamment sur la façon d'aborder l'émotion au sein du récit, jamais faite avec subtilité. Bien entendu, la méthode est efficace, le script prend souvent aux tripes et chaque mort de personnage important saura faire son effet sur le spectateur, mais c'est véritablement ce manque de subtilité qui affecte le film puisque les messages qu'il dégage n'en deviennent que plus rébarbatifs et surlignés, au point de rendre secondaire le choc des cultures coréen/japonais qui était pourtant censé être l'essence même du métrage dès l'introduction.
Là où Taegukgi étonnait dans son revirement concernant la relation nord-coréens/sud-coréens,
My Way ne surprend que très peu dans sa démonstration psychologique de la Seconde Guerre Mondiale avec notamment des séquences qui souffrent de la comparaison avec ce qui a pu se faire auparavant sur le plan international (l'attaque de la ville russe rappelle trop souvent le
Stalingrad d'Annaud, quand au Débarquement il déverse beaucoup trop dans le spectaculaire à tout prix malgré une vision intéressante du clan nazi, là où
Saving Private Ryan savait doser entre spectacle et réalisme). Quand au récit lui-même, il aurait mérité une durée à la hauteur de son ambition dans le sens où l'on se surprend trop souvent à se dire que tout va trop vite, que ce soit dans l'introduction trop rapide alors qu'elle est censée poser des bases solides ou tout la partie post-Russie qui donne véritablement l'impression d'un gâchis, notamment via une ellipse de mauvais goût dans un récit que l'on soupçonné déjà fortement romancé. Ainsi, c'est véritablement les scènes qui prennent leurs temps, à savoir les séquences en Mandchourie et dans le goulag russe qui retiendront fortement l'attention, travaillant la psychologie de certains personnages au point de questionner l'empathie du spectateur envers eux. Niveau réalisation, Kang Je-Kyu aurait clairement mérité de se remettre sa notion de montage en question, car si la caméra à l'épaule n'est pas un défaut dans une production de ce type (l'hyper-réalisme est bien présent, à ce niveau là l’œuvre est sans concession), le montage ultra cut en est véritablement un, que ce soit dans les combats au corps à corps (la découverte de l'identité du sniper) ou dans les batailles à grande échelle (l'assaut final des forces Alliés).
Heureusement, le film n'est pas totalement loupé à ce niveau là et comme dans
Taegukgi, le réalisateur trouve l'inspiration et livre des scènes inspirées sur le plan formel, notamment dans une séquence de sniping ultra lisible qui se révèle être l'une des plus marquantes du métrage. Enfin, niveau casting, Jang Dong-gun reprend plus ou moins un rôle identique à celui de
Taegukgi avec le même talent, c'est donc plutôt vers le japonais Jo Odagiri qu'il faudra se tourner pour repérer la véritable surprise du film, aidé notamment par une écriture très intéressante de son personnage, notamment sur la relation japonaise vis à vis du sacrifice de soi pour sa nation. Bref, à défaut d'être l'un des fleurons du film de guerre coréen comme
Taegukgi ou
The Front Line,
My Way peut se targuer d'être un film ultra-efficace sur le plan de l'émotion ainsi que sur la notion de spectaculaire, arrivant même à supporter la comparaison avec les dernières références du genre via un budget exploité à fond et des CGI étonnants pour une production asiatique. Un beau film à conseiller sans aucune hésitation, il faudrait juste espérer que le prochain film de Kang Je-kyu ne continue pas sur le sentier de la répétition.