Apocalypto |
Réalisé par Mel Gibson
Avec Rudy Youngblood, Raoul Trujillo Action, Drame - 2h18 2007 |
8.5/10 |
SynopsisDans les temps turbulents précédant la chute de la légendaire civilisation Maya.
Jeune père porteur de grandes espérances, chef de son petit village, Patte de Jaguar vit une existence idyllique brusquement perturbée par une violente invasion. Capturé et emmené lors d'un périlleux voyage à travers la jungle pour être offert en sacrifice aux Dieux de la Cité Maya, il découvre un monde régi par la peur et l'oppression, dans lequel une fin déchirante l'attend inéluctablement.
Poussé par l'amour qu'il porte à sa femme, à sa famille et à son peuple, il devra affronter ses plus grandes peurs en une tentative désespérée pour retourner chez lui et tenter de sauver ce qui lui tient le plus à coeur.
CritiqueUn projet plutôt ambitieux de Mel Gibson avec ce film brut de décoffrage qui essaye de nous plonger dans la civilisation Maya, qui était un peuple assez évolué dans certains domaines (codex, constructions de pyramides, calendriers, arts, manufacture d'objets...) mais qui gardent un aspect basique et sauvage à nos yeux : sacrifices humains, chasse à l'homme... Je ne suis pas hyper calée en civilisation Maya mais ce film m'a assez étonnée sur certains points et on se demande où est la part d'imagination et la part de respect d’authenticité dans le long métrage.
Mais, si on passe son temps à chipoter et à mettre en avant les petits défauts qui n'ont pas l'air de cadrer avec notre savoir sur les Maya, il est impossible de faire un film 100% fidèle et il fait bien entendu ajouter de nouveaux éléments pour créer cet univers disparu.
Faut-il donc s'attacher au coté historique de la civilisation ou plutôt au coté humain et universel du long métrage ?
Je penche plutôt pour la deuxième option, laisser tomber ses idées préconçues sur les Mayas et se laisser plonger dans le Gibson's land qui est vaguement inspiré de celui-ci avec une intrigue qui peut être transférée à n'importe quelle époque, dans n'importe quelle civilisation.
La première partie du film se consacre plus aux traditions du peuple Maya, de la capture du héros, à son cheminement vers les temples des sacrifices...Gibson aborde donc les thèmes universels de la confrontation perpétuelle entre les peuples, de la paix impossible, de la cruauté facile...
On a une opposition très nette entre la tribu qui vit en harmonie avec la nature qui est plus pacifique, qui parait moins belliqueuse, et la tribu plus civilisée qui regroupe des êtres qui aiment faire subir des tortures gratuites, agissent sous le joug d'un chef sans penser de façon individuelle et aussi soumis à la religion toute puissante.
Gibson nous met en garde sur l'influence de la civilisation qui engendre une échelle entre les gens de la tribu avec des décideurs et des soumis.
La reconstitution historique est plutôt inégale, je trouve que les acteurs inconnus sont excellents, fidèles aux profils des arts Maya,parlant la langue maya et le yucatèque, en revanche les accessoires utilisés un peu trop ornementaux laissent à réfléchir encore sur leur aspect authentique ...çà fait un peu toc tout çà, on dirait un copié/collé de certaines statuettes issues des musées alors que celles-ci ne sont pas forcement fidèles aux modèles originaux. En revanche, les costumes, les scarifications et tatouages font assez réalistes alors que les pyramides ne sont pas trop à l'échelle et font un peu carton pâte.
Ce qui est bien c'est que Gibson n'a pas multiplié les effets de manche en exposant de nombreux rituels annexes, mais il se focalise principalement sur les sacrifices humains. Le film nous laisse croire que la tribu "civilisée" est à l'unisson et sont des brutes sauvages qui enchainent des centaines de sacrifices en l'honneur du dieu Kukulkan, comme si les prêtres leur avaient lavé le cerveau et avaient mis la population entière en état de transe et de délire collectif.
Les scènes de sacrifices sont bien sur particulièrement fortes avec arrachage de cœur traditionnel, en revanche les têtes et les corps balancés du haut de la pyramide je ne sais pas si c'est très fidèle aux traces laissées par les mayas.
On ne peut penser qu' à un parallèle avec un spectacle banalisé comme on peut en voir tous les jours à la TV, ou la violence exposée au quotidien ne nous touche plus.
Gibson nous montre un charnier avec des centaines de corps montrant l'ampleur et "la débilité" des sacrifices, là aussi on peut rester septique sur cette quantité de corps et de déshumanisation de cette civilisation qu'elle provoque. A savoir que c'était plutôt les aztèques qui faisaient des sacrifices en masse en non les mayas.
En plus, les sacrifiés étaient au contraire des rois ou des gens hauts placés qui donnaient leur sang.
Images chocs gratuites ou fidélité historique, on est encore dans le doute. Mais Gibson veut mettre en avant ce coté peu reluisant de cette civilisation et l'aveuglement religieux et délaisse les aspects positifs de celle-ci.
Ensuite, on retrouvera Gibson qui aime parsemer des êtres handicapés ou difformes le temps de quelques secondes comme des démons qui rodent tel qu'il l'a fait dans "la passion du christ".
On se demande si les Mayas réalisent des tueries de leurs semblables par pure cruauté ou par mysticisme, mais de toute façon il montre que l'homme a une nature autodestructrice depuis la nuit des temps.
Puis, le film prend un virage "survival" lorsque le héros est épargné du rituel et est pris pour cible pour une chasse à l'homme à travers la jungle.
(Encore, un point qui me chiffonne pour la reconstitution historique, ils font courir les prisonniers dans un lieu comme un couloir qui est habituellement un lieu de "jeu de balle"...c'est assez étrange quand on a visité les sites.)
Je trouve que les guerriers mayas ont un look à la "avatar", en beaucoup plus méchants et primaires bien entendu.
Le film n' a donc plus rien à voir avec la fresque historique mais avec une aventure plus viscérale, ambiance "predator"( boue + chutes d'eau + pièges à gogo).
Pour moi c'est la partie la plus réussie et haletante avec une course poursuite dans une jungle hostile où tout peut arriver et où la survie se joue au millième de seconde.
Le jeune héros comprend que face aux mayas barbares qui le traquent, il faut jouer sur le même terrain de la sauvagerie furieuse. Gibson met en scène de façon très rythmée une course poursuite furieuse pleine de rebondissements, très immersive et réaliste avec densité et une tension folle. Utilisant ralentis et travelling à bon escient.
Film intense d'une violence rare et démesurée avec une mise en avant d'une autodestruction progressive programmée depuis la nuit des temps et le choc des civilisations qui veulent se bouffer entre elles perpétuellement n'acceptant pas les différences. La fin donne une note d'espoir mais avec une ombre malveillante et envahissante qui fait écho à la fin du monde des prédictions, avec un retour sur l'Histoire avec un grand H. Le film est plus réussi du point de vue épique et aventure personnelle du héros que de la reconstitution historique, mais il faut avouer que c'est un travail de titan. Belle réalisation et direction des acteurs.