FRENCH CONNECTION
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William Friedkin (1971) | 9.5/10
1ère découverte pour moi de ce film fondateur du polar urbain et une jolie petite claque; voir French Connection aujourd'hui, pourtant 40 ans après sa sortie, est une expérience marquante et force est de constater que sa réputation n'est en rien usurpée. Plusieurs raison à çà.
Tout d'abord et le plus marquant sans doute, c'est la mise en scène du film, dont le style brut et documentaire, nerveux, novateur pour l'époque, donne un aspect hyper réaliste et moderne à cette histoire. C'est LE polar urbain par excellence : Friedkin filme la ville de New York, Brooklyn et ses quartiers populaires avec talent et il réussit à retranscrire cette ambiance si particulière (soulignée par une musique géniale et chaotique de Don Ellis). En s'appropriant avec brio chacun de ses éléments urbains, il fait de son décor un personnage à part entière et les ruelles sales et chargées de New York s'opposent aux 2 autres lieux rapidement visités, les grandes esplanades du centre de Washington et le cadre ensoleillé de Marseille. Et ces extérieurs, décor d'artères et de vitrines, épousent le caractère des personnages, ces flics qui arpentent jour et nuit le tarmac de la ville à la manière de petites fourmis consciencieuses, alors que les autres, les méchants, les nantis, semblent mener une vie cachée et fastueuse bien à l'abri dans des palais dorés.
Ce sont ces personnages au caractère fort, anti-manichéens et anti-romantiques, qui constituent la 2e grande force du film; Gene Hackman trouve ici sans doute l'un de ses plus grands rôles avec le personnage de Popeye, un flic nerveux un peu bad-ass et hyper charismatique; Roy Scheider en acolyte fraternel, Fernando Rey en bad guy très classe et Marcel Bozzuffi en homme de main sanguinaire complètent aussi merveilleusement le cast. Les personnages décrits sont réalistes (si l'on excepte l'accent espagnol de Rey) et bien ancrés dans le réel. Friedkin ne s'attarde que très rapidement sur leur background. Ce qu'il préfère décrire, ce sont les activités de ces hommes, leurs actions et réactions face aux épreuves qui vont constituer le cœur de cette enquête débutée par une simple intuition de flic.
Et c'est aussi l'un des points forts du film, de proposer un scénario et une trame axés sur le réel (ils sont inspirés d'une histoire vraie) et centrés sur un jeu de piste autour d'une livraison de drogue. Les filatures et la surveillance constituent le cœur de l'enquête (donnant lieu des scènes parfaites, stressantes et ludiques à la fois et pourtant dénuées d'héroïsme) et comme dans la "vraie vie" la vérité est cachée par des zones d'ombre; ce qui importe ici ce sont les actes et les indices laissés par les protagonistes. Et ici encore, rien d'extrêmement spectaculaire mais un aspect brut et fascinant, que met en scène Friedkin. Brillamment, sans jamais tomber dans le didactisme ni le démonstratif, le film prend son temps et modernise les archétypes du films noir (dont le chapeau de Hackman en est sans doute hérité). Et ce sérieux, cette description très consciencieuse de l'action, fait beaucoup penser à d'autres grandes œuvres plus récentes (sur beaucoup d'aspects on pense ainsi à The Wire par ex, une référence). La seule scène d'action "bigger than life" est peut-être cette course poursuite incroyable entre une voiture et un métro aérien, ultra lisible (ce qui qui rappelle les qualités de Traqué notamment), une scène clé magistrale (toujours maintenant) qui fait alors jaillir la mort dans le quotidien. Cette longue séquence toute en nervosité (une bande son de bruits urbains et de respirations se rajoutant à l'effet) fait ainsi basculer le récit dans une violence et une noirceur qu'on savait latentes mais auxquelles on ne s'attendait pas forcément. Et l'épilogue du film en est le dénouement sombre et ironique, loin du happy end, qui colle aussi au plus près d'une gravité très réelle.
French connection est un film sinon intemporel en tout cas affranchi de son époque, dont la modernité réside pourtant dans son ancrage très profond dans le réel. C'est un film qui ne vieillit pas car c'est aussi une réussite à tous les niveaux, mise en scène, interprétation, histoire, dont le style préfigure l'aspect, le rythme et la dramaturgie que beaucoup réutiliseront plus tard. L'apanage des grands films.
Tout d'abord et le plus marquant sans doute, c'est la mise en scène du film, dont le style brut et documentaire, nerveux, novateur pour l'époque, donne un aspect hyper réaliste et moderne à cette histoire. C'est LE polar urbain par excellence : Friedkin filme la ville de New York, Brooklyn et ses quartiers populaires avec talent et il réussit à retranscrire cette ambiance si particulière (soulignée par une musique géniale et chaotique de Don Ellis). En s'appropriant avec brio chacun de ses éléments urbains, il fait de son décor un personnage à part entière et les ruelles sales et chargées de New York s'opposent aux 2 autres lieux rapidement visités, les grandes esplanades du centre de Washington et le cadre ensoleillé de Marseille. Et ces extérieurs, décor d'artères et de vitrines, épousent le caractère des personnages, ces flics qui arpentent jour et nuit le tarmac de la ville à la manière de petites fourmis consciencieuses, alors que les autres, les méchants, les nantis, semblent mener une vie cachée et fastueuse bien à l'abri dans des palais dorés.
Ce sont ces personnages au caractère fort, anti-manichéens et anti-romantiques, qui constituent la 2e grande force du film; Gene Hackman trouve ici sans doute l'un de ses plus grands rôles avec le personnage de Popeye, un flic nerveux un peu bad-ass et hyper charismatique; Roy Scheider en acolyte fraternel, Fernando Rey en bad guy très classe et Marcel Bozzuffi en homme de main sanguinaire complètent aussi merveilleusement le cast. Les personnages décrits sont réalistes (si l'on excepte l'accent espagnol de Rey) et bien ancrés dans le réel. Friedkin ne s'attarde que très rapidement sur leur background. Ce qu'il préfère décrire, ce sont les activités de ces hommes, leurs actions et réactions face aux épreuves qui vont constituer le cœur de cette enquête débutée par une simple intuition de flic.
Et c'est aussi l'un des points forts du film, de proposer un scénario et une trame axés sur le réel (ils sont inspirés d'une histoire vraie) et centrés sur un jeu de piste autour d'une livraison de drogue. Les filatures et la surveillance constituent le cœur de l'enquête (donnant lieu des scènes parfaites, stressantes et ludiques à la fois et pourtant dénuées d'héroïsme) et comme dans la "vraie vie" la vérité est cachée par des zones d'ombre; ce qui importe ici ce sont les actes et les indices laissés par les protagonistes. Et ici encore, rien d'extrêmement spectaculaire mais un aspect brut et fascinant, que met en scène Friedkin. Brillamment, sans jamais tomber dans le didactisme ni le démonstratif, le film prend son temps et modernise les archétypes du films noir (dont le chapeau de Hackman en est sans doute hérité). Et ce sérieux, cette description très consciencieuse de l'action, fait beaucoup penser à d'autres grandes œuvres plus récentes (sur beaucoup d'aspects on pense ainsi à The Wire par ex, une référence). La seule scène d'action "bigger than life" est peut-être cette course poursuite incroyable entre une voiture et un métro aérien, ultra lisible (ce qui qui rappelle les qualités de Traqué notamment), une scène clé magistrale (toujours maintenant) qui fait alors jaillir la mort dans le quotidien. Cette longue séquence toute en nervosité (une bande son de bruits urbains et de respirations se rajoutant à l'effet) fait ainsi basculer le récit dans une violence et une noirceur qu'on savait latentes mais auxquelles on ne s'attendait pas forcément. Et l'épilogue du film en est le dénouement sombre et ironique, loin du happy end, qui colle aussi au plus près d'une gravité très réelle.
French connection est un film sinon intemporel en tout cas affranchi de son époque, dont la modernité réside pourtant dans son ancrage très profond dans le réel. C'est un film qui ne vieillit pas car c'est aussi une réussite à tous les niveaux, mise en scène, interprétation, histoire, dont le style préfigure l'aspect, le rythme et la dramaturgie que beaucoup réutiliseront plus tard. L'apanage des grands films.