Man on fire
8.25/10Je ne sais pas bien qui a pu initier le mouvement mais on a eu droit ces derniers temps à une recrudescence de reviews sur Man on fire. Sur ce coup là, j’ai fais mon mouton car vous m’avez fichtrement donné envie de revoir le vigilante de Tony Scott.
Découvert en 2005 avec le zone 1 édité par Fox, j’en gardais le souvenir d’un exercice de style original doublé d’un « revenge-movie » nerveux mais un peu trop long à démarrer. Finalement, ces 140 minutes forment un tout indissociable et il est nécessaire de passer par cette heure d’intime relation pour étoffer la croisade de Creasy et ne pas en faire un sombre ersatz de Death Wish. Globalement, je ne vais pas paraphraser ce que tout le monde a dit. J’irais simplement dans le sens de ceux qui y voit la pièce maitresse de l’œuvre de Tony Scott, celle la même qui arrive enfin à équilibrer les besoins frénétiques d’expérimentations visuelles du réalisateur et un fond clairement plus dense que la simple vendetta. Dans l’ombre de son frère (et pourtant certaines de ses péloches sont bien plus burnées), Tony Scott a souvent voué un culte trop prédominant à l’esthétique. On l’a beaucoup taxé de simple faiseur à cause d’un vrai manque de moelle et d’épaisseur dans ses scénarios. Man on fire arrive donc à doser les excès et à combler les carences par le biais d’une relation aussi intense que les explosions de violence qui en découleront. Tony Scott propose enfin une forme virtuose (le montage est une vraie leçon !) tout en s’obligeant à calmer sa furie par le biais de séquences intimistes réussies qui flirtouillent avec le pathos sans jamais s’engluer dedans. Encore une fois, on ne cautionnera pas les actes de Creasy. Ils seront juste décrits comme le baroud d’honneur d’un homme désabusé à qui on aura enlevé la seule et unique raison de (re)gouter à la vie. Conscient d’une vie qui ne lui aura visiblement jamais fait de cadeaux, Creasy livre son oeuvre le plus noire (Walken le qualifie d'artiste de la mort !). La violence ayant toujours dictée sa façon de vivre, il en utilisera donc les seuls instruments qu’il a toujours connu. D’ailleurs, Scott se garde bien d’expliquer le background du personnage. On le sait juste dépressif et alcoolique et c’est bien assez pour s'en faire sa propre opinion. Dès lors que le réalisateur lâche la bride, on retrouve un Denzel en mode ultra badass qui va découper des doigts, flinguer, dézinguer, détruire et fourrer du C4 dans le cul de ceux qui s’opposeront à lui. Sa croisade sera faite de bruit et de fureur tranchant considérablement avec le personnage presque fréquentable que l’on a vu précédemment. De toutes façons, Denzel n’est jamais meilleur que quand il est à la limite (je dois être un des rare à apprécier son surcabotinage dans Training Day).
Mais à défaut de sombrer dans l’escalade de la violence graphique, Scott tranche avec le rythme ambiant de cette seconde partie livrant un épilogue poignant ou la bête redeviendra humaine l’espèce d’une dernière étreinte et d’un échange ou Creasy se laissera mourir. Cette conclusion semble être le meilleur choix ne dévoilant rien de Creasy et se contentant d’une approche réaliste et poignante. Cohérent sur toute la longueur, Man on fire est la confirmation d’une belle série du réalisateur dans les années 2000 initié par le trop sous-estimé Spygame et conclue en beauté par le jouissif Déjà vu.