Belle réussite que ce Moonrise Kingdom, tableau tendre et décalé de l'amour naissant entre deux pré-adolescents. Wes Anderson continue de creuser son sillon atypique dans le paysage cinématographique américain à contre-courant d'un Alexander Payne tout aussi inspiré mais beaucoup plus classique dans son approche tragi-comique.
Si je me permets un parallèle avec le réalisateur du génial Sideways, c'est que j'ai eu beaucoup de peine à entrer dans l’univers de Moonrise Kingdom, comme ce fut le cas il y a quelques mois avec The Descendants. Les 30 premières minutes tournent en effet un peu en rond, malgré un style toujours léché et identifiable entre mille. Le générique et ses travelling incessants dans la maison des Bishop s'inspirent de la Famille Tennenbaum tandis que le narrateur semble avoir piqué ses costumes sur le plateau de La Vie Aquatique. Ça manque un peu d'inspiration tout ça...
Wes Anderson fait un peu trop dans le fan service même si les premières cocasseries font rapidement leur arrivée sur le camp de scouts. Heureusement, le duo de jeunes acteurs nous permet de rapidement nous raccrocher aux branches grâce à leur périple emprunt de liberté et faisant office de remède contre les frustrations de leur quotidien (il est un orphelin, elle ne trouve pas sa place dans sa famille). On a même le droit à quelques petites pointes de violence pour le moins innatendues lorsque la troupe de scouts lancée à leurs trousses tentent de leur barer la route.
Du côté des adultes, on assiste soit avec incompréhension soit avec compassion à cette fugue idyllique vers des lieux et des émotions théoriquement défendues à des gamins de 12 ans. Pas vraiment de performances majeures à retenir même si j'avoue une petite préférence pour Edward Norton (en chef de camp hésitant mais pétri de saines intentions).
Bruce Willis casse quelques peu son image mais reste un peu trop sobre et les autres seconds rôles n'ont finalement que peu de choses à défendre.
Visuellement, c'est plutôt apaisant avec quelques très belles compositions graphiques comme la crique sur laquelle nos deux jeunes tourtereaux plantent leur tente et une multitude de détails plaisants et amusants à picorer tout au long des 90 minutes. A titre personnel, je regrette en revanche le côté un peu trop théâtral de l'épilogue même si la conclusion est belle. On ressort toutefois du film le coeur léger et c'est suffisamment rare ces temps ci pour ne pas profiter du voyage.
A bord du Darjeeling Limited reste toujours mon Wes Anderson préféré (pas vu Rushmore ni Mr Fox) mais Moonrise Kingdom est un essai de premier choix dans sa filmo, idéal pour passer un moment apaisé loin du bruit et de la fureur des blockbusters à l'affiche actuellement et pas toujours réussis. Et pour Madame, c'est du 10/10!