Conan The Barbarian (Conan le Barbare) de John Millius
(1982)
Excellente surprise très inattendue pour le coup. Découvrir
Conan The Barbarian à l'heure d'aujourd'hui est un exercice risqué tant le film de John Millius peut accuser de son âge pour certains, et s'il est indéniable que les années ne font pas que du bien à ce pilier de l'heroïc-fantasy au cinéma, il serait toutefois idiot de refuser de voir la puissance que dégage encore l’œuvre 30 ans après sa création. La première chose que l'on remarque à la vision de Conan, c'est véritablement le fait de découvrir le centre de plusieurs fantasmes encore actifs aujourd'hui, des fantasmes qui, irrémédiablement, provoquent des influences. Et découvrir
Conan en 2012, c'est aussi découvrir une œuvre maîtresse qui a, de façon plus ou moins prononcée, inspiré quantités d’œuvres de toutes sortes. Que ce soit l'introduction reprise dans God Of War 3, le passage de la prière repris chez John McTiernan dans
The 13th Warrior ou encore la musique devenue aussi culte que l’œuvre elle-même,
Conan The Barbarian est un film qui se doit d'être respecté tant il posait dès le début des années 80 les bases d'une culture qui explosera 20 ans plus tard avec l'adaptation cinématographique de
Lord Of The Rings. Tout commence avec un écran noir, des basses puissantes se font ressentir pendant qu'un sorcier conte au spectateur le récit d'un guerrier hors-norme, celui qui, par la vengeance, traversera le monde entier, connaîtra maintes cultures et qui, par le sort du destin, rencontrera finalement son but ultime, mais celui aussi qui causera sa perte en tant qu'être humain. Car oui,
Conan est un film bien plus dense qu'il ne pourrait le faire croire. Via une introduction tout simplement excellente et presque totalement muette, Millius arrive à poser les bases de son univers et signe déjà des minutes marquantes pour n'importe quel cinéphile. L'attaque du village, sans être un monument de mise en scène, est particulièrement réussi, et que dire de l’exécution de la mère de Conan, d'une violence hors-champ étonnante, qui achève littéralement le spectateur avant de l'embarquer dans une ellipse temporelle qui est clairement l'une des plus intelligentes que j'ai pu voir. Disons le toutefois d'entrée,
Conan The Barbarian n'est clairement pas un film exempt de défauts. Si le scénario se veut très dense pour qui cherchera les thématiques abordées, il faut toutefois préciser que l’œuvre en elle-même est gâchée par une volonté de créer le spectacle pour le spectacle. Et années 80 oblige, la retenue est loin d'être appliquée, le principal effet de cette volonté étant Conan lui-même, interprété par un Arnol Schwarzenegger qui singe bien plus le rôle qu'autre chose (heureusement par ailleurs que son nombre de répliques soit si limité) et qui le rend beaucoup trop lourdaud via un physique de Mr. Univers qui ne colle pas du tout au personnage. Les scènes d'action le concernant sont souvent proches de tomber dans le ridicule (le montage avec les gladiateurs est vraiment loin d'être convaincant) et font oublier l'essence même du personnage traitée dans les vingt premières minutes du métrage, à savoir que Conan, en plus d'être un guerrier, est aussi un homme instruit, contrairement à la plupart de ses semblables. Un détail important qui est pourtant totalement sous-traité à partir du moment où Conan est libéré de sa condition d'esclave.
La première demi-heure du métrage est donc clairement le meilleur passage du film, le reste, malgré ses qualités diverses, n'arrivant jamais à retrouver la puissance mythologique que Millius a pu accorder au début de son film. Enfin, l'autre point faible du film vient véritablement de quelques choix artistiques douteux, comme cette apparition kitsch de walkyrie dans l'une des dernières séquences, la transformation de Thulsa Doom en serpent géant (transformation qui n'a non seulement aucune explication mais qui en plus ne sert en rien le récit) et bien d'autres petits détails (la machine de l'ellipse tourne pendant des années, mais on ne saura jamais à quoi elle sert) qui ont tendance à titiller. En revanche, certains effets vieillissent plutôt bien, le combat contre le serpent géant, malgré sa très courte durée, est loin d'être mauvais. Hormis ces quelques défauts, le film est tout simplement très bon, accusant très bien de son âge grâce à des décors étonnants (l'Arbre de la Douleur), un script prenant (les relations entre personnages ne sont pas toutes exemplaires mais la love story a le mérite de s'éloigner de ce qui se fait habituellement) et surtout grâce à la composition de Basil Poledouris. Inutile de le nier, le film perdrait toute sa puissance sans sa bande-son magistrale, une bande-son que je ne pensais pas du tout connaître mais que j'avais finalement entendu indirectement depuis des années (impossible de me souvenir où j'ai pu entendre le thème des combats, en revanche le thème de l'amitié est l'une des musiques utilisées en fond d'ambiance dans le Donjon de Naheulbeuk). Difficile d'imaginer l'introduction sans la fabuleuse partition musicale qui l'accompagne, l'un n'allant clairement pas sans l'autre. Enfin, le film jouit en plus d'un plutôt bon casting en ce qui concerne les personnages secondaires, mention spéciale à James Earl Jones, terrible en bad guy (avoir joué Dark Vador ça doit aider un peu) et Sandahl Bergman très convaincante dans le rôle de Valéria (en plus elle marche sur les murs donc respect). Quand à la mise en scène de John Millius, elle est réellement convaincante sans chercher à faire du grand cinéma. Les combats sont suffisamment prenants et l'introduction est superbe, inutile donc de chercher la petite bête de ce côté là. Une très bonne surprise donc que cette découverte qui avait pourtant de quoi rebuter. Par Crom, ça donnerait presque envie de se le revoir en HD !
NOTE : 7,5/10