Polisse est un film qui divise et je le comprends aisément. Naviguant entre deux eaux, celle du documentaire et de la fiction, il ne parvient jamais à trouver son identité propre et même si les intentions à son origine semblent sincères et honnêtes, on ne parvient jamais à donner du crédit à l'image qui nous est servie. C'est bien là le problème du film selon moi, vouloir aborder un sujet terriblement grave, en faisant mine de prendre parti sans le faire finalement. Du coup, la démonstration tombe à plat, et ce pour plusieurs raisons.
La première, et c'est pour moi le plus gros problème du film concerne son casting, à part Joey Star qui assure comme jamais et sait nous faire dépasser son image médiatique, le reste des acteurs est complètement à côté de la plaque, la réalisation totalement improvisée en étant certainement en grande partie responsable. Il aurait certainement fallu opter, pour plus de réalisme et d'immersion, pour des acteurs, beaucoup moins connus sinon amateurs. Comme MaÏwenn a choisi des acteurs que l'on a bien en tête et qui jouissent pour la plupart d'une reconnaissance déjà établie en France, on a du mal à se convaincre de l'authenticité de leurs personnages. Surtout que ces derniers ne sont pas aidés par un script moralisateur qui en fait beaucoup trop pour être honnête, à la limite du support pédagogique promotionnel pour la police. Est-ce un requiem pour nous convaincre de la réalité du métier de policier à la brigade des moeurs ou bien une leçon de morale assénée par des personnalités qui ont forcément la vérité ?
Cette question est le symptôme d'une réalisatrice qui ne prend pas réellement position alors qu'on sent qu'elle veut le faire. La forme du film en est le parfait exemple, sous prétexte de coller au plus près à son sujet, Maïwenn opte pour une réalisation pseudo journalistique, n'en gardant que la prise de vue sur le vif, jamais véritablement cadrée, toujours composée à l'arrache. Pourquoi pas, si tout le reste est dans le même ton, mais pour le coup, ça tombe complètement à plat et c'est énervant. En quoi un cadre réfléchi, une composition minimale des plans aurait desservi le sujet ? En rien, au contraire. En l'état, franchement, c'est assez lourd, surtout que le script vient renforcer ce sentiment de superficialité qui plane sur le film. La romance mièvre dans le ventre mou de l'histoire a commencé à m'entamer (surtout que c'est fait avec la subtilité d'un pachyderme dans un magasin de porcelaine), la vie complètement absurde du perso de Maïwenn avec son faux mari et ses gamines a continué à m'oter tout espoir d'amélioration, la scène dans le centre commercial m'a vu soupirer comme rarement, et enfin, cette fin, si grotesque, m'a littéralement achevé. C'est dommage car le film possède toute de même quelques étincelles passionnées, mais elles sont quasiment toutes dues à la présence de Joey Star qui nous sert de jolis passages et donne un peu de punch au quotidien de l'équipe des moeurs à l'image de cette scène en boite de nuit qui est assez sympa et pas trop vilaine. Quand le cadre est un poil respecté, c'est quand même appréciable, mince alors.
En bref, on sent en Polisse une réelle implication mais qui pêche, la faute à des choix plus que discutables. Et j'en suis réellement attristé, parce que le film est loin d'être la purge annoncée par ses plus fervents détracteurs. On sent un réelle volonté de bien faire, de s'approprier un sujet pas évident et rarement traité au cinéma, en ce sens, Polisse force le respect. Joey Star est au diapason et m'a impressionné, servi par un script neuneu et bien stéréotypé, il sort tout de même une prestation qui calme, sans cesse sur le fil, une belle surprise pour ma part. Je pense que le Polisse souffre d'un petit manque d'expérience de sa réalisatrice, dépassée par un sujet qui aurait mérité soit une totale implication de type documentaire, ou alors un script plus fin et moins choc pour faire choc. A vouloir faire du brute sans y aller à fond, on s'enferme dans une tonalité mi-figue mi-raisin un peu maladroite qui vient totalement anéantir toute authenticité, ce qui était pourtant le but recherché, à priori.