L'Homme des Vallées Perdues George Stevens - 1953
Un western avec une énorme réputation ( genre il est classé 3ème dans un sondage des meilleurs westerns US ), donc forcément quand on mate ça on met le niveau d'exigence au maximum, alors j'y vois pas le chef d'oeuvre du genre mais on est clairement devant un bon film.
Ici on est devant l'archétype du western us un héros solitaire sort de nul part, règle le problème et repart tout seul, et tout ça avec mise en avant des valeurs cher à John Ford ( apologie des valeurs familiale et du travail de la terre ) avec beaucoup de naïveté et de manichéisme ( les gentils fermier travailleur contre le méchant propriétaire terrien qui passe son temps au saloon, même si c'est vrai qu'il est dans son droit de les virer ), une figure héroïque presque légendaire à la bonté presque hors norme, un bad guy stylé et sans pitié, l'originalité du récit ( car il y en a une ) c'est de raconter l'histoire via la regard d'un enfant ( qui peut souler à la longue mais bon ça passe ) et vu que c'est selon le point de vue de l'enfant tout est caricaturé à l'extrême : Alan Ladd et son flingue clinquant, la baston homérique dans le saloon ( qui dure bien au moins 5 grosses minutes ) et bien entendu le gunfight final, ici on a une vision idéalisée du héros et donc forcément le méchant est un être lui aussi caricaturé et là on a le Mal à l'état pur, je trouve que cette approche est une manière intelligente de jouer avec les clichés du genre.
La vie à la ferme a forcément un coté petite maison dans la prairie mais c'est pas gênant ( en plus c'est très réaliste avec un gros soucis du détail ), ça ne fait qu'amplifier les morts du film car ici quand on sort son colt c'est uniquement pour tuer et le premier mort arrive très tard dans le film ( avant ça on s'est foutu sur la gueule à coup de bourre pif ) mais quand il arrive c'est pas beau à voir ( pour l'époque c'est rare de voir un tel recul après un coup de colt dans le bide ) et d'ailleurs Peckinpah a reconnu avoir été influencé par ce film et quand on voit ce meurtre dans une ville boueuse on ne peut être que convaincu ( et Peckinpah a pas été le seul a avoir été influencé par ce film car Pale Rider en est une sorte de remake ).
Le personnage féminin est plutôt réussit, déjà ici on est loin des canons en vigueur des autres westerns, et j'ai bien aimé le traitement de ce personnage qui se retrouve attiré vers Shane mais elle résiste par "devoir" conjugale et la relation entre Shane et cette femme est très bien mise en scène avec en point culminant une excellente scène de dialogue filmé tout simplement en champ contre champ mais qui s'avère sacrément efficace (c'est la scène où Shane est dehors sous la pluie et que la femme le regarde à travers sa fenêtre, il y a un juste une fenêtre qui les sépare mais en réalité il y a un monde entre eux).
Ici on a vraiment un triangle amoureux admirablement traité ( sans solution en fait ), pas niais et pas chiant.
La réalisation de Stevens est clairement très pensée, à plein de moment il film donc selon le point de vue du gamin et le point culminant est vraiment la bagarre du saloon, gros morceaux épique où les cascadeurs ( et Ladd et ses 20 cm de moins que Ben Johnson, son adversaire ) du film se foutent sur la gueule en pétant tout le mobilier, j'aime bien aussi l'intro et la fin à la mise en scène qui se fait échos ( une entré de champs et une sortie de champs ).
Bon par contre la meilleure scène du film n'est pas une scène avec le point de vue du gosse, c'est l'exécution de Elisha Cook Jr. avec Jack Palance qui le défie en profitant de son statut de sudiste ( et ce petit élément est bien amené dès la première scène où il se fait vanner par ses amis via des petits airs de chanson sudiste ) comme j'en ai parler plus haut quand la mort frappe c'est pas beau à voir, la scène est d'une efficacité redoutable ( tout est parfait dans cette scène mais le petit truc en plus c'est clairement Palance ).
Le climax final surdécoupé ( enfin pour l'époque ) est un très gros morceaux de mise en scène, enfin c'est l'avant gunfight qui est surtout surdécoupé, car une fois dans le saloon le montage se fait plus poser ( enfin on a quand même des enchainements de plan pré Leone ) mais le duel entre les 2 gunfighter tient toute ses promesses ( et en plus il reprend la même ligne de dialogue que lorsque Palance tue Cook Jr : "
Prove it"
La photo du film a gagné un oscar et c'est amplement mérité.
"That’s my kind of game Joe, maybe you ‘re a match for Ryker, but you’re no match for Wilson"[/center]
Alan Ladd en héros mythique, j'ai pas été impressionné, sa prestation est même un peu terne ( enfin on a échappé à Montgomery Clift donc on va pas trop se plaindre ) alors il joue juste ( tout en sobriété ) mais je sais pas en cowboy j'ai vraiment du mal ( sa petite taille est vachement pénalisante je trouve ) et je trouve qu'il a pas le charisme nécessaire pour interpréter un personnage comme ça (et oui être un nain c'est quand même vachement pénalisant).
Van Helfin ( dans un rôle où Holden a été envisagé ) en fermier travailleur et acharné est bien meilleur ( et ça confirme tout le bien que je pense de lui depuis Tomahawk ), Jean Arthur comme je l'ai dit on est loin des Yvonne Carlo ou Virginia Mayo, ici on a une femme sans charme et au physique quelconque, et elle campe son rôle de femme au foyer avec conviction, Ben Johson a un petit rôle sympa, Elisha Cook Jr ( Mr Olson en personne ) est très bien en sudiste un peu bas du front, le gamin est pas trop soulant mais il a quand même une tête à claque mais il joue juste, et puis on a Jack Palance dans ce qu'il fait de mieux : LE bad guy par excellence et là ça rigole pas, alors c'est clairement du personnage caricatural mais putain cte classe qu'il a, le charisme qu'il dégage avec son visage taillé à la serpe, la prestance qu'il impose ( faut le voir avec ses colts qui penche en avant, c'est vraiment un personnage cinématographique qui d'ailleurs est l'inspiration de Morris pour son perso de Fil Defer dans Lucky Lucke ) et dès qu'il ouvre la bouche on est sous le "charme", son arrivé sur son cheval est mythique ( et pour l'anecdote ça a été filmé comme ça car Palance ne savait ou n'arrivait pas a aller au trot et au galop ), on regrette qu'il ait si peu de scène ( il arrive déjà qu'après 1h de film ) et il s'est fait volé l'oscar par Sinatra (qui en bon rital qu'il a, a dut le payer son oscar pour l'avoir).
Un très bon western mais faut passer outre le coté premier degré qui pourrait laisser pas mal de monde sur le carreau, en tout cas c'est un très beau western, pis bon un film qui a inspiré Leone, Peckinpah et Clint ça se mate.
"Shane ! Come back"
8/10