Après deux épisodes honorables, arrive
Spider-man 3, que je trouve foncièrement raté, non seulement au niveau de la narration sans aucune colonne vertébrale, mais aussi au niveau du développement des personnages. Pourtant, sur le papier, beaucoup d'idées semblaient alléchantes : l'arrivée du symbiote, le développement du côté obscur de l'Araignée, 3 super-méchants tous plus charismatiques les uns que les autres dans les comics (le nouveau Bouffon vert, l'homme de sable, et Venom), et ce qui semble être le truc le mieux foutu du film, la célébrité de Spider-man qui fait de l'ombre à celle de MJ. Mais malheureusement, tout ça est mal fichu et mal construit, sûrement la faute à une surabondance de personnages, entre lesquels aucune alchimie n'a le temps de se construire. Je préviens que ma critique va ressembler à un petit cours de comics accéléré.
D'abord, aussitôt arrivé, le Bouffon vert repart aussitôt de scène après une courte bagarre contre l'Araignée. Entre parenthèses, le costume est très sympathique, malgré le contraste avec le comics. Mais par contre, le rendre inopérant pendant plus d'une heure, pour finalement prêter aide à Spider-man contre les deux autres super-méchants, c'est selon moi anéantir toute la psychologie du bonhomme, qui passe de la vengeance maladive à l'entre-aide par un amour commun. Dans le comics, c'était un personnage tellement plus intense et tragique, totalement torturé et aliéné par le souvenir de son père autoritaire, même s'il pouvait aider Spider-man contre des ennemis communs (mais ici ce n'est pas le cas : il s'agit d'aider un ami commun). Ainsi, il s'agit d'un véritable bouffon, dont la complexité est mal rendue.
Ensuite, je trouve qu'on a rendu l'homme-sable trop gentil. Dès le début, il s'affirme lui-même comme une bonne personne au fond qui n'a pas de chance. Et l'idée de le relier à Spider-man par l'intermédiaire de l'oncle Ben, en faisant de lui le véritable meurtrier, en plus d'être fausse dans le comics, est complètement artificielle. Ensuite, ses capacités ne sont pas très bien exploitées : il peut théoriquement se transformer en ce qu'il veut, et là on a droit seulement à des marteaux à place des mains, à des nuages de sable, et à un gros golem géant ressemblant à un mélange de
Ghostbusters et de
La momie. La seule chose réussie est de l'avoir introduit dans une situation misérable, présentant ainsi convenablement ses origines et le motif de ses actes.
Puis, le truc plus ridicule du film : le symbiote, et ainsi l'exploitation du côté obscur de Peter Parker, censé être le clou de
Spider-man 3. Il est résumé de la manière suivante : augmenter le stress de la personne, et ainsi la rendre plus hargneuse. Concrètement Peter Parker manifeste sa noirceur en mettant sa mèche de cheveux de travers et en se déhanchant de manière soit-disant sexy devant les femmes, ce qui va se terminer par un numéro de Dancing hall : c'est absolument risible ! Et dans le comics, le symbiote ne devient pas un banal costume noir qu'on peut enlever ou remettre à sa guise, mais se coule dans la personne pour apparaître ou disparaître selon la volonté de l'hôte. Sa fonction est de faire corps avec ce dernier, et de faire appel à ce qu'il désire de manière la plus secrète, comme être plus puissant ou sans scrupules. L'idée générale est néanmoins bien captée par le film, mais le traitement est absolument mauvais.
Lorsque le symbiote devient Venom, ce n'est pas génial. Comme dans le comics, son hôte est journaliste, et pour une histoire différente du film, il se fera coincé pour contre-façon par Spider-man (et non Peter Parker comme dans le film, mais on n'est pas à un raccourci près), mais par contre il a eu tout le temps de nourrir sa rage - dont l'apparence physique musculeuse est le reflet - et donc de préparer le terrain du symbiote. Dans le film : 1) il est gringalet (et je trouve que l'acteur ressemble à un petit morveux à qui on a cassé son jouet) ; 2) en deux minutes, il devient Venom. La seule chose qui est respectée : le lieu où ça s'est produit, une église, mais sans le cadre dramatique de la BD, car il était censé prier avant de se suicider. Ensuite, la transformation en Venom est absolument ratée, le réduisant à une simple créature fantastique sans restituer sa dimension iconique, à savoir le parfait alter-ego de Spider-man : comme ce dernier, il avait un sens de l'honneur, et donc sauvait ceux qui le méritaient, et parfois il ne s'agissait pas des mêmes personnes que Spider-man, en quoi ils se différenciaient. Et lorsque Venom demande à Spider-man de se rappeler comment il lui a fait du mal, ça n'a aucune portée dramatique (en gros, ce n'était pas la fin du monde, alors que dans le comics, le mec n'avait absolument plus rien sinon sa rage et sa volonté de se venger).
Enfin Gwen Stacy ne sert à rien dans ce film, seulement de faire-valoir à la transformation de Spider-man et de Venom (car en plus de l'avoir fait virer de son job, il lui a piqué sa copine, ah le vilain !), alors que dans le comics, elle est morte à cause du premier Bouffon Vert. A la limite, le film aurait du choisir un autre personnage, au lieu d'être aussi irrespectueux avec la BD, surtout que ce personnage était réellement iconique, révélant la limites des pouvoirs de Spider-man qui ne peut pas sauver tous ceux qu'il aime.
Bref,
Spider-man 3 achève d'une drôle de manière une trilogie qui ne devait pas en être une, car à la base Sam Raimi devait en faire un quatrième, mais suite à des désaccords avec la firme, on va avoir droit à un reboot qui je l'espère, sera à la hauteur du comics. En effet, je l'aime bien au fond Spider-man. Dommage qu'il ait succombé à la règle de trois des films de super-héros. La seule chose qui sauve le film d'un ratage complet, c'est la photographie, certaines scènes d'action, et la réunion de personnages intéressants bien que ratés au niveau du traitement.