[Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Modérateur: Dunandan

Monte Walsh - 7/10

Messagepar Count Dooku » Lun 16 Juil 2012, 13:05

Monte Walsh, William A. Fraker, 1970


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Voilà un western assez atypique, réalisé par William A. Fraker, un chef-opérateur (on lui doit notamment la photo de Rosemary's Baby et Bullitt) qui ne signera que peu de films en tant que réalisateur. Monte Walsh s'inscrit dans la vague des westerns crépusculaire qui fleurissaient à la fin des années '60, début des années '70, mais pas pour les mêmes raisons que les films de Peckinpah. En effet, c'est un film qui dégage la plupart du temps une ambiance paisible, loin de la violence et de la noirceur des westerns de Bloody Sam, et il faut attendre la moitié du film pour assister à un coup de feu. Toute la première partie se charge de nous présenter la vie de cow-boys dans un ranch, à travers quelques scènes de la vie quotidienne, des moments anodins en soi mais qui caractérisent bien les personnages et leur mode de vie. Le rythme est assez lent, il ne se passe pas grand chose et c'est avant tout à la description d'un monde en voie de disparition que nous convie le réalisateur, plus que dans la mise en place d'enjeux dramatiques. C'est là que se situe la dimension crépusculaire du film : l'Ouest de Monte Walsh n'est plus celui de l'Âge d'Or du western, c'est un monde désenchanté, où les ranchs appartiennent à de grands propriétaires vivant à l'Est et sous-traitant l'exploitation de leurs propriétés, et où les cow-boys d'autrefois ne sont plus des personnages flamboyants mais de simples ouvriers vieillissants et obligés d'effectuer des tâches ingrates pour survivre (à l'instar de ce vieux vétéran de la Guerre de Sécession, réduit à planter du fil barbelé et qui finira par se suicider sous le regard des autres cow-boys).



Les personnages principaux sont évidemment à l'image du constat que dresse le film, ce sont tous des reliques d'une autre époque, qui essayent tant bien que mal de s'adapter aux transformations du monde. Ainsi, le personnage de Jack Palance, fidèle compagnon du héros campé par Lee Marvin, décidera d'abandonner sa vie d'aventure pour se poser et épouser la gérante d'une quincaillerie. La prostituée vieillissante campée par Jeanne Moreau et qui entretient une relation sentimentale avec Marvin, quittera la ville pour tenter sa chance ailleurs. Seul le personnage de Monte Walsh (campé par Lee Marvin) restera fidèle à son mode de vie et à lui-même, sorte d'élément anachronique dans cet Ouest voué à disparaitre, et il finira par se retrouver totalement seul (la façon dont c'est amené est d'ailleurs un poil exagérée à mon goût, on a vraiment l'impression que toutes les tuiles lui tombent dessus d'un seul coup). Ces trois personnages centraux sont campés par des acteurs au sommet, à commencer par Marvin, dont c'est ici probablement l'un des meilleurs rôles. Il livre une prestation sensible, tout en subtilité, illustrant à lui seul ce monde vieillissant et dépassé par l'évolution des choses. Jack Palance forme avec lui un tandem très touchant, la scène où ils discutent au bord de la maison et où Palance confie qu'il va se marier est vraiment très belle, et Palance y est formidable, à l'image de sa prestation durant tout le film, où il montre à ceux qui en doutaient encore qu'il n'était pas qu'une gueule mais était capable de proposer un jeu très nuancé. Quant à Jeanne Moreau, c'est un choix de casting assez improbable mais qui fonctionne, son physique cadre parfaitement avec ce personnage de prostituée un peu éteinte, qui espère changer de vie et avoir Monte Walsh à ses côtés. La relation Marvin/Moreau est d'ailleurs très réussie, chose assez rare dans les westerns, c'est une relation pleine de tendresse, dénuée de toute niaiserie et surtout vraiment crédible.



La réalisation de Fraker est de qualité, assez contemplative dans la première partie du film, avec une volonté d’insister sur les choses anodines du quotidien des personnages et de beaux plans des vastes prairies, elle devient plus rythmée dans sa seconde partie, et on commence à voir apparaitre un peu d'action, avec cette impressionnante scène de rodéo qui finit par détruire pratiquement la ville entière. La fin du film se révèle nettement plus sombre, contrastant ainsi avec le début plutôt tranquille, il y a des morts et cela se termine en une chasse à l'homme et un duel. Mais là encore on s'éloigne des westerns d'antan, ce n'est pas un duel épique dans la rue en plein soleil, mais un affrontement âpre en pleine nuit dans un dépôt, seul à seul et dans l'obscurité la plus totale. C'est un film très particulier que ce Monte Walsh, assez lent, pas spécialement passionnant dans son déroulement, mais qui exerce une certaine fascination dans sa description désenchantée du Far-West. Le superbe score de John Barry ajoute beaucoup dans l'intérêt du film, et renforce le côté mélancolique tout en accompagnant admirablement la plupart des scènes.
Ce n’est pas un film qui plaira à tous du fait de sa lenteur et de son manque d'enjeux dramatiques (excepté dans la dernière demi-heure), mais Monte Walsh est à mon avis un film majeur dans l'évolution du western américain, l'un de ceux qui a le mieux réussi à illustrer la fin du Far-West.

7/10
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18 armes légendaires du kung-fu (Les) - 5,5/10

Messagepar Count Dooku » Mar 17 Juil 2012, 15:20

Les 18 armes légendaires du kung fu (Shi ba ban wu yi), Liu Chia-liang, 1982


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Un Shaw Brother assez faiblard à mes yeux, qui bénéficie certes d'un excellent casting (Gordon Liu, Hsiao Hou, Kara hui, Alexander Fu Sheng et Liu Chia-Liang lui-même) mais pêche vraiment par un scénario confus et des gags lourds. En fait, c'est tout la première partie du film qui ne fonctionne pas : le scénario est bordélique, ça part un peu dans tous les sens et le film ne se focalise pas sur un héros susceptible d'attirer l'attention du spectateur. On ne voit pas très bien où ça veut en venir, et le film s'égare dans de longues scènes humoristiques pénibles, comme le sketche d'Alexander Fu Sheng devant la foule, qui est juste pas drôle et ralentit le film (le perso de Fu Sheng est vraiment raté dans ce film, je vois pas à quoi il sert dans l'intrigue). En outre, c'est vraiment vraiment kitsch, avec l'intrusion d'éléments fantastiques tels que les explosions, les pouvoirs des mages guerrier, une espèce de vaudou avec une poupée, etc.



Heureusement, à partir de la révélation de l'identité du personnage de Liu Chia-Liang (soit après 1h tout de même...) le film décolle vraiment, on se recentre sur un petit groupe de personnage et on a droit à des combats vraiment excellents (Liu Chia-Liang oblige, je crois pas avoir vu un seul de ses films où les combats sont pas bons). J'ai bien aimé ce personnage de vieux maître qui a abandonné les arts-martiaux, et qui doit essayer de retrouver son niveau, ça donne d'ailleurs lieu à une scène d'entrainement, passage obligé du genre sauf qu'ici ce n'est pas un jeunot ambitieux qui s'entraine mais un maître expérimenté, ça change. Les 20 dernières minutes du film sont vraiment excellentes, avec une succession de combats jouissifs utilisant les 18 armes du kung-fu dont il est fait mention dans le titre, ce qui donne évidemment lieu à des styles de combats variés et stylés. Bref, cette dernière partie du film est vraiment réjouissante et permet de finir sur une bonne note, mais n'efface tout de même pas les carences du film dans son ensemble, qui manque globalement d'intérêt et est vraiment poussif à démarrer. On est donc très très loin des grandes réussites de Liu Chia-Liang, mais fort heureusement les amateurs d'arts-martiaux auront de quoi se satisfaire.

5.5/10
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Né pour tuer - 7,5/10

Messagepar Count Dooku » Mar 17 Juil 2012, 17:35

Né pour tuer (Born to kill), Robert Wise, 1947


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A l'instar de The Set-up, Born to Kill fait partie des films que Robert Wise réalisa à la RKO au début de sa carrière, et, s'il n'atteint pas le niveau du film avec Robert Ryan, il n'en reste pas moins un excellent film noir, dans la plus pure tradition du genre. La noirceur de ce film réside dans le fait que ses deux personnages principaux sont résolument pourris, mais à différents niveaux. Celui campé par Lawrence Tierney, inoubliable Joe de Reservoir Dogs, est un méchant sans aucune nuance : c'est un type violent, sans scrupule, ambitieux et dénué de toute morale. C'est un personnage qui impose sa présence avant tout par son physique, avec sa stature imposante, sa gueule carrée et son regard mauvais. Tierney convient donc à merveille pour ce rôle, il n'a même pas besoin de jouer, sa seule présence suffit. Le personnage féminin incarné par Claire Trevor est plus ambigu, plus intéressant aussi. C'est un personnage qui nous apparait positif au début, et même à certains moments on la sent hésiter, tenter de réfréner ses pulsions, mais finalement elle opte systématiquement pour les mauvais choix et se révèle en fin de compte une garce manipulatrice. Ce qui est intéressant, c'est que cette perversion progressive du personnage est causée par le contact avec Tierney, qui exerce un pouvoir de séduction sur la femme et la poussera elle-même à commettre des actes immoraux. On retrouve donc le schéma traditionnel du film noir où l'anti-héros est entraîné dans une spirale négative par une femme fatale, sauf que ce schéma est ici inversé : c'est d'un homme-fatal dont il est question, c'est lui qui exerce une attirance sexuelle sur la femme (nulle question de sentiments ici) et c'est par lui que la femme révélera sa nature noire. Au final, alors que c'est l'homme qui commet les meurtres et semble le plus dangereux, c'est bien la femme qui apparait la plus détestable par sa veulerie, son opportunisme et son attitude manipulatrice.



Le film est largement centré sur ce duo principal, mais laisse toutefois la place à d'autres personnages secondaires plus ou moins intéressants. Passons rapidement sur les conjoints respectifs des deux personnages principaux, pratiquement les seuls personnages positifs du film, mais nettement mis en retrait par le scénario et campés de manière assez fades. Le personnage du détective corrompu (Walter Slezak) et celui du fidèle ami de Tierney (Elisha Cook Jr.) sont en revanche nettement plus réussis. Slezak campe un personnage assez jubilatoire par sa bonhommie et sa façon presque nonchalante de mener son enquête, il n'est pas sans rappeler le personnage du détective campé par M. Emmet Walsh dans Blood Simple (en moins pourri tout de même). Elisha Cook Jr., c'est une bouille sympathique qu'on a toujours plaisir à voir dans les films de cette époque, ici somme souvent il incarne un personnage faible, soumis à son ami et qui se charge de ses basses besognes (et n'en sera pas remercié, loin de là).



Le scénario est assez conventionnel et suit un certain nombre de fondamentaux du genre (meurtre, enquête, détective privé, manipulation) mais apparait tout à fait passionnant de par le traitement accordé aux deux personnages principaux, et particulièrement à celui de Claire Trevor. Sa psychologie est assez fouillée, et c'est vraiment intéressant de suivre l'évolution de son comportement à travers tout le film, de la voir se dévoiler jusqu'à montrer sa vraie nature. La mise en scène de Wise habille admirablement l'ensemble, certes on n'atteint pas la richesse formelle des films noirs de Lang, Siodmak ou Preminger, le travail sur les ombres, les contrastes et les cadrages est moins stylisé (excepté pour quelques scènes, comme celle du meurtre au début) mais le réalisateur trouve le rythme juste et sait comment exploiter le physique de Tierney pour le rendre menaçant pratiquement à chaque scène. Un excellent film noir!

7.5/10
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar Heatmann » Mar 17 Juil 2012, 22:48

et le remake de monte walsh avec tom selleck il est vraiment pas mal du tout aussi 8) :wink:
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Salaire de la violence (Le) - 7/10

Messagepar Count Dooku » Mer 18 Juil 2012, 17:05

Le Salaire de la violence (Gunman's Walk), Phil Karlson, 1958


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Western que l'on pourrait qualifier de psychologique par l'importance qu'il accorde aux relations entre les personnages principaux (en l'occurrence, le père et ses deux fils) et à leur psychologie, Le Salaire de la Violence est une véritable réussite de Phil Karlson, réalisateur à qui on doit notamment le film noir Le Quatrième Homme (rien à voir avec le film de Verhoeven).



Le thème du film n'est pas sans rappeler La Lance Brisée, mais là où le film d'Edward Dmytryk optait pour une approche assez romanesque et lyrique, sous la forme d'une pure tragédie familiale, Le Salaire de la Violence se veut beaucoup plus âpre, plus sec, plus désenchanté. La relation entre le père et ses deux fils est vraiment intéressante : ce n'est pas celle d'un patriarche et de sa progéniture, mais presque une relation d'amitié virile, d'ailleurs les fils appellent leur père par son prénom. C'est un père qui n'est jamais parvenu à entrer dans son rôle (a-t-il seulement essayé?) et qui se retrouve dépassé devant l'évolution de ses rejetons, particulièrement l'aîné, un véritable psychopathe. Van Heflin incarne à merveille ce personnage très bien écrit, il apporte à la fois une sympathie et une sensibilité à ce rôle, et sa réaction dans la scène finale est particulièrement émouvante. L'aîné des fils est incarné par Tab Hunter, qui est lui aussi impressionnant dans son rôle, il semble toujours sur le fil du rasoir et son pétage de plomb final est mémorable. Son personnage est une tête brulée, un fils frustré qui a toujours souffert d'être dans l'ombre de son père, personnalité respectée de la ville, mais pour qui il finit par éprouver un profond sentiment de rivalité. On sent que ce rapport conflictuel s'est bâti sur une éducation trop laxiste, où Van Heflin, à force de faire copain copain avec ses fils, ne s'est tout simplement pas imposé comme un père à leurs yeux, avec le respect qui lui serait dû. Du reste, Tab Hunter le dit lui-même à la fin : "Je n'ai jamais eu de père", une sentence qui résume à elle-seule toute la problématique du film. La confrontation finale entre le père et le fils est extrêmement forte et d'une grande puissance émotionnelle, le jeu des deux acteurs y est exceptionnel, de même que les dialogues, et le dénouement est aussi tragique que choquant. Le deuxième fils est en revanche nettement en retrait, c'est un personnage normal, le jeune premier typique avec sa petite romance, et James Darren n'apporte pas vraiment de relief à ce personnage, qui peine à exister face à celui de Tab Hunter.



La réalisation de Karlson convient parfaitement au propos, il ne cherche pas à magnifier les paysages ou à esthétiser les choses par une photographie léchée, au contraire sa mise en scène se fait oublier pour se concentrer sur ses personnages et sur la spirale de violence et de haine dans laquelle ils se retrouvent entrainés (on n'est pas si loin du film noir, pas étonnant de la part d'un réalisateur qui s'est distingué dans le genre). Un western intimiste, qui privilégie les dialogues et la psychologie des personnages sur l'action et les chevauchées épiques, personnellement j'ai beaucoup aimé et je le conseille vraiment aux amateurs du genre! :)

7/10
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar Killbush » Jeu 19 Juil 2012, 13:59

Si jamais tu te sépares de ton dvd des 18 armes légendaires, je suis preneur :wink:
Starting to see pictures, ain't ya?
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar Count Dooku » Jeu 19 Juil 2012, 21:23

Non les Shaw je revends pas, même ceux que j'aime moins je les garde au moins pour la collec'. ;)
Et puis j'ai pas non plus détesté ce film, rien que pour la dernière demi-heure je préfère le garder.
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar Scalp » Jeu 19 Juil 2012, 21:27

Et puis Liu Chia-Lang qui se fight ça se garde.
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Flic (Un) - 6,5/10

Messagepar Count Dooku » Ven 20 Juil 2012, 16:03

Un Flic, Jean-Pierre Melville, 1972


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Ultime film de Jean-Pierre Melville, Un Flic reçut a sa sortie un accueil mitigé, tant critique que public, et est souvent considéré comme un semi-ratage de la part du cinéaste. Personnellement, j'ai toujours supposé que le film subissait cette mauvaise réputation parce qu'il avait le malheur de venir après de véritables chef d’œuvres, parmi les plus grands films du cinéma français (Le Deuxième Souffle, Le Samouraï, L'Armée des Ombres et Le Cercle Rouge), mais que le film devait être en soi un excellent polar, nettement au-dessus de la moyenne. Or après vision ce n'est pas le cas, et si le film porte bel et bien la marque de son auteur (à un point que ça n'en est plus tellement une qualité... j'y reviendrai) et est parcouru de quelques fulgurances, l'ensemble est malheureusement bancal et très en-deçà de ce à quoi Melville nous a habitué.



Ce qui fait la force des films de Melville, c'est à la fois son sens de la mise en scène, froide et épurée, ses personnages présentés comme de simples pions d'une tragédie, et ses références constantes au cinéma américain. Des qualités qui rendent un film comme Le Samouraï fascinant et immersif, mais qui dans Un Flic se trouvent exacerbées à un point tel que Melville semble presque s'auto-parodier. La mise en scène est épurée à l'extrême, il y a très peu de dialogues et le film utilise énormément les ellipses, de sorte qu'au final le scénario se retrouve totalement en retrait et qu'on perd un peu le fil de l'intrigue (là où elle s'imposait toujours au spectateur dans Le Cercle Rouge et Le Deuxième Souffle). Ce sont évidemment les personnages qui font les frais de ces carences narratives, et si les personnages étaient déjà des archétypes dans les précédents films de Melville, ils possédaient une dimension tragique et une humanité qu'on ne retrouve pas dans Un Flic, où les personnages sont totalement désincarnés, à l'image d'une Catherine Deneuve complètement évanescente et dont on ne voit pas ce qu'elle apporte au film (là où Nathalie Delon, bien que peu présente à l'écran, amenait quelque chose d'essentiel au personnage d'Alain Delon dans Le Samouraï). La relation Delon/Crenna illustre bien ce problème également : les deux acteurs doivent avoir trois scènes ensemble, et très brèves de surcroit, si bien qu'on ne croit pas en leur amitié qui pourtant aurait pu être un enjeu tragique et émotionnel fondamental. La présence de Richard Crenna, ainsi que d'autres acteurs américains, témoigne de la passion du cinéaste pour le cinéma d'outre-Atlantique (ça et le look des personnages qui renvoie évidemment aux films noirs des années '40/'50), et Crenna est sans doute l'acteur qui tire le mieux son épingle du jeu dans le film (Delon étant moins convaincant en flic qu'en truand).



Évidemment, un film de Melville ne peut pas être esthétiquement quelconque, et on retrouve toujours ce talent pour poser des ambiances, ces plans magnifiques (l'esthétique bleutée et brumeuse du film est particulièrement réussie) et des fulgurances de mise en scène, telle que le casse au début du film ou l'interrogatoire entre Delon et Michael Conrad (usage très efficace des gros plans). En revanche, grosse fausse note pour ce qui devait être LA scène de bravoure du film (à l'instar du braquage muet dans Le Cercle Rouge) et qui se révèle à moitié loupée à cause de problèmes techniques : le vol des valises dans le train. Le film utilise pour cette scène des maquettes (pour le train et l'hélicoptère) et c'est tellement voyant que ça décrédibilise complètement ce qu'il se passe à l'écran, franchement je me demande comment Melville a pu laisser passer un truc pareil. Une faute de goût énorme qui confirme l'aspect bancal de ce film, avec lequel Melville ne parvient à livrer qu'un squelette de ce qui faisait la richesse de ses films antérieurs.

6.5/10
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar pabelbaba » Ven 20 Juil 2012, 16:10

T'es sacrément généreux, comme tu le dis, les persos n'existent pas, les dialogues pourtant peu nombreux sonnent faux, la scène du train est risible mais surtout beaucoup trop longue (il y a trop d'aller-retours) et le scénario n'a rien d'haletant. Pas la moyenne pour moi malgré quelques trucs dont la première scène.
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar Count Dooku » Ven 20 Juil 2012, 16:21

J'avais mis 6, et puis en faisant les captures je me suis laissé aller à mettre un demi-point de plus pour l'aspect visuel tout de même très réussi.
Je ne pense pas que ce film mérite moins de la moyenne, ou alors c'est vraiment une note de sanction à l'encontre d'un cinéaste comme Melville. Le film a quand même des qualités qui le situent au-dessus d'un polar téléfilmesque lambda.
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar Scalp » Ven 20 Juil 2012, 16:26

Bein Melville ou pas le film est bien mauvais.
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar pabelbaba » Ven 20 Juil 2012, 16:29

Note sanction... Ben oui, le film est pas bon, on s'emmerde sec, les acteurs ne jouent pas, à un moment on n'est pas obligé de sauver un film parce qu'il a 2-3 qualités visuelles.
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Re: [Count Dooku] Mes Critiques en 2012

Messagepar Dunandan » Ven 20 Juil 2012, 16:47

C'est l'un des derniers films de Melville qui me reste à voir, je sens que je vais souffrir :mrgreen: (me reste aussi pas mal de non-polars, et surtout L'Aîné des Ferchaux).
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Ange bleu (L') - 7,5/10

Messagepar Count Dooku » Mar 24 Juil 2012, 21:47

L'Ange bleu (Der Blaue Engel), Josef von Sternberg, 1930.


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Considéré aujourd'hui comme un grand classique du cinéma, L'Ange Bleu est notamment célèbre pour avoir révélé Marlene Dietrich, qui quittera aussitôt après l'Allemagne pour les États-Unis, où elle connaîtra une brillante carrière sous la direction des plus grands (Von Sternberg, Lang, Wilder, Hitchcock, Welles). Il est vrai que l'actrice (qui avait déjà 29 ans tout de même) crève l'écran et dégage une sensualité nettement affirmée, n'hésitant pas à dévoiler ses cuisses à plusieurs reprises (ce qui nous parait anodin aujourd'hui mais était particulièrement osé à l'époque). Marlene est alors au sommet de sa beauté, n'affichant pas encore les traits durs et les joues creusées qu'on lui connaitra lors de sa période US, et elle s'avère remarquable dans le rôle de la provocante Lola Lola, chanteuse de cabaret qui croque la vie à pleine dents et se prendra d'affection pour un austère professeur de lycée. Celui-ci est campé par Emil Jannings, la vraie star du film puisqu'il était l'un des acteurs les plus reconnus du cinéma muet allemand (on le retrouve notamment dans les chefs d’œuvre de Murnau Le Dernier des Hommes et Faust). On sent d'ailleurs que son interprétation du personnage est encore marquée par le muet, son jeu est fortement axé sur son physique et ses expressions du visage, particulièrement vers la fin du film où il n'a pratiquement plus de dialogue. Sa prestation est toutefois de qualité, Jannings parvient à retranscrire le désarroi et l'humiliation de cet homme qui, aveuglé par l'amour, va perdre tout ce qu'il possédait, y compris sa dignité.



Le film a considérablement vieilli sous plusieurs aspects, notamment au niveau du rythme, assez décousu, et plusieurs scènes ne fonctionnent plus aussi bien aujourd'hui. C'est l'histoire de la déchéance d'un homme, et le film ne se prive pas de forcer un petit peu le trait par moments (cf les élèves qui se moquent ouvertement de leur prof, le directeur de la troupe qui en fait un clown, etc.). Le scénario est très classique, tout se déroule de façon assez prévisible mais, heureusement, la mise en scène de Sternberg est suffisamment inspirée pour apporter la force nécessaires aux scènes-clés du métrage. L'absence de musique, typique des films du début du parlant, se fait cependant durement sentir, notamment lors des scènes où il ne se passe pas grand chose, assez nombreuses mine de rien puisque le scénario est relativement mince. Évidemment, comme l'action se situe la plupart du temps dans un cabaret et que l'un des protagonistes principaux est une chanteuse, le film propose un certain nombre de chansons dont certaines continueront d'être interprétées sur scène par Marlène Dietrich jusque dans les années '70. Formellement, on se situe encore dans le courant de l'expressionnisme allemand, c'est surtout visible lors des scènes en extérieurs qui proposent des décors tordus et des éclairages typiques de l'esthétique expressionniste, moins lors des scènes en intérieur dans le cabaret (plus éclairées et où le travail sur la composition des plans est plus conventionnel).



Au final, j'ai été convaincu par ce film qui pour moi n'est pas un chef d’œuvre, mais demeure très plaisant à voir pour ses qualités d'interprétation et de mise en scène.

7.5/10
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