Incontestablement, Joe Carnahan, que nous n'avions pas vu en si grande forme depuis ses débuts, nous livre l'un des meilleurs films de genre depuis belle lurette. Le Territoire des Loups est un vrai morceau de pelloche viscéral, à même de satisfaire les amateurs de sensations fortes, mais pas que...Le film ne perd pas de temps et à peine cinq minutes suffisent au réalisateur de l'excellent Narc pour poser son ambiance et nous présenter John Ottway (formidable Liam Neeson), son boulot (protéger des ouvriers de l'extrême des attaques d'animaux sauvages) et son trauma ( la mort de sa femme)
Alors que le groupe de travailleurs se rend vers un nouveau lieu de forage quelque part en Alaska (magnifiques paysages au passage), leur avion s'écrase, et le film nous offre alors une scène parmi les plus marquantes vues sur un écran récemment. Ne quittant jamais le cockpit et les rêves du personnage principal, le crash cloue ses passagers et les spectateurs à leurs sièges, les abandonnant exsangues et le souffle coupé au beau milieu d'un enfer blanc (merci le formidable mixage sonore), non sans pertes et fracas.
Très vite, la survie en milieu hostile s'organise pour les sept rescapés (des hommes, des vrais, au caractère bien trempé), en proie à des éléments déchaînés et à une nature féroce, symbolisée par une meute de loups bien décidée à les traquer inlassablement.
Le caractère inéluctable de leur périple, synonyme de dernier combat avant le grand voyage vers l'au delà, est connu d'avance mais le film sait se parer de quelques réflexions bien senties sur la condition humaine sans en faire des tonnes. Les motifs d'espoirs sont peu nombreux (le souvenir d'un proche, l'existence d'une hypothétique divinité), annihilés par l'omniprésence des loups, dont les attaques sont aussi furtives que violentes. Le côté brouillon en dérangera sûrement plus d'un (foutue shaky cam se dit-on) mais peut aussi être perçue comme un prolongement de la terreur qui naît hors champ, prémices aux dites attaques. Carnahan suggère plus qu'il ne montre en fait.
Que ce soit la lueur de leurs regards perçants, le souffle de leur respiration visible en pleine nuit ou leurs hurlements incessants, tout cela contribue à distiller en permanence le doute au sein du groupe de rescapés. Chaque assaut repoussé ou obstacle franchi (un peu gros le coup du saut dans les arbres d'ailleurs), qui devrait leur amener un regain de force et de motivation, n'est qu'un pas de plus vers leur funeste destinée.
En leader alpha de la "meute humaine", Liam Neeson impressionne par son charisme et trouve son meilleur rôle depuis un bail. Il apporte d'ailleurs bien malgré lui un supplément d'âme à son personnage car il a vécu le même drame que lui dans un passé récent (la perte de sa femme). Le dernier plan du film, véritable machine à fantasmes pour cinéphiles en manque d'adrénaline achève de faire du Territoire des Loups un film puissant, ode à la survie et au combat, qui sait aussi toucher en plein coeur les hommes à la force tranquille. (et restez jusqu'à la fin du générique).