Edward aux mains d'argent |
Réalisé par Tim Burton |
8/10 |
Résumé :
Le début du film en résume la teneur : un être différent des autres vivant dans un château, à l'écart d'un quartier haut en couleurs qui est paradoxalement morose et ennuyeux, qui devra s'intégrer dans ce dernier lieu. Une thématique récurrente chez Burton, qui semble piocher un peu dans sa propre expérience. L'aspect gothique du château et sa place reculée sont une mise en abîme évidente de la solitude d'Edward. L'esthétique du jardin, magnifiquement mis en scène, contient déjà l'ambivalence de sa nature (les ciseaux prenant la place de ses mains) : à la fois créatrice et destructrice. Tout le film ne cessera de jouer sur cela, produisant ainsi des moments tantôt comiques (exemple : l'inutilité de son don pour saisir les fourchettes), tantôt poétiques (exemple : la sculpture de glace). Finalement, il ne se passe pas grand chose à l'écran : Edward sera l'étincelle de curiosité qui animera la vie de toute cette petite ville bourgeoise en s'occupant des jardins ou des coiffures des chiens et de leurs maîtres. Mais il attisera différents sentiments par son étrangeté : crainte, fascination, attirance, et peur. Ainsi, il ne s'agit pas d'une histoire rose, et se terminera même comme une chasse aux sorcières faisant une victime de la main d'Edward, pas du tout innocente d'ailleurs, comme s'il s'agissait à travers elle d'une vengeance concentrée contre tous les oppresseurs envers les gens différents.
L'interprétation de Johnny Depp est selon moi le gros point fort du film sans laquelle ce dernier ne fonctionnerait pas. Il parvient à insuffler de la vie à son personnage malgré le maquillage qu'il porte, à travers son regard naïf, décalé et curieux, et sa démarche à la fois timide et en contact, de manière maladroite et touchante, avec des objets banals pour nous. Un regard d'enfant qui anime de nouveau une vie sclérosée. J'adore aussi son air de créateur satisfait lorsqu'il termine une oeuvre, véritablement transformé quand il est dans son élément. Enfin, la réalisation est relativement banale, mise à part durant les incursions dans le château, et particulièrement lorsque nous assistons à une invention gigantesque consistant à faire des gâteaux : un hymne au génie de l'inutilité, pour le simple geste de la beauté sans finalité, tout comme le don d'Edward.