L'amour en fuite |
Réalisé par François Truffaut
Avec Jean-Pierre Léaud, Marie-France Pisier, Dani, Dorothée
Comédie dramatique, FR, 1h34 - 1979 |
5/10 |
Résumé : Où l'on retrouve Antoine Doinel, le heros de Truffaut, après son divorce.
L'amour en fuite clôt le cycle sur Antoine Doinel. Cette fois-ci, le récit se passe après son divorce d'avec Christine. La narration est assez spéciale, puisqu'elle insère plusieurs scènes des films ou courts-métrages sur la vie d'Antoine, faisant office des souvenirs des personnages. Autrement dit, Truffaut réfléchit sur son oeuvre, et élabore une signification déterminée par la série des séquences choisies. Il s'agit d'une mise en abîme, puisque le metteur en scène s'interroge sur son propre passé par l'intermédiaire de ses personnages qui eux-mêmes se questionnent à travers les films précédents du cycle d'Antoine (qui doivent ainsi impérativement être vus précédemment, sous peine d'incompréhension totale). Cette manière de travailler suppose aussi une idéologie défendue par le réalisateur :
- Toute oeuvre ne peut être élaborée qu'à partir de souvenirs personnels, rien n'est absolument inventé (Antoine lui-même fait croire qu'il peut imaginer des choses nouvelles dans ses romans, mais celles-ci trouvent toujours leur source dans des événements vécus).
- La manière dont on relit sa propre histoire implique des amalgames et des changements subtils par rapports aux faits réels (en racontant son histoire, on se raconte des histoires).
- Et enfin, une oeuvre d'art peut se résumer à un règlement de compte personnel avec sa propre vie (le cinéma est "un agrandissement" ou une "amélioration" de la vie selon les expressions de Truffaut).
Au final, L'amour en fuite est de la bonne branlette intellectuelle, mais au moins elle a le mérite de nous livrer des clefs de compréhension sur une oeuvre composée de plusieurs films, même si bien sûr on peut les regarder à travers notre propre grille d'interprétation. Comme éléments nouveaux, on découvre Dorothée (du "Club") en actrice, qui ne détonne pas, puisque les autres acteurs jouent aussi bien que dans les autres "Antoine Doinel", et la chanson d'Alain Souchon "L'amour en fuite" qui donne le ton au film, moins énervante que celle de C. Trennet. Sinon, la réalisation n'a rien d'extraordinaire, toujours épurée, et dont l'intérêt réside entièrement dans la manière dont les nouvelles scènes (on retrouve d'ailleurs certains personnages des anciens épisodes) s'imbriquent avec les anciennes dans la narration ainsi construite.
Probablement le meilleur "Antoine Doinel" depuis les 400 coups, grâce à la lecture personnelle de Truffaut concernant ce cycle. Mais comme d'habitude, on a du mal de passer du particulier au général, ce qui est selon moi le principal défaut de cette série, qui est avant tout une auto-analyse cinématographique du cinéaste.