Un testament sur la vie, du point de vue de la boxeAutant le dire tout de suite, je n'ai jamais été un gros fan de la série des
Rocky. Mais ce
Rocky Balboa est bien plus qu'un film sur la boxe, il s'agit d'une véritable déclaration d'amour sur la vie, racontée avec une grande sincérité par Sylvester Stallone, à travers le modèle de ce qui est certainement sa plus grosse icône, le boxeur Rocky. Je n'ai pas été conquis la première fois au cinéma car je m'attendais à plus de combats et moins de violons, mais débarrassé de ces a priori la seconde fois, ce film est devenu un véritable coup de coeur pour moi.
La première partie du film a vraiment une tonalité nostalgique, avec ce Rocky vivant dans le passé, ses propres souvenirs et ces valeurs qui font vieux genre tel le respect des autres et de soi, qui vont droit au coeur, surtout dans ce monde dépersonnalisé et bouffé par l'esprit de compétition au détriment des individus. Ainsi, on ne peut être que touché par ce personnage simple, au contact des gens, et qui dit et agit comme il pense, droitement, sans de coups par derrière. A contre-courant de son époque, il nous rappelle l'essentiel. Fierté et sensibilité cohabitent dans le même corps, comme si sa manière de combattre reflétait son existence même. Face à lui, une autre génération de boxeurs, qui sont des personnages avant tout médiatiques, et qui ne savent rien de ce qu'est un véritable combattant, préférant les combats faciles avec l'argent et le titre à la clé. Bref, ces boxeurs ont le physique qu'il faut, mais pas les tripes et l'esprit qui vont avec.
Un match d'exhibition est organisé entre ces deux boxeurs pour faire un spectacle d'anthologie loin de la série facile de victoires du jeune. L'un sur le retour, l'autre jamais battu, le résultat semble évident. Et pourtant ...
Au milieu de ces deux générations de boxeurs, plus qu'un vieux boxeur sur le retour qui veut se prouver qu'il est encore capable d'être et de faire ce qu'il était, se joue un questionnement existentiel plus général sur la vie. Mais rien à voir avec une réflexion pseudo-intellectuelle, elle se résume à ces quelques mots, très simples : "encaisser et avancer". Cette vibration vitale ne peut résonner qu'universellement, et éclaire d'une nouvelle lumière le sens de ces combats à l'issue desquels Rocky ressortaient toujours avec deux énormes cocards. D'ailleurs, cette vision universelle de l'existence sera confirmée pendant le générique, laissant défiler toute une génération de gens d'origine, de sexualité, et de corpulence différentes, parcourant le même trajet d'entraînement que Rocky.
RéalisationLa réalisation est certainement l'une des plus belles et personnelles de Sylvester Stallone. En quelques plans, ce dernier nous plonge dans un New-Jersey respirant d'authenticité. Puis dans toute la première partie du film, il nous installe dans une ambiance mélancolique, intimiste, et douce-amère, remplie de souvenirs et de fantômes encore vivants de Rocky, et simplement montrés par des images d'archives des films précédents. Les fans apprécieront, et les néophytes (comme moi) pourraient même être touchés, tant cette histoire personnelle touche à l'universel. La clé pour parler à tous, c'est de parler de soi en profondeur. Et en effet, qui n'a pas souhaité demeurer soi-même, quel que soit son âge ou sa condition physique ? Qui n'a pas désiré sortir ses tripes pour montrer à la face du monde, mais surtout, par l'intermédiaire des autres, à soi-même, qui on est vraiment ? La deuxième partie est celle de l'entraînement et du combat. Je n'y connais pas grand chose à ce sport, mais probablement que ce n'est pas super réaliste, mais il y a une telle montée en puissance de l'effort et de courage, que je suis passé outre. Lorsque Rocky se tenait en haut de l'escalier, triomphant, on est avec lui. Pareil pour le combat, découpé tantôt de manière réaliste, tantôt de manière stylisée, rappelant parfois certains effets de
Sin City (je pense au N & B où seul le rouge apparaît sur les corps meurtris, pour mettre en valeur la violence qui en découle) ou des films d'Oliver Stone dans la manière clipesque de monter les images. Bref, Stallone filme avec son époque en adoptant le style MTV et ses effets spectaculaires, mais en le retournant contre lui, comme en témoigne à la fin le respect mutuel des boxeurs.
Puis, le thème de la saga résonne encore dans les têtes après le film, ne changeant pas d'un iota, mais remis à neuf par un très bon mixage. Pas mal de violons ponctuent la première partie, entrecoupés par du rap reflétant la personnalité de l'autre boxeur.
Enfin, Sylver Stallone est très crédible en boxeur sexagénaire. Il tient vraiment la forme le salaud, et en comparaison, bien plus que Arnold Schwarzenegger dans
T3. L'autre boxeur est pas mal non plus, même s'il n'a pas le charisme du premier adversaire de Rocky. Les autres acteurs jouent au naturel, sans jamais glisser dans le pathos comme ça aurait pu être avec tous ces violons.
En conclusionBien plus qu'un hommage ou une clôture de série, ce film est un superbe chant du cygne concernant les personnes sur le retour, qui n'a été réitéré que deux fois à ma connaissance dans les années 2000, de manière un peu différente et moins universelle : dans
The Wrestler et
John Rambo, encore de Stallone pour ce dernier, qui signe ici son rôle le plus sensible.