Le château du dragon, Joseph L. Mankiewicz (1946)
Le château du dragon devait initialement être tourné par Ernst Lubitsch. Mais le décès soudain de ce dernier a permis à Mankiewicz de débuter à la réalisation. Un premier essai impressionnant puisque tous les thèmes du réalisateur y étaient déjà en germe, gravitant autour du rapport entre maître et esclave, et de la lente découverte de la vérité derrière l'apparence des bonnes manières du château. Malgré tout, ça demeure assez classique dans le traitement, sortant à peine de cette lutte de classes.
Le contexte historique diffère des habitudes du réalisateur qui préfère l'époque présente, pourtant parfait pour exposer son histoire. Au dix-neuvième siècle, c'est l'époque des nobles et des paysans, dont les différences tranchent. Les paysans, pieux, prudents, et humbles. Les nobles, athées, exubérants, et fiers. L'une des grandes forces du récit est son changement fréquent de ton, tantôt léger, tantôt mélodramatique. La première partie du film porte sur la découverte de ce nouveau monde par la jeune femme (Gene Tierney), qu'elle accueille avec émerveillement, comblant tous ses désirs ou rêves de princesse. Sur cette base-là, elle est charmée par ce Seigneur rempli d'élégance (Vincent Price). Mais elle hésite continuellement entre deux hommes, deux mondes strictement opposés, dont elle constitue la dialectique : le noble charmant et mystérieux, et le docteur (ami des paysans) fougueux et authentique.
Progressivement, la personnalité de ce dernier se dévoile sous de multiples visages, et le rêve n'est pas si rose que cela. C'est là que le film devient plus captivant. Finalement, tout ce qui intéresse cet homme est de faire perdurer son rang social au mépris du progrès et de l'égalité des classes. Cette volonté malsaine culmine dans sa relation aux femmes. Derrière ses airs de gentleman, il est comme une veuve noire au masculin, soutirant aux femmes l'enfantement du fils, le reste du temps s'isolant dans sa tour, et laissant les femmes et sa fille à elles-mêmes dans leur chambre (sa seule preuve d'amour à leur égard est, disons-le, mortelle, ...). Cette vérité semble s'enraciner dans le passé, ce qui apporte une aura légèrement fantastique et paranoïaque (des voix dans la nuit, le tableau de la grand-mère, des bibelots qui ont la double particularité d'avoir et de ne pas avoir leur place dans leur environnement, le N & B ayant un petit côté gothique). Il est dommage d'ailleurs que ce film n'aille pas un peu plus loin dans cette direction, malgré que la réalisation s'y prête bien. Enfin, le dénouement est un peu trop prévisible, fermant simplement la boucle narrative ("fini de rêver"), et manquant ainsi de mordant en ce qui concerne le personnage féminin qui se contente de faire un retour en arrière.
Le contexte historique diffère des habitudes du réalisateur qui préfère l'époque présente, pourtant parfait pour exposer son histoire. Au dix-neuvième siècle, c'est l'époque des nobles et des paysans, dont les différences tranchent. Les paysans, pieux, prudents, et humbles. Les nobles, athées, exubérants, et fiers. L'une des grandes forces du récit est son changement fréquent de ton, tantôt léger, tantôt mélodramatique. La première partie du film porte sur la découverte de ce nouveau monde par la jeune femme (Gene Tierney), qu'elle accueille avec émerveillement, comblant tous ses désirs ou rêves de princesse. Sur cette base-là, elle est charmée par ce Seigneur rempli d'élégance (Vincent Price). Mais elle hésite continuellement entre deux hommes, deux mondes strictement opposés, dont elle constitue la dialectique : le noble charmant et mystérieux, et le docteur (ami des paysans) fougueux et authentique.
Progressivement, la personnalité de ce dernier se dévoile sous de multiples visages, et le rêve n'est pas si rose que cela. C'est là que le film devient plus captivant. Finalement, tout ce qui intéresse cet homme est de faire perdurer son rang social au mépris du progrès et de l'égalité des classes. Cette volonté malsaine culmine dans sa relation aux femmes. Derrière ses airs de gentleman, il est comme une veuve noire au masculin, soutirant aux femmes l'enfantement du fils, le reste du temps s'isolant dans sa tour, et laissant les femmes et sa fille à elles-mêmes dans leur chambre (sa seule preuve d'amour à leur égard est, disons-le, mortelle, ...). Cette vérité semble s'enraciner dans le passé, ce qui apporte une aura légèrement fantastique et paranoïaque (des voix dans la nuit, le tableau de la grand-mère, des bibelots qui ont la double particularité d'avoir et de ne pas avoir leur place dans leur environnement, le N & B ayant un petit côté gothique). Il est dommage d'ailleurs que ce film n'aille pas un peu plus loin dans cette direction, malgré que la réalisation s'y prête bien. Enfin, le dénouement est un peu trop prévisible, fermant simplement la boucle narrative ("fini de rêver"), et manquant ainsi de mordant en ce qui concerne le personnage féminin qui se contente de faire un retour en arrière.
Dommage que le film parte dans plusieurs directions (la bluette, le problème des classes, le fantastique) sans assumer complètement leur liaison, et soit un peu trop classique dans son déroulement. En contre-partie, parfait pour s'initier aux thèmes récurrents du réal'.