Les lyonnais
8/10Olivier Marchal revient aux affaires avec les mémoires d’Edmond Vidal et son gang des Lyonnais. Dans un style moins dark et moins tape à l’œil que son effort précédent, le réalisateur se fend d’une tranche de vie de voyous respectant à la lettre les codes du polar qu’il a lui-même dynamité et redéfini depuis son imposant 36.
Il est à noter d’emblée que le film fait seulement 1h40. Cette durée est relativement surprenante et peu rassurante dans le cadre d’un biopic. Le récit est en effet très compact, sans fioritures, faisant un incessant et très efficace aller et retour entre le passé et le présent. Le rythme n’en pâtit jamais, les enjeux sont clairement définis et il ressort de tout ça une véritable énergie. Les quelques gunfights sont shootés avec professionnalisme. Le chaos de l’évasion de Tcheky Karyo est superbement mis en scène et rappelle que Marchal est un sacré faiseur. Pour le reste, on sent qu’il a voulu apporter sa pierre à l’édifice des grandes sagas mafieuses. Les codes sont respectés avec le conflit entre générations (j’adore Lanvin qui éclate un mec avec une boule de pétanque), la prise de pouvoir des jeunes loups et la déchéance des anciens. On croise même un flic pugnace lancé aux trousses de Vidal dans une séquence de restaurant faisant écho à un certain Heat. Ca fait donc peut être beaucoup pour un film aussi court mais bizarrement le réalisateur s’en sort avec les honneurs arrivant à gérer toutes ses histoires sans jamais perdre le moindre personnage en route. Evidemment, on aurait voulu plus de braquages et surtout plus d’explications sur l’organisation à peine esquissée par le personnage de Levantal et son boss. Les ramifications politiques sont malheureusement tuées dans l’œuf. Malgré tout, on ne peut pas en vouloir à Marchal d’avoir voulu privilégier l’efficacité et un certain sens du spectaculaire (des fusillades, du twist, du too much avec une CB etc…). Et là le film file à toute allure livrant sans soucis la marchandise. Le casting est un paramètre important dans l’œuvre de Marchal et comme toujours il est très correctement dirigé. «Les jeunes » sont, malgré tout, bien moins iconisés et mis en valeur que Lanvin et consorts. Ce dernier irradie d’ailleurs la péloche de par sa présence magnétique jonglant entre la férocité de l’être qu’il a été et l’homme posé qu’il a promis d’être à sa femme. Encore une fois, Marchal adopte le ton juste, faisant entrer la tragédie, la vraie, dans le polar pur et dur avec une sagesse infinie. Le final se révèle magnifique et surprenant malgré sa très courte durée. Son passé de flic mêlé à une vraie passion du cinéma sont les clés de ce mélange dosé de force et de fragilité. Lanvin est Edmond Vidal mais il est surtout, encore une fois, une projection d’un Marchal au regard toujours aussi désabusé sur le milieu (flics comme voyous).
Les lyonnais est encore une fois une franche réussite pour le réalisateur. Il a bouclé son pari en torchant une saga du crime efficace et bien plus burnée que le Mesrine de Richet et complétant une œuvre policière cohérente dans la plus pure tradition de l’âge d’or du genre.