Le trésor du pendu est un western classique dans le fond comme dans la forme, avec les thèmes habituels de l'honneur et de la rédemption, et une belle utilisation alternée et équilibrée des décors naturels et des décors artificiels (mis en valeur par le scope). Malgré une intrigue vue et revue, tous les ingrédients sont présents pour passer un bon moment : l'efficacité de la réalisation signée par un vétéran du genre (qui fera notamment
Les 7 mercenaires), la présence de deux excellents acteurs, la courte durée du film, et la qualité de l'écriture du scénario et des dialogues.
Le début est un petit modèle de mise en scène. Les premières images nous font découvrir les Rocheuses, indiquant qu'il s'agit avant tout d'un film d'aventures qui va nous en mettre littéralement plein la vue. Puis ça continue par une évasion. Un flou habile est laissé quant à l'identité et la relation des deux hommes. Mais en quelques traits, les caractères sont plantés : l'un semble assez professionnel, carré, calme, tandis que l'autre est nerveux, et utilise son arme assez rapidement. Très vite nous apprenons qu'il s'agit de deux hors-la-loi liés par l'honneur, se sauvant réciproquement la vie lorsque ça tourne mal. Mais peu après, un nouveau retournement de situation arrive : le libérateur est en fait devenu shérif, et aspire à présent à une vie rangée. Ironiquement, en sauvant son ancien partenaire, cette vie à laquelle il aspire avec maison, travail, et femme, est inquiétée par son passé, et surtout l'existence d'un trésor d'un ancien hold-up. Ainsi, pour résumer, il s'agit d'un film d'aventures dans le cadre du western, centré sur la relation entre deux hommes à la posture différente par rapport à un passé commun.
Le casting est vraiment très bon. Nous retrouvons Robert Taylor, interprétant son personnage habituel en quête de rédemption, aspirant à une vie honnête, et rattrapé par ses vieux démons. Puis il y a surtout Richard Widmarck, que j'avais trouvé excellent dans
Les forbans de la nuit, et qui de nouveau apporte une intensité incroyable à son personnage. Sa seule présence est une plus-value pour le film.
Il y a un background sur la guerre qui est très important, quoique peu original, dans la composition de la psychologie des personnages. Il y a ici une petite réflexion sur la violence. Dans l'armée, il leur était parfois nécessaire de tuer ou de faire des razzias au nom de leur pays. Mais d'autres avaient ça dans le sang, et trouvaient ainsi l'occasion de s'exprimer dans ce cadre-là. A la sortie de l'armée, certains d'entre-eux sont devenus hors-la-loi, les uns parce qu'ils ont été transformés par la guerre et ne connaissaient plus que la violence comme mode d'action, les autres continuant seulement à être ce qu'ils ont toujours été. Or, c'est ce rapport à la violence qui a d'abord lié les deux hommes, puis qui les a éloigné une fois que les bornes ont été franchies.
Le climax est très sympathique, avec une tension qui monte peu à peu, avec l'apparition du village abandonné, un temps de pause pour développer le profil des complices du bad-guy, la présence des indiens (méchants), et surtout une partie du passé du nouveau shérif, dévoilée par l'un des comparses ayant fait la guerre avec lui, lui laissant une "fleur" au nom de ce qu'ils ont vécu ensemble. Cette révélation influence l'issue du duel entre les deux hommes : s'agira-t-il d'une élimination sommaire de l'autre, ou bien d'un duel à l'ancienne ? Les dialogues à ce titre sont bien conçus, et participent de la tension du film, au moins aussi importants que les tentatives de fuite et les éléments perturbateurs extérieurs tels que les indiens ou la brève apparition de l'armée.