Kazuo mori, découvreur de l'acteur Shintaro Katsu, signe ce second épisode, suite directe du premier épisode,
Le masseur aveugle : Zatoïchi part en pèlerinage pour se recueillir sur la tombe de son ami samouraï dont il avait ôté la vie avec regret, et rencontre son frère sur la route. D'autre part, la réalisation, dernière en N & B, est un simple décalque de celle de Kenji Misumi, mais sans ses précieux collaborateurs partis sur le tournage de
Tuer. Bref, ce film est au niveau de la forme du sous Misumi, et au niveau du fond, un simple approfondissement ou variantes subtiles des thèmes du premier épisode : ça n'a d'intérêt que pour ceux qui veulent connaître à fond la saga Zatoïchi. L'ambiance est sombre, dépressive et nostalgique, qui ne laisse place (sauf un peu au début) à aucune touche d'humour ou de partie de jeu.
IntrigueSur le chemin, Zatoïchi est poursuivi par une bande de yakuzas : en ayant massé leur Seigneur, il s'est aperçu que ce dernier était fou, et donc ses subalternes ne veulent pas que la vérité soit propagée, ce qui signerait le déclin de leur clan, qui est rejoint par un autre dont le chef a été tué par Zatoïchi de nouveau, dans l'épisode précédent. Voilà la base de l'histoire.
Selon moi, quatre événements intéressants ponctuent le récit.
D'abord, contrairement à l'épisode précédent, il ne se retrouve pas au hasard au milieu d'un conflit, mais les deux clans yakuzas le poursuivent pour une raison bien précise : ces deux modes du destin présentés par les deux épisodes orienteront la direction de pratiquement toutes les histoires qui y succéderont.
Ensuite, il y a un dialogue avec une prostituée qui ressemble à son ancienne femme, et qui révèle les difficultés sentimentales de Zatoïchi. On y apprend ainsi qu'il avait aimé une femme autrefois qui s'est enfuie avec un autre homme à cause de cet handicap. Cet homme était son frère (joué par son propre frère dans la vie), un samouraï manchot, blessé par sa faute. Or, ces deux personnages constitueront les fantômes qui hanteront Zatoïchi dans tous les épisodes à venir. D'une part, toutes les femmes qu'il rencontrera seront le reflet de sa première femme morte à cause de lui, et qui ont du mal à tenir la comparaison, et ainsi ne voudra s'attacher à aucune autre de peur qu'elles subissent le même destin qu'elle. Et d'autre part son frère incarne son double maléfique, le catalyseur de tous ses doutes, obsessions, mal potentiel en lui qui porte d'ailleurs sa marque (son bras tranché), et que l'on retrouvera dans les épisodes à venir sous forme de samouraï amoral ou féru de la loi, moine ou Parrain aveugle, ...
Enfin, à l'endroit même où ce dernier péchait avec son ami samouraï, il se souvient quel homme ce dernier était, et le long passage rempli de silences significatifs mais allusifs du premier épisode est remplacé par une explication claire et sans équivoque, qui portait sur le caractère éphémère de la vie et l'absurdité des combats. Ce personnage profondément bon, et mort par sa main, sera aussi un lieu-commun des épisodes futurs, son reflet bienveillant, en conflit avec son côté plus sombre représenté par son frère.
Bref, malgré les nombreuses redites, il s'agit d'un épisode à voir absolument en diptyque avec le premier pour comprendre ensuite la dynamique future de la psychologie de Zatoïchi. Autrement dit, ce sont tous les deux des épisodes fondateurs de la saga.
RéalisationLe tempo est très lent, même pour un chambara, la faute à une réalisation relativement efficace mais sans génie, un pur film d'artisan de studio, mais heureusement ponctuée de plusieurs enjeux dramatiques majeurs que je viens de présenter.
La poursuite "volontaire" des deux clans yakuzas à l'encontre de Zatoïchi est ainsi un prétexte à plusieurs scènes d'actions, un peu plus nombreuses que dans le premier épisode, que ce dernier ne peut plus éviter.
Les seuls personnages qui se distinguent un peu du lot (et encore ils auraient pu être plus développés), sont le samouraï ronin joué par le frère de l'acteur jouant Zatoïchi, et la prostituée dont j'ai parlé plus haut. Les yakuzas sont par contre inexpressifs, et aux motifs inintéressants, du pur menu fretin pour le masseur aveugle.
ConclusionLe seul intérêt du film est donc d'explorer un peu plus le passé torturé de Zatoïchi, qui a tendance à perdre ou à tuer les personnes qui jouent un rôle important dans sa vie (sa femme, son frère, son ami).