Ed Wood |
Réalisé par Tim Burton Avec Johnny Depp, Martin Landau, Sarah Jessica Parker Comédie dramatique, Fantastique, Biopic - USA - 2h06 1995 |
9/10 |
SynopsisEvocation de la vie d'Ed Wood, réalisateur considéré de son vivant comme le plus mauvais de tous les temps, aujourd'hui adulé et venéré par des milliers d'amateurs de bizarre et de fantastique à travers le monde.
CritiqueFilm excellent, surement un des meilleurs de Burton avec cet hommage au cinéma de genre, aux réalisateurs tocards et fauchés qui mettent la meilleure volonté du monde a faire un film pour un résultat merdique (sauf que la plupart du temps Burton a de gros moyens de nos jours et arrivent à sortir des bouses).
Burton fait le film quasi parfait, une alchimie d'ambiance rétro, casting parfait, mélange d'humour, ridicule, poésie et de moments émouvants rendant ce cher Edward Davis Wood Junior très attachant dans ses déboires de production, passionné par les films de monstres, pseudo SF. Hommage aux films de série Z et aux mythes classiques du cinéma. On verra défiler tous les accessoires des films d'horreur et SF : tombes,cimetières, zombies, soucoupes volantes en plastique, pieuvre géante, squelettes, cercueils, corbillards de pacotille pour notre plus grand bonheur. Tournage qui ressemble à celui des gosses dans "super 8 " niveau moyens techniques.
Ambiance onirique en noir et blanc unique donne un contraste splendide, Burton nous plonge dans les coulisses des tournages des films en carton avec des pseudo acteurs castés plutôt pour leur physique peu ordinaire et leur coût financier limité que leur interprétation. Les moyens ultra limités de tournage nous mène à des scènes ridicules à souhait où le système D prime, et la passion et l'imagination font le reste. Ed Wood est presque prêt à tout pour vivre de sa passion, mentir, se convertir, se travestir, embobiner n'importe quel gogo friqué et a toujours réponse à tous ses détracteurs, avec un J.Depp qui a le sourire " de circonstance" niais de la Chocolaterie du début à la fin. Une interprétation excellente avec ce réalisateur caricatural loufoque optimiste habité par son art qui fait du playback en tournant les scènes en même temps que jouent ses acteurs.
Le film se pose la question : Génie en avance sur son temps ou ringard ?
Burton montre aussi le coté enfantin de Ed Wood qui fait écho au notre qui avons tous flippé devant des films d'horreur de mauvaise facture avec des monstres peu crédibles mais qui nous ont hanté pendant quelques nuits ou plus. Un genre qui déclenche des étincelles dans les yeux de certains et font pousser des hurlements à d'autres.
Martin Landau interprète Bela Lugosi en pleine décrépitude qui reste néanmoins tout aussi passionné que Wood par son art et est en quelque sort le miroir du futur du réalisateur.
Personnage très touchant qui permet de creuser un peu plus derrière le Wood de façade, pudique qui arrive à se livrer un peu plus face à cette légende du cinéma qu'à un quidam. Landau est extraordinaire, méconnaissable, personnage talentueux mais maudit tout comme Wood, qui malgré sa passion sera voué aux échecs successifs et aux illusions du rêve américain. Un vieil homme fragile affaibli qui essaye de nous faire peur derrière un maquillage et une cape, personnage touchant au possible qui voit s'envoler une page du cinéma avec lui dans sa tombe.
Ed Wood reste fasciné par cet acteur dont le talent est très diminué et a une fausse vision de ses prouesses d'acteur, on ressent une vénération pour le personnage qu'il tente d'imiter et il scrute le moindre de ses mouvements.
Les scènes où apparaissent Lugosi - star déchue, habité et rongé par le cinéma, apportent à la fois une touche mélancolique et dramatique mais il est aussi tourné au ridicule dans certaines séquences avec un humour gothique assez plaisant. Le passage avec la pieuvre est extra, Landau arrive à donner vie à ce truc en plastique avec 3 fois rien.
On sent une métamorphose de Lugosi dès le 1er clap qui redevient Dracula le temps d'une scène et dégage une aura formidable.
Le film nous offre aussi une galerie de personnages plutôt décalés, déjantés, Ed Wood recherchant des acteurs aux allures de freaks qui collent bien à ses rôles : champion de catch obèse, chiropracteur reconverti...pas mal d'acteurs peu reconnus et quelques plus bankables :Bill Murray, Sarah Jessica Parker, Patricia Arquette, Vincent D'Onofrio.
Ambiance envoûtante dans les coulisses du bricolage hollywoodien en marge du système avec une inventivité extrême qui ne peut s'attirer que la sympathie du spectateur. Le film nous prend par la main, nous faisant passer par des moments de rire intense à des moments plus intimes tristes pour mieux rebondir et nous livrer un hommage réussi au cinéma kitch des années 50.
Un générique qui continue sur une note humoristique donnant tour à tour l'évolution des différents personnages , qui ont tous fini comme de vrais loosers, une note plutôt pathétique conforme au ton général du film.
Film qui a le mérite de nous faire voyager dans le temps avec un bel hommage à un genre cinématographique particulier.