Le syndicat du crime |
Réalisé par John Woo
Avec Leslie Cheung, Chow Yun-Fat, Emily Chu, Ti Lung
Policier/action, Chine, 1h35 - 1986 |
7.5/10 |
Résumé : Sung Tse Ho et Mark Gor deux seigneurs de la mafia à Hong Kong, coulent des jours heureux sous les ordres d'un parrain vieillissant. Tout irait pour le mieux si Ho n'avait un frère cadet qui a choisi de faire carrière dans la police.
Si ce
Syndicat du crime accuse parfois l'âge qu'il a, finalement comme tous les polars HK de cette période (musique d'action mixée au synthétiseur, acteurs cabotinant un petit peu trop), il faut avouer qu'il demeure une place maîtresse du cinéma de John Woo. Sa dramaturgie est déjà posée, bien qu'assez simple au fond : un triangle fraternel, avec deux frères de sang qui s'opposent en principe (l'un est gangster, l'autre est policier) et par un drame central (la mort du père), et deux autres frères, d'honneur cette fois-ci. Une morale sur le crime est délivrée par John Woo himself, une récurrence dans les films de ce dernier : malgré un temps de gloire (merveilleusement mis en scène au début), celui-ci ne dure pas, et même les meilleurs sont remplacés un jour, simples petits rouages de la grosse machine. Le réveil ou la rédemption est ensuite difficile.
Le gros point fort, comme souvent chez ce réalisateur, c'est sa mise en scène dynamique et travaillée, qui transcende toujours le script, qui regorge ainsi de nuances nourrissant une base narrative simple. Bien qu'elle n'atteigne pas encore les chefs d'oeuvre du maître, tels que
The Killer et
A toute épreuve, il y a quand même des morceaux de bravoure telle cette fusillade effectuée au milieu de pots de fleurs contenant chacun un pistolet. Les scènes d'action sans encore une fois sans concession, ultra violentes, surréalistes (certains d'entre-eux se prennent au moins vingt balles dans le corps), sèches, avec beaucoup de ralentis à la Peckinpah. Et puis il y a aussi l'interprétation du trio, surtout celle des deux gangsters, dont l'intensité de jeu donne une âme au film.
Enfin, ce qui m'a surtout accroché et qui pour moi constitue sa moelle, c'est ce sentiment de nostalgie si cher au réalisateur qui traverse tout le film, à renfort d'harmonicas, sur cet honneur brisé pour chacun des gangsters. L'un cherche à renouer un brin de sa gloire d'antan, mais surtout l'amitié virile qu'il avait avec son frère d'armes. L'autre cherche à se racheter aux yeux de son frère cadet, lequel est aveuglé par sa haine contre son aîné (non seulement par rapport à leur père, mais aussi par l'ombre qu'il recouvre sur sa carrière). Puis il y a bien sûr le sentiment d'un nouveau monde de la pègre sans l'honneur et la loyauté qui étaient essentielles pour ces deux gangsters, et retrouveront un sens à leur existence grâce à leur amitié et à l'auto-dépassement : ils feront un dernier coup pour faire tomber le nouveau chef, risquant ainsi tout ce qu'ils sont (leur statut de criminel) et qu'ils ont (leur vie).
L'une des bases du polar HK contemporain dans sa mise en scène. Des scènes d'action encore très efficaces, et un trio d'acteurs très bon.