Les joueurs
8.5/10Rejeton lointain de l’Arnaque ou de la couleur de l’argent, Rounders est un exercice de style très agréable qui sent bon le bitume new-yorkais et le bon p’tit jazz d’ambiance.
Passé maitre dans l’art de confectionner de vraies pépites noires (je suis un fan de Kill me again, Red Rock West et Last séduction), John Dahl délaisse les loosers et les femmes fatales pour se focaliser sur le monde fermé du poker. Accompagné d’une excellente voix off qui décrit plutôt bien ce milieu très opaque, le film suit la relation houleuse entre deux potes et le jeu. A ce titre, Matt Damon et Edward Norton se complètent à merveille en accros du jeu, l’un gentil naïf doué et l’autre doux salopard. Ce qui frappe dans ce film c’est cette atmosphère feutrée et cool. Hormis un ou deux tabassages en règles (chez les flics surtout), Rounders ne brandit aucune menace gratuite se cantonnant à raconter une tranche de vie dictée par les aléas de ce jeu de (hasard ?). Sans jamais transcender le genre, la réalisation de Dahl est posée, calme avec une très jolie photo rendant hommage à New York et à sa foultitude de tripots souterrains. Les péripéties sont nombreuses (rythme très haletant, ç dure 120 minutes et l’on ne s’emmerde jamais) et les deux grosses scènes chez Teddy KGB représentent le noyau dur du film. Malkovitch campe un ruskof roublard avide d’Oréos avec délectation, l’un de ces meilleurs rôles à mon sens. On sent clairement le film à bonne ambiance, fédérateur et c’est la raison pour laquelle les seconds rôles sont bien pourvus (Turturro, Landau, Malkovitch, Jansen…).
Sans jamais se laisser pervertir par la thématique de l’addiction, Rounders distille un je ne sais quoi de cool, une atmosphère accueillante, sorte d’invitation à côtoyer ces deux lascars dans un monde qui malgré tout continue de fasciner. En cela, le film est une vraie réussite surfant sur une partition limite Scorcesienne tout en conservant son identité de petit film agréable.